JACMEL, 7 Septembre – On les observe de l’hôtel juste en face de la place d’armes de la ville de Jacmel. Des pauvres femmes d’un âge certain, mais vieillies plutôt sous le poids de la misère et des privations.
Dès qu’un véhicule ralentit, elles se précipitent pour demander l’aumône.
Elles ne sont ni bien habillées ni tout à fait en haillons. Et plus hardies dans leurs mouvements que nos mendiants ordinaires.
Renseignements pris : elles ne sont pas de la région.
Ce sont des Haïtiens qui avaient traversé illégalement la frontière avec la République dominicaine voisine à la recherche d’une vie meilleure.
Ce sont eux (et elles) que la police frontalière dominicaine ramène quotidiennement à leur point de départ.
Avec le consentement des autorités haïtiennes, afin probablement d’éviter une trop grande exposition du spectacle, ces rapatriés-là sont débarqués à Anse-à-Pitre, en face de la ville dominicaine des Pedernales, à la pointe sud de l’île.
De là, ils aboutissent, probablement par la mer, au chef-lieu de la région (Sud-Est), Jacmel.
Les Jacméliens ne savent pas trop quoi faire, n’ayant reçu aucune assistance à ce sujet, ni du pouvoir central, ni de l’international.
Les commerçants, restaurants et hôteliers (cette ville a toujours vécu traditionnellement du tourisme) souffrent en silence de ce spectacle qui n’est pas bon pour leur négoce.
Le flux migratoire massif du Venezuela exige une solidarité internationale ...
Tandis que en même temps nous voyons tout le continent qui bouge face au drame des migrants vénézuéliens fuyant par dizaines de milliers leur pays en proie à la plus grande catastrophe économique de son histoire.
Le Venezuela du président Nicolas Maduro, successeur du chef de la révolution bolivarienne, Hugo Chavez, emporté, en mars 2013, par un cancer, se bat contre un embargo international à cause de ses options politiques socialistes et qui est venu compliquer sa situation économique (le baril de pétrole, dont le Venezuela est le principal producteur du continent, a dégringolé ces dernières années sur le marché international).
Près de deux millions de Vénézuéliens ont fui leur pays depuis les deux années écoulées.
Une nouvelle accélération de cette migration a mis tous les pays frontaliers sur la défensive (Colombie, Brésil, Pérou, Argentine, Bolivie, Chili, Argentine etc).
MEYER, 24 Février – Le pouvoir aujourd’hui en Haïti appartiendrait à deux catégories : le politicien qui arrive, en jouant sérieusement des coudes, à s’introduire dans la place et … un nouvel acteur.
Ce dernier se caractérise par une fausse posture d’indépendant c’est-à-dire se présentant comme en dehors de ceux qui exercent le pouvoir, mais ces derniers qui ont en mains non seulement toute la manne mais qui la gardent aussi pour eux seuls.
En l’absence d’une opposition structurée et capable de défier ces derniers, quelques-uns ont trouvé une alternative.
Un subterfuge capable de faire trembler le détenteur du pouvoir, et partant aussi de la caisse publique, mais pas pour le faire tomber de son piédestal que pour le faire ‘casquer’, montrer patte blanche, ouvrir son trésor.
En somme c’est une action totalement individualiste. Mais quoi de plus individualiste aussi que nos chefs aujourd’hui.
Et cette nouvelle classe d’’emmerdeurs professionnels’, pour l’appeler par son nom, occupe autant le haut du pavé, au gré d’un nouveau type de manifestations dans les rues de la capitale où un chat ne reconnaitrait pas ses petits, qu’ils essaient de dominer aussi les grands titres de l’actualité puisque de nouveaux moyens médiatiques permettent de manipuler l’information comme on veut (ce qu’on appelle les ‘fake news / fake stories’), d’autant plus que les pouvoirs en place font aussi pareil, tout cela dans une moquerie totale de la liberté d’expression.
D’ailleurs c’est au nom même de cette dernière que ces nouveaux ‘chevaliers sans peur et sans reproche’, mais aussi ‘fake’ que les rumeurs qu’ils répandent avec tant d’habileté, se lancent aujourd’hui à l’assaut de la citadelle du pouvoir.
