PORT-AU-PRINCE, 25 Octobre – Les opérations de vote ont débuté plus tôt que d'habitude le dimanche 25 octobre, jour du premier tour des présidentielles, second tour des législatives ainsi que les municipales.
Selon Associated Press, le vote a commencé de manière ordonnée à travers le pays, quoiqu'il y avait déjà quelques signes de confusion.
Difficile que ce ne soit le cas pour le pauvre électeur forcé de choisir, en principe, entre 54 candidats à la présidence, nombre qui s'est réduit un peu avec le phénomène du désistement en faveur des candidats les plus en avance.
Le candidat placé en tête par la majorité des sondages, Jude Célestin, du parti LAPEH (Ligue haïtienne pour le progrès et l'émancipation d'Haïti), a choisi le grand centre de vote au lycée de Pétionville (banlieue résidentielle) pour jeter son bulletin dans l'urne.
Il était accompagné de collaborateurs tels la vedette internationale Wyclef Jean, le chanteur Izolan et d'autres.
Reçu par des réflexions mixtes ...
Peu après arrivait le président sortant Michel Joseph Martelly pour accomplir son devoir civique.
Martelly a attendu le départ de Jude Célestin mais il n'était pas accompagné du candidat du parti au pouvoir, le jeune homme d'affaires Jovenel Moïse (PHTK – Pati Ayisyen Tèt Kale, la formation politique créée par Martelly).
C'est pour apprendre que ce dernier (au surnom de 'Nèg bannann nan', il est le créateur d'une entreprise, Agritrans, d'exportation de bananes organiques et qu'il présente comme la preuve que la production nationale peut renaître), oui, Jovenel Moïse votait dans son patelin, Trou du Nord (Nord-Est).
Le président Martelly a été reçu par des réflexions mixtes. Des applaudissements ont retenti mais dans la foule des voix ont exprimé leur impatience de le voir partir. Le nouveau chef de l'Etat sera installé le 7 février 2016.
JACMEL, 8 Novembre – Jusqu'au dernier moment des tracts circulaient sur l'internet et les réseaux sociaux annonçant une victoire dès le premier tour pour le candidat du pouvoir, avec un pourcentage de 52 à 54% des votes ...
La semaine d'avant c'est la presse de Santo Domingo qui avalisait cette thèse. Washington ayant peur d'un second tour qui prolongerait l'agonie d'une élection haïtienne toujours impossible à tenir, serait prêt à laisser faire Michel Martelly.
Mais le jeudi 7 novembre le Conseil électoral provisoire (CEP) proclamait des résultats (préliminaires) qui renvoient le candidat du pouvoir, Mr Jovenel Moïse (32.81%), au second tour avec Mr Jude Célestin (LAPEH – Ligue haïtienne pour la paix et l'émancipation d'Haïti) : 25,27%.
Les autres candidats ont 72 heures ouvrables pour formuler leurs contestations. Plusieurs s'y engagent.
Donc 1 à zéro sur Michel Martelly !
En effet, on dit que le président redoute le second tour qui risque de placer son candidat face à une coalition globale de l'opposition.
Le 3e larron ...
Cependant l'opposition a-t-elle reçu le message ?
On ne sait pas.
Mais ce qu'il importe de retenir pour l'instant c'est l'attitude du 3e larron, Washington.
PORT-AU-PRINCE, 18 Novembre – Le Conseil électoral provisoire a trois politiques différentes : une pour lui-même, une à l'égard de nos tuteurs internationaux et une pour les forces nationales, en l'occurrence les candidats à la présidence, à l'exception de celui du pouvoir.
Après une rencontre lundi (16 novembre) avec le groupe des 8 candidats (G8) qui sollicitent la formation d'une commission d'enquête indépendante sur les irrégularités reprochées au scrutin présidentiel du 25 octobre écoulé (et rencontre à l'invitation du CEP), ces derniers reçoivent dans la nuit, en guise de réponse à leur demande, un communiqué de l'organisme électoral, selon lequel le décret électoral en vigueur ne donne pas 'provisions' au Conseil pour former une telle commission.
Rappelons qu'il s'agit d'une entité qui serait formée de personnalités indépendantes et capables d'une évaluation impartiale du 1er tour du scrutin présidentiel, et surtout d'une vérification du comptage des votes et de la transparence dans leur enregistrement et le calcul des résultats.
Voyons si l'argument du Conseil électoral peut tenir, savoir que le décret électoral en vigueur ne l'habilite pas à former une telle commission ?
