Le linge sale ne se lave plus en famille …
PORT-AU-PRINCE, 28 Août – En Haïti le linge sale ne se lave plus en famille.
On en veut différentes preuves au même moment.
C’est d’abord le sénateur Joseph Lambert ne cachant pas les raisons de son ‘divorce’ d’avec le président de la république Jovenel Moïse.
Ce dernier après lui avoir promis le poste de premier ministre lui aurait faussé compagnie à deux reprises : d’abord après les émeutes de juillet 2018 en lui préférant le notaire Jean Henry Céant, puis récemment en nommant Fritz William Michel qui attend encore la ratification du Parlement.
Mais trop c’est trop, dit Jo Lambert, tournant publiquement, et officiellement, le dos au chef de l’Etat. Avec les conséquences qui s’ensuivent.
Mais il y a eu un précédent, c’est l’ouvrage publié sur l’administration Céant pendant ses six mois à la Primature par deux de ses collaborateurs, au titre tout de suite évocateur : ‘Toutouni’ (en français : tout nu !).
Les feuilles de vigne désormais envoyées par-dessus les moulins, voici, selon les deux jeunes auteurs Pascal Adrien et Jorchemy Jean-Baptiste, respectivement ex-porte-parole et ex-directeur de cabinet, voici tous les dessous de table mis sur le tapis. Y compris à l’endroit des chefs de gang. L’ex-premier ministre Céant a dû se justifier d’un entretien au téléphone avec le plus fameux de ces derniers, Arnel Joseph.
Mais le pouvoir actuel ne finit pas d’inspirer cette interminable chronique des chiens écrasés. Même des hebdomadaires jusqu’ici sérieux qui s’y mettent. Lisez cette semaine dans Haïti en Marche (plutôt le numéro précédent, celui du 28 Août dernier) : ‘Les vraies raisons de la défection de Joseph Lambert et les (autres) départs annoncés’, (oyez plutôt) : ‘De Rudy Hérivaux, en passant par Guichard Doré et Liné Balthazar, tous estiment que le président Jovenel Moïse a un comportement raciste et ingrat. (…) Un nègre ‘à cheveux poivre’ qui se prend pour un grand bourgeois syrien. Jovenel Moïse n’écoute pas les conseils de ces messieurs mais quand il est en difficulté c’est eux qu’il envoie le défendre dans la presse. Tous ces conseillers n’ont pas le courage de Joseph Lambert pour passer dans l’opposition … Ils souffrent en silence.’
Ajoutant plus loin (après d’autres considérations encore plus personnelles mais dont nous vous faisons grâce) : ‘Jovenel Moïse ne tient pas sa parole et ses promesses quand il s’agit des alliés noirs de la classe moyenne et « tèt grenn ». Il les roule dans la farine sans aucune exception, comme de vulgaires imbéciles …’.
Mais au chapitre de dévoiler tous les ‘k k chat’ (selon l’expression créole), rien ne vaut le discours du directeur général sortant de la Police nationale d’Haïti : Michel-Ange Gédéon. Celui-ci se passe de commentaires :
‘J’adresse des remerciements spéciaux aux collaborateurs fidèles que je