Or le pouvoir tremble et il leur cède à tous les coups.
Tandis que l’opposition véritable, et l’information sérieuse ne lui font ni chaud ni froid.
C’est la nouvelle métamorphose que traverse la politique haïtienne aujourd’hui, qui n’en est pas à une mauvaise surprise près.
PORT-AU-PRINCE, 23 Juin – Le fils de Baby Doc reçu à Washington, cela ne vaut pas plus qu’un ‘cuip’ !
Et pourtant !
Et si l’horizon politique s’était totalement retourné ces derniers temps au point que ... que comme on le voit en Italie où une Mussolini fait les grands titres de la presse politique ou dans la République dominicaine voisine - un petit Trujillo, Washington aurait senti le besoin de remonter jusqu’à la dictature Duvalier dans sa quête d’une solution plus stable pour notre pays.
Soudain, en effet, voici Nicolas Duvalier en interview sur la radio gouvernementale américaine, La Voix de l’Amérique, et au centre d’une collection de photos qui le montrent reçu ostensiblement par des hauts gradés de l’institution militaire des Etats-Unis.
On aurait crû à un faux s’il n’y avait l’interview sur Voice of America.
Que se passe-t-il ?
Fiston Duvalier avait 3 ans lorsqu’il a gagné l’exil, le 7 février 1986, avec son père, feu Jean-Claude Duvalier surnommé Baby Doc, mort à 64 ans, le 4 octobre 2014.
Après 29 ans d’un régime dictatorial (père et fils) qui a fait plusieurs dizaines de milliers de morts et de disparus.
Et sous lequel pour quelque 100.000 emplois créés dans la sous-traitance (achèvement de produits de fabrication industrielle reçus de l’extérieur avant leur expédition sur le grand marché international, en premier lieu les Etats-Unis) et une certaine reprise du tourisme mais sans la création des infrastructures nécessaires pour en assurer l’avenir, le pays, hélas, connaitra en même temps aussi les premières migrations massives par la mer (‘boat people’), le gaspillage le plus massif de l’aide internationale (dont une partie atterrira sur les comptes en Suisse du dictateur et de sa famille) ainsi que l’épidémie du Sida qui achèvera de détruire l’image d’Haïti dans le monde.
Cependant après la chute de la dictature (7 février 1986), une fois éteints les lampions de la fête, nos politiciens ont recommencé à s’entredéchirer.
Et le pays de continuer à péricliter, pour se retrouver aujourd’hui dans un état, il faut bien l’admettre, pire que sous la dictature, du moins sa deuxième version Baby Doc (1971-1986).
Mainmise totale sur la machine économique ...
La dictature tirait sa force non seulement d’une machine de répression impitoyable, mais aussi dans une étatisation (ou plutôt ‘duvaliérisation’) de l’économie, prenant sous son contrôle exclusif tous les instruments régissant la production, le commerce ainsi que le crédit bancaire.
C’est le règne des entreprises d’Etat dont les plus importantes ont été la Cimenterie (vendue au pouvoir par son premier propriétaire, la famille Lambert de France-Martinique), la Minoterie (farine de blé), tout comme l’Electricité d’Haïti, la Teleco (téléphonie), mais aussi la Régie du Tabac qui était la vache à lait par excellence destinée à financer les réalisations du pouvoir c’est-à-dire de la famille présidentielle, donc immense source de prébendes et de corruption, autre force de la dictature ‘macoute’.
PORT-AU-PRINCE, 13 Juillet – Il est 5h 15 pm samedi. Le petit pavillon dressé dans la cour du Mupanah (musée du panthéon national), au Champs de Mars, ne désemplit pas.
Un nombre presque plus grand sinon égal de journalistes accompagnant la présidente de la Chine (Taiwan), Tsai Ing-wen que d’officiels haïtiens.
La cérémonie démarre avec un protocole étudié.
Dans son discours, la présidente de Taiwan fait état des activités conduites par son pays en Haïti.
Elle se réjouit que 2 grandes entreprises taiwanaises investissent déjà dans les industries de sous-traitance ici et aussi de la promotion des échanges de part et d’autre, puis pour se pencher plus longuement sur le projet d’énergie électrique.
C’est un projet ‘tripartite’, dit Mme Tsai Ing-wen : financement par une banque de Taiwan ; réalisation par des techniciens taiwanais et la main d’œuvre confiée à des ouvriers haïtiens.
On apprend alors qu’il ne manque pour le démarrage des travaux que le vote de validation de l’Assemblée nationale d’Haïti.
Prenant à son tour la parole, le président Jovenel Moïse souligne que les relations diplomatiques entre la République de Chine (Taiwan) et Haïti datent de 63 ans.
Les deux points forts de cette coopération sont l’agriculture et l’énergie, selon le chef de l’Etat haïtien.
Taiwan, selon Jovenel Moïse, est pour nous un modèle parfait parce que ayant subi des problèmes similaires (instabilité politique, émigration massive, pauvreté). Puis pour en sortir grâce à la stabilité retrouvée et au travail acharné.
Le président Moïse s’est visiblement réjoui d’être celui qui a fait totalement sien le ‘projet de construction du réseau électrique du bassin de Port-au-Prince.’
Et dont il pense que sa réussite soulèvera un effet d’entrainement dans d’autres secteurs.
Il en appelle au Parlement haïtien pour valider le projet.
Pour finir le président souligne que la coopération taiwanaise est une politique donnant-donnant car de son côté Haïti constitue pour les entreprises de Taiwan la porte d’entrée sur ‘un carrefour stratégique par où transite 40 pour cent de la production internationale.’
Tiens, pourquoi ne pas rouvrir les Magasins de l’Etat ?
MIAMI, 20 Juillet – Face à la hausse vertigineuse des prix à la consommation en Haïti, plus d’un se demande : que fait le gouvernement ?
Les plus âgés remarquent : mais où sont passés les Magasins de l’Etat ?
Ces derniers se souviennent que sous la dictature Duvalier (1957-1986), dès que les prix augmentaient de façon trop brutale, tout de suite le gouvernement passait lui-même commande des produits dits de consommation courante, en particulier le riz et les huiles comestibles, et obtenait ainsi un retour à la normale.
C’est ce que l’on entend par les Magasins de l’Etat, institution publique qui avait en charge cette fonction. Aussi le poste de directeur général des Magasins de l’Etat était très envié.
Car évidemment cela comprenait aussi un certain degré pour ne pas dire un degré certain de corruption.
Première conclusion : la dictature avait peur davantage de la mauvaise humeur populaire que le règne démocratique sous lequel nous sommes supposés vivre aujourd’hui ?
Oui, par certains côtés. Parce que la dictature est censée en partant être une usurpation, voire quand c’est une dictature à vie !
Donc elle est davantage sur ses gardes.
Mais aussi il y a démocratie et démocratie. Et toutes ne sont pas censées être comme celle que nous connaissons aujourd’hui en Haïti, qui rappellerait plutôt une sorte de dictature à visage démocratique.
Ce qui n’avantage que les nouveaux dirigeants puisqu’ils n’ont même pas besoin d’avoir les soucis du dictateur …
En effet, l’escalade en ce moment des prix à la consommation ne semble pas empêcher les détenteurs du pouvoir de dormir sur leurs deux oreilles.
Jean-Claude (Baby Doc) Duvalier en aurait fait une maladie.
Mais comment tout cela est-il arrivé ?
François Duvalier avait compris (sacré bonhomme !) qu’un pouvoir qui n’a pas le contrôle de l’économie, toute l’économie, n’est pas un pouvoir.
Aussi s’empressa-t-il de mettre toute l’infrastructure commerciale sous son contrôle.
C’est la création du Ciment d’Haïti (contrôle de l’industrie de la construction), de la Minoterie (la farine que nous ne produisions pas en Haïti jusque-là et qui nous revenait à très cher), plus tard de l’Electricité d’Haïti, puis de la Teleco (téléphone) etc …
Mais en même temps tout cela doit servir pas seulement à contrôler les prix à la consommation en les empêchant d’être totalement assujettis aux variations du marché international mais cela doit servir aussi à consolider le régime …