MEYER, 25 Novembre – Jovenel Moïse, peut-être pour fuir la désaffection dont il est l’objet en Haïti, s’est retourné totalement vers l’étranger.
Sur son compte Tweeter, il parait toujours fier d’annoncer qu’il a conversé avec tel chef d’état, tantôt le premier ministre du Canada, tantôt le président de Madagascar, mais surtout le chef d’état turc, Recep Tayip Erdogan, qui est celui qui lui permettrait de réussir son pari de donner l’électricité au peuple haïtien 24 heures sur 24. Un rêve fou pour tout le monde, sauf parait-il pour le président lui-même.
Jovenel Moïse s’en remet aux étrangers alors qu’il continue de taper sur les élites économiques locales qu’il traite de tous les noms.
C’est une conséquence normale d’avoir choisi de voter à cent pour cent aux côtés de l’administration Trump dans tous les dossiers de politique étrangère. En conséquence, comme le Petit Poucet, l’actuelle administration haïtienne suit à la trace les mêmes adresses que son grand allié, d’ailleurs beaucoup plus dans l’intérêt politique de Jovenel Moïse qu’à l’avantage du peuple haïtien. Il n’y a qu’à voir le traitement qui a été réservé par Mr. Trump à l’immigrant haïtien, y compris à nos TPS, quelques dizaines de milliers de compatriotes qui avaient trouvé réfuge aux Etats-Unis au lendemain du séisme de janvier 2010 et dont l’allié de Jovenel Moïse a ordonné le renvoi pur et simple dans leur pays, sans aucune considération, y compris les enfants qui leur sont nés pendant les dix années passées là-bas.
Ni de la situation économique en Haïti même qui a continué à disparaitre littéralement sous l’actuelle administration, alors que l’alliance avec Trump nous a privé de l’aide de loin plus garantie du Venezuela dont le président américain sortant a tout fait pour obtenir le renversement de l’actuel pouvoir.
Jovenel Moïse dépend à ce point de l’étranger que son ministre des affaires étrangères vient d’annoncer qu’il a sollicité l’expertise de l’OIF (Organisation internationale de la Francophonie) pour le projet de nouvelle Constitution que le chef de l’Etat veut à tout prix achever avant les prochaines élections.
Or en cela contrevenant tout à fait aux recommandations des mêmes Etats-Unis. De ses mêmes plus fidèles alliés. Du moins jusqu’à date puisque à partir du 24 janvier prochain le pouvoir exécutif américain passera en d’autres mains, celles d’une administration, démocrate en l’occurrence, et qui n’aura pas forcément les mêmes comportements que la précédente.
Aussi à quoi joue Jovenel Moïse ?
Son ministre de l’Intérieur vient d’annoncer que des élections auront lieu l’année prochaine (2021), mais en s’empressant d’ajouter que le président a encore une année de mandat contrairement à l’opposition qui veut sa démission le 7 février 2021.
Lire la suite : HAITI : Jovenel et le ‘blanc’, lequel est prisonnier de l’autre ?
PORT-AU-PRINCE, 20 Novembre – Et voici mis en place aujourd’hui tous les éléments qui ont constitué la crise politique de 1957, celle qui va déboucher sur la dictature à vie des Duvalier, trente ans ou presque d’un pouvoir sans partage avec un bilan de dizaines de milliers de morts.
D’abord ce vendredi 20 novembre 2020 sans raison aucune les rues de la capitale haïtienne ont été à nouveau la proie des flammes : des véhicules transformés soudain en torches aux flammes visibles plusieurs lieux à la ronde et dans les avenues les plus fréquentées. Dans le tohubohu qui s’ensuit on apprend que ce sont les ‘Fantom 509’ qui ont refait leur apparition. Comme lors de leurs prestations précédentes, il s’agit de quelques dizaines d’individus, masqués pour la plupart, lourdement armés et qui parcourent les rues, jetant la panique tandis que tous les véhicules immatriculés service de l’Etat se trouvant sur leur chemin, sont passés immanquablement par les flammes.
Pendant ce temps les pouvoirs publics laissent l’impression d’être totalement désarmés devant ce phénomène peu commun parce que le ‘Fantom 509’ ce n’est pas une émanation de l’opposition proprement dite mais c’est un produit du système étatique. C’est une branche dissidente de la Police nationale d’Haïti (ou PNH) mais contre laquelle cette dernière ne peut rien apparemment. Les membres du groupe n’ont pas été bannis. Ils ont toujours leur poste au sein de la PNH.
En effet, alors que votre maison ou votre entreprise dans la même situation pourrait disparaitre dans les flammes car les sapeurs-pompiers n’ont jamais d’eau quand ce n’est de gazoline pour répondre à un appel, eh bien vendredi ils suivaient pratiquement à la trace les ‘Fantom’ pour rapidement intervenir et éteindre les véhicules incendiés.
Cela vous rappelle quoi ?
Rien ?
Rien parce qu’on dit que les Haïtiens ne vivent pas vieux (moyenne d’âge 30-45 ans) et donc peu d’entre nous qui ont connu la crise politique de 1957 mettant aux prises des candidats dont l’Histoire a retenu au moins les noms des principaux : François Duvalier, Louis Déjoie et Daniel Fignolé.
