MEYER, 4 Sept. – La classe politico-électorale a moins son air d'éparpillement, les camps commençant à se rassembler. Et par la force des choses. Non par volonté. Ainsi deux tentatives n'ont pas obtenu le résultat escompté. Une lancée par les politiciens André Michel et Steven Benoit, qui s'est terminée sans avoir pris une décision.
L'autre à l'actif d'un dénommé secteur protestant, a désigné comme son candidat à la présidence notre confrère Clarence Renois (parti UNIR) mais ne semble pas avoir fait l'unanimité dans ledit secteur.
Dans le même temps, les rues de la capitale retentissent du bruit des manifestations dont les réclamations se font de plus en plus une course aux enchères. Elles sont à l'actif de plusieurs partis politiques unis non seulement par leurs desiderata (annulation du premier tour des législatives qui a eu lieu le 9 Août dernier ... et démission du conseil électoral qui les a organisées) mais aussi par certains liens idéologiques, sinon sentimentaux. Tous se rattachant, y compris sur le plan personnel, au grand courant Lavalas, celui-ci ayant au fil des ans éclaté, ou plutôt fait du lest, pour donner naissance à une infinité de nouvelles formations, celles-ci animées par d'anciens barons Lavalas.
Aristide, Préval, Martelly ...
Il est vrai que c'était pendant la longue absence du pays du fondateur et leader spirituel, l'ex-curé de Saint Jean Bosco, Jean-Bertrand Aristide, condamné pendant plusieurs années à l'exil en Afrique du Sud (2004-2011).
Mais dans le même temps, Lavalas a vu partir plusieurs de ses têtes de pont, pour leur propre survie politique, parce que le président en exercice, René Préval (lui-même un ex-premier ministre d'Aristide) s'est refusé à laisser le parti de ce dernier prendre part aux compétitions électorales. Aristide est revenu en Haïti en 2011, peu avant la fin du mandat de Préval.
Par conséquent ce n'est pas seulement l'appartenance idéologico-politique qui unit les manifestants mentionnés plus haut, mais c'est aussi ... la haine de René Préval.
Qui plus est, ce dernier est revenu dans l'arène comme super-conseiller d'une nouvelle formation politique, Vérité, qui a marqué des points lors des législatives du 9 Août.
MIAMI, 15 Septembre – Le vendredi 11 septembre, pour débuter la mission du navire hôpital américain, USNS Comfort, à Carrefour, au sud de Port-au-Prince, l'ambassade des Etats-Unis avait invité quelques médecins cubains pratiquant dans le cadre de la mission médicale cubaine dans notre pays, ainsi que l'ambassadeur plénipotentiaire de la république de Cuba, Mr. Ricardo Garcia.
Mine de rien, c'était un grand jour parce que une scène impensable pendant plus d'un demi-siècle, depuis 1962 jusqu'à décembre 2014 lorsque les présidents des Etats-Unis, Barak Obama, et cubain, Raul Castro, ont annoncé leur décision réciproque de reprendre officiellement les relations diplomatiques entre ces deux redoutables ennemis de la Guerre froide ou confrontation militaro-idéologique qui a placé constamment le monde sous la menace nucléaire.
Haïti est l'un des rares pays tiers sinon le premier à jouer un tel rôle de facilitateur entre les deux ex-ennemis. En dehors du Vatican, bien sûr.
Un rôle de boite aux lettres ...
On pense que, avec de la chance, ce ne sera pas non plus la dernière fois, le rapprochement cubano-américain étant susceptible d'amener éventuellement des changements positifs dans la région.
Ce n'est pas la première fois non plus que Haïti aura joué un tel rôle de boite aux lettres entre nos deux importants voisins.
Ainsi le président René Préval nous raconta comment le président Bill Clinton s'est laissé aller un jour lors d'un sommet des chefs d'état du continent (lors moins Cuba) à exprimer une certaine admiration pour les résultats atteints par ce dernier dans le domaine de la santé publique et de la médecine préventive (mortalité infantile parmi les plus faibles au monde : 4,2 pour 1.000 ; 6,7 médecins pour 1.000 habitants alors que l'OMS se satisfait de 2,8). En même temps que la petite nation caribéenne a développé l'une des industries pharmaceutiques les plus dynamiques. Championne dans la fabrication des vaccins etc.
Evidemment Clinton souligna que ce n'est là qu'une appréciation personnelle mais qui ne doit pas fuiter à l'extérieur, sinon il serait obligé de démentir.
Mais il n'ignorait pas non plus les excellentes relations du président Préval avec les dirigeants de La Havane.
MEYER, 25 Sept. – Silence, on tourne. Nos leaders sont peu bavards ces jours-ci. C'est une autre étape du processus. Et qui se déroule dans les antichambres plutôt que sur la place publique. Celle des grands rassemblements avant l'assaut final.
La grande confrontation c'est dans un mois exactement. Le dimanche 25 octobre auront lieu en même temps les présidentielles, le second tour des législatives et les municipales.
Cela fait du monde mais en même temps les têtes d'affiche commencent à se compter sur les doigts d'une seule main.
Parce que, même avec une Constitution quasi parlementariste, c'est l'élection du président de la république qui occupe le plateau principal, qui constitue le big show. Et donc qui déplace les foules. Et c'est automatiquement autour que commencent à prendre position les acteurs. A tous les niveaux.
C'est aussi l'heure bien entendu des grandes négociations.
Il est de notoriété que le parti au pouvoir, PHTK (Pati Ayisyen Tèt Kale), est en train de convaincre ses différentes composantes éparses, en tête la formation Bouclier, qui affiche son propre candidat à la présidence, Mr Steve Kawly, et a marqué des points au premier tour des législatives, de rejoindre le giron familial.
Si cela peut marcher au niveau des législatives, par le jeu des désistements des uns en faveur des autres, puisque cela assurerait éventuellement un plus grand nombre d'élus proches du pouvoir dans le prochain parlement, par contre il semble que Mr Kawly répugnerait à abandonner sa candidature à la présidence au profit du candidat du PHTK, Mr Jovenel Moïse.
Les déçus du Lavalas ...
Il est bruit que le palais national fait jouer également d'autres atouts. Y compris dans le grand vivier des déçus du Lavalas. En effet beaucoup d'anciens barons du parti de Jean-Bertrand Aristide ont traversé, avec armes et bagages, dans le camp du président Michel Martelly. Faut-il citer l'ex-passionaria Sò Anne (Annette Auguste), qui a fait de la prison après le second renversement du pouvoir Lavalas en 2004 et dont les billboards jalonnent le département de l'Ouest comme candidate au sénat pour le parti Tèt Kale, ou un activiste comme l'ex-député Nahoum Marcellus (Cap-Haïtien) ou encore l'actuel ministre de la communication Mario Dupuy, qui prête ses services de stratège politique au parti au pouvoir, etc.
Lire la suite : Haïti-Elections : le temps des grands rassemblements
PORT-AU-PRINCE, 6 Octobre – Le Secrétaire d'Etat américain John Kerry s'est voulu aussi détaché que possible lors du point de presse qui a marqué sa courte visite à Port-au-Prince, Haïti, ce mardi 6 octobre 2015.
Kerry a présenté les prochaines élections haïtiennes comme un passage obligé vers une amélioration de la situation économique pour notre pays. En reprenant le vieux slogan haïtien (et dans un français qu'il maitrise parfaitement) : 'l'union fait la force' !
Donc invitant à une participation aussi massive que possible lors des élections tout à la fois présidentielles, législatives (2e tour) et municipales fixées officiellement au 25 octobre 2015, soit donc dans moins de trois semaines. Se faut-il alors que le temps presse.
Le premier tour des législatives avait lieu le 9 Août dernier. Il a été marqué par quantité d'irrégularités et de violences. Celles-ci de toute évidence programmées.
John Kerry a adressé le problème, condamnant la fraude et le désordre. Et mettant en garde ceux qui compteraient l'emporter de cette façon.
Mais il n'est pas allé jusqu'à demander au conseil électoral provisoire (CEP) de sanctionner les candidats et partis responsables de ces actes, comme le réclame presque toute la classe politique (sauf les proches du pouvoir en place, ce qui n'est pas à leur avantage – en effet alors que le président Michel Martelly se félicite de la tenue du scrutin du 9 août, il semble donc ne pas reconnaître l'ampleur des dégâts provoqués, alors que Kerry lui-même l'admet), mais le Secrétaire d'Etat John Kerry, un monsieur d'apparence policé - très 'bostonian', considère peut-être que ce serait inconvenant de sa part, qu'il semblerait faire la leçon aux Haïtiens – bien que certains diplomates américains ne se sont point gênés pour le faire, et même dans une période récente.
C'est aux officiels haïtiens, principalement aux membres du Conseil électoral provisoire de saisir la balle au bond (à plus forte raison que ce dernier n'a pas hésité jusqu'ici à faire étalage de son pouvoir – mais dans d'autres directions), oui au CEP de prendre immédiatement les dispositions nécessaires pour rectifier la barre, en installant des garde-fous pour empêcher le même désordre de se répéter le 25 Octobre, mais aussi en sanctionnant publiquement les coupables, seule façon de mettre en garde les coquins car tant que ces derniers sauront qu'ils n'ont rien à redouter, il y aura toujours pour eux des offres d'emplois.
Premier point de l'agenda Kerry : mettre en garde contre les irrégularités et les fraudes.
PORT-AU-PRINCE, 9 Octobre – Le nouveau canal de Panama, nouveau parce que conçu pour recevoir les cargos les plus géants, entre en fonction en 2016, assure-t-on.
Le commerce maritime dans la région va être décuplé et Haïti, de par sa position géographique, fait partie des pays concernés.
L'économie de la zone Caraïbe sera maritime ou elle ne sera pas !
Aussi tout doit se décider en conséquence. Au niveau des infrastructures, des législations nationales, des rapports commerciaux régionaux, de l'administration portuaire et des droits de douane, de la production nationale et finalement aussi du budget de la république ainsi que du trésor public et de son utilisation pour améliorer les conditions de vie du plus grand nombre.
Nous sommes très en retard à tous les niveaux. Aucune information n'a filtré du côté des pouvoirs publics. Ni du secteur privé national. Et la presse est monopolisée par l'actualité électorale.
Transbordement ...
Infrastructures : un nouveau port a vu le jour, le Port Lafito (réalisation de GB Group, des entrepreneurs locaux et Co.).
Inauguré récemment, le Port Lafito est le premier à se placer dans le sens du courant, se disant ouvert au transbordement.