Alors que lui-même vient de se doter d'une commission pour la même tâche.
En effet, devant les critiques émanant des candidats et des organismes haïtiens d'observation électorale, le Conseil électoral a formé en son propre sein une commission de réévaluation. C'est-à-dire composée de membres choisis dans ses rangs, parmi les conseillers électoraux eux-mêmes.
Ce qui vaut donc pour le Conseil, ne vaut pas pour les candidats. Alors que dans le processus des élections, c'est de ceux-ci qu'il s'agit au premier chef. Les candidats et les élections. Le CEP n'est qu'une simple bureaucratie.
Le CEP pratique donc une politique de deux poids et deux mesures selon qu'il s'agisse de lui-même, ou des candidats.
Mais revenons un peu plus en arrière.
On est en 2010, les présidentielles qui conduiront Michel Martelly au pouvoir.
Les élections ont lieu le 28 novembre 2010.
PORT-AU-PRINCE, 21 Novembre – Vendredi (20 novembre) la manifestation de Fanmi Lavalas allié aux autres candidats de l'opposition anti-Martelly, a été attaquée à Delmas 95, quartier périphérique de la capitale, par des individus dissimulés dans les cours arrières de bâtiments longeant l'autoroute, qui font tomber une pluie de pierres et autres projectiles sur les manifestants dont plusieurs ont été blessés.
Et lorsque ces derniers ont essayé de poursuivre leurs assaillants invisibles, ils furent reçus à coups de machette. On aurait même entendu des coups de feu.
Toute la presse rapporte une même observation : la police faisant la sécurité autour de la manifestation, n'a rien fait pour arrêter les trublions.
Même qu'elle en aurait profité pour hâter la fin de la manifestation qui avait dès lors perdu son momentum.
Conséquences : plusieurs blessés à l'arme blanche chez les manifestants, peut-être un mort, pare-brises cassées et un carambolage monstre qui bloqua pendant plusieurs heures cette voie si fréquentée.
Le chien revient toujours à sa charogne ! ...
Deux jours plus tôt, le mercredi 18 novembre, la police avait ouvert une pluie de balles en caoutchouc et de gaz lacrymogènes sur plusieurs milliers de manifestants parvenant devant le siège du Conseil électoral provisoire (CEP) à Pétionville, banlieue de la capitale, blessant entre autres deux candidats à la présidence, Steven Benoit et Moïse Jean Charles.
On pense à la phrase du professeur Leslie Manigat citant l'Evangile : le chien revient toujours à sa charogne !
On se souvient en effet que Michel Martelly est arrivé au palais national en mai 2011 en utilisant les mêmes procédés.
Prendre possession des rues de la capitale par l'utilisation de gangs menaçant de tout briser sur leur passage, dont des medias (spécialement Radio Tele Ginen, aujourd'hui proche du pouvoir en place), mettant le feu au bureau politique du parti au pouvoir, lors INITE, avec pour candidat Jude Célestin, bref fermant la capitale et toute la zone métropolitaine sous la menace.
Et déjà à l'époque sous le regard complice de la police nationale.
PORT-AU-PRINCE, 29 Novembre – La seule réflexion qui vous vient à l'esprit est celle de Hamlet : 'il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark.'
Le peuple nous l'a indiqué depuis 5 années, lorsque retentit le refrain : 'ban m ti vakabon m souple'.
L'élection de Michel Martelly a été reçue dans la population comme celle d'un 'vagabond', en un mot d'une personne qui n'aurait pas dû être à cette place.
D'ailleurs le président élu a semblé même acquiescé à cette description.
D'ailleurs, qu'importe les prédispositions de ce dernier, le mot pourri signifie aussi et surtout ici la fin d'une époque ou d'un cycle, d'un phénomène qui avait été baptisé on ne sait trop par qui de 'processus de transition démocratique'. Cela de la fin de la tyrannie duvaliériste, le 7 février 1986, à date.
Donc résultat des courses : nous avions échoué. La transition est arrivée à sa fin, il y a 5 ans déjà. Et c'est échec et mat !
Pourri !
Dans la Bible, une branche pourrie doit être coupée. Mais de plus, jetée au feu. Disparition totale. Rejetée dans le néant. 'Ban m tè a blanch', vous vous en souvenez. Pour ne plus contaminer ce qui reste.
Voilà donc le message que le peuple nous a adressé lors de l'élection de Michel Martelly, le 4 avril 2011.
Mais nous avons fait semblant de ne rien entendre.
Pas étonnant donc qu'aujourd'hui cela empeste.