(Un quatrième, Clément Jumelle, ex-ministre de l’économie sous le gouvernement précédent du Général Magloire, n’a pas autant marqué son époque).
Mais en 1957 on les aurait cités plutôt dans l’autre sens : Daniel Fignolé, Louis Déjoie et en dernier lieu François Duvalier.
Pourquoi ? Parce que le Dr. Duvalier avait apparemment le moins de chances de l’emporter.
D’abord face à un personnage charismatique comme le Professeur Daniel Fignolé. Surnommé l’idole des masses, celui-ci était le candidat de toutes les formations syndicales ainsi que de la jeunesse universitaire.
Son mouvement s’appelait ‘le Rouleau’ (appellation officielle, MOP – Mouvement Ouvriers Paysans) et ce n’était pas sans raison. Parti du Bel Air où était sa base, d’un claquement des doigts du candidat, le ‘Rouleau’ envahissait Port-au-Prince et allait éventuellement détruire tout ce qui appartenait aux camps opposés. Comme il arrivera à Radio Caraïbes, supporter de Louis Déjoie, ou un autre jour à Radio Port-au-Prince qui faisait la propagande pour le candidat Duvalier jusque-là sans un grand écho. Etc.
Bref Daniel Fignolé était incontournable mais attendez la suite …
MIAMI, 7 Novembre – ‘Barbecue’ procède à l’arrestation du présumé meurtrier de la jeune Evelyne Sincère qu’il va ensuite livrer à la police nationale, sous les applaudissements de ses anciens collègues - Jimmy Chérizier dit Barbecue est un ancien membre de la Police nationale d’Haïti (PNH).
Aujourd’hui il est plus connu comme leader d’une soi-disant fédération de gangs armés popularisée sous le nom de ‘G-9 alliés et famille’ qui occupe-rait tout un pan de la capitale, Port-au-Prince, puisque c’est encore Barbecue qui dit dans une vidéo mise en ligne sur les réseaux sociaux que c’est là que Obed Joseph, dit Kiki, le présumé assassin, est venu se réfugier et qu’il a décidé de le livrer à la police pour que cette dernière (cependant la seule force publique constitutionnellement reconnue) n’ait point besoin de venir roder dans son voisinage. Vous avez bien entendu.
Voici en deux mots décrite la situation que nous vivons : un chef de bande, aussi puissant qu’un seigneur de guerre du Moyen Age, et même d’avant le Moyen Age quand la notion de l’ordre public était totalement inconnue, qui peut défier la force publique et même montrer qu’il est plus efficient, et plus puissant, puisque c’est lui qui procède à l’arrestation de l’individu le plus recherché du pays, tant le meurtre crapuleux de la jeune Evelyne Sincère a révolté les consciences - pour remettre le présumé criminel à la police.
Récemment c’est encore le même Barbecue qui avait averti solennellement l’opposition que tous ceux qui s’aviseraient d’aller manifester contre le pouvoir en place le 17 octobre (anniversaire de la mort par assassinat du fondateur de la nation, Jean Jacques Dessalines), auraient affaire au ‘G-9 alliés et famille’ …
Barbecue un allié du pouvoir en place ?
Probablement puisque ce dernier n’a pas refusé (du moins officiellement) son coup de main le 17 octobre dernier …
Mais un allié bien encombrant puisque pourquoi a-t-il besoin de le crier sur les toits ?
Réponse : Jimmy Chérisier dit Barbecue est lui aussi ‘wanted’, recherché non seulement par l’autorité nationale, même supposément ( !!! avec trois points de suspension), mais aussi par la communauté internationale. Un nouveau rapport du BINUH (Bureau intégré des Nations Unies en Haïti) fait état de l’aggravation de la situation sécuritaire dans le pays (tweet du 4 novembre 2020) et que les Nations Unies restent disponibles pour appuyer les autorités nationales ‘qui doivent protéger la population et arrêter les instigateurs, auteurs et complices des crimes’ (information Gazette-Haïti-News).
Barbecue faisant de loin plus monstrueux que son prisonnier …
Or c’est Jimmy Chérisier, lui-même recherché, qui procède à l’arrestation, sans tout à fait expliquer dans quelles circonstances, de l’individu actuellement le plus recherché, présumé kidnappeur, violeur, assassin et ayant abandonné le cadavre de la victime sur une montagne d’immondices, à Delmas 24, le dimanche 1er novembre écoulé - pour livrer à la justice le monstre (au visage juvénile, Barbecue faisant de loin plus monstrueux que son prisonnier) …
MIAMI, 30 Octobre – Au moins deux Haïtiens auront été reçus dans le Oval Office, bureau du président des Etats-Unis, sous l’administration Donald Trump.
Ce sont les deux enfants adoptifs du nouveau membre de la Cour Suprême des Etats-Unis, la juge Amy Coney Barret, qui a sept enfants avec son époux, dont deux originaires d’Haïti, Vivian Barret et John Peter Barret.
Les deux ont été adoptés dans le même orphelinat en Haïti (la juge Barret a - note la presse américaine - toujours parlé librement de ses deux adoptifs) : Vivian arrivée aux Etats-Unis cinq ans plus tôt, elle a aujourd’hui 18 ans, tandis que John Peter est un survivant du séisme qui a frappé Haïti le 12 janvier 2010 faisant plus de 200 mille morts.
De Vivian, la juge dit qu’elle était si petite qu’on ne s’attendait pas à ce qu’elle survive. Tandis que John Peter avait 3 ans lors du séisme. Alors que les démarches étaient déjà en cours pour son adoption, ce qui n’était pas facile, les autorités des deux côtés faisant des difficultés, c’est le séisme qui est venu tout débloquer.
A ce sujet l’administration Obama (dont le vice-président s’appelait lors Joe Biden) s’est montrée plus que coopérative, ouvrant largement les portes des Etats-Unis aussi bien aux adoptions qui étaient en souffrance qu’à leurs accompagnateurs et accompagnatrices ( ! ).
Selon certains ce fut un mouvement à l’égal de la fuite des Sud-Vietnamiens pour les Etats-Unis après l’entrée des Vietcong à Saigon.
La nomination de la nouvelle juge de la Cour Suprême vient soulever un peu le voile sur l’adoption des enfants haïtiens dans le monde, un phénomène qui a peu d’écho en Haïti même.
D’abord les Haïtiens eux-mêmes n’ont pas une histoire réussie dans l’adoption des enfants de leur propre pays. On connait l’expression ‘restavèk’ qui dit bien ce qu’elle dit : c’est la petite ‘boniche’ immortalisée par notre célèbre conteur Maurice Sixto sous le nom de : ‘Ti Saintanise.’
Cependant la présence de deux adoptifs d’Haïti, accompagnant leurs célèbres parents, au bureau du président des Etats-Unis n’est pas passée inaperçue.
Déclaration du président Donald Trump dans son hommage à la juge Amy Coney Barret, dont la nomination par lui n’est pas sans intention – il en espère les voix de la communauté des chrétiens catholiques conservateurs à laquelle elle appartient, pour les présidentielles de ce 3 novembre 2020 : ‘Elle a ouvert sa maison et son cœur et adopté deux beaux enfants d’Haïti.’
MIAMI, 23 Octobre – Haïti serait-elle le seul pays au monde immunisé contre le Covid-19 ? C’est du moins ce qu’il en semble à voyager aujourd’hui entre notre pays et les Etats-Unis.
Bien que les sites internet indiquent aujourd’hui ‘0 cas’ à la mention d’Haïti, mais il faut le voir pour le croire.
Le vol American Airlines en provenance de Port-au-Prince est le seul, oui le seul, qui atterrisse vendredi à midi 45 à l’Aéroport International de Miami, je répète l’unique avion de passagers venant du monde entier.
Nous sommes les seuls, nous Haïtiens, au nombre d’un peu plus d’une centaine à nous engager sur le tapis roulant et à embarquer dans le petit train qui conduit au contrôle de l’immigration.
Nous répétons l’immense aéroport de Miami est totalement vide, totalement à nous … les passagers du vol 1181 de la American Airlines en provenance de Port-au-Prince, Haïti.
Vous rendez-vous compte de ce que je vous dis. Un aéroport où se bousculent jour et nuit plusieurs dizaines de milliers de personnes de tous les coins du monde, mais où soudain ne défile un jour qu’une poignée venant d’un seul endroit, Port-au-Prince, Haïti (West Indies), un tout petit coin de la Terre !
Cela mérite de figurer dans les livres d’Histoire. Avec bien sûr, avec hélas comme tête de chapitre : le Coronavirus.
Nous ne pouvons en croire nos yeux. Cela voudrait-il dire que Haïti est le seul pays au monde je ne dirais pas, qui ne soit frappé par l’épidémie qui a fait plus d’un million de décès dans le monde (à date 1 million 145.847, dont aux Etats-Unis seulement : 223.948 tandis que le bilan affiché pour Haïti c’est 231), oui le seul qui serait immunisé au point d’être parmi les rares pays auxquels on ne ferme pas la porte au nez alors que le monde entier, en ce même mois d’octobre 2020, est à nouveau forcé de s’enfermer à double tour, ce qu’on appelle la Deuxième Vague tant redoutée. Bref le monde entier devant fermer la porte au nez au … monde entier.
En tout cas tel n’est pas le sentiment pour nous autres qui arrivons ce vendredi 23 octobre avant 8 heures a. m. à l’aéroport de Port-au-Prince pour embarquer à bord du vol de la American Airlines en partance moins de deux heures plus tard pour Miami, Floride.
L’aéroport Toussaint Louverture de Port-au-Prince n’a pas la foule des grands jours. Quelques passagers nous dépassent comme s’ils étaient plus pressés. C’est un vol pour Santo Domingo, capitale du pays voisin, la République dominicaine. Pas grand monde. La pandémie fait beaucoup de ravages aussi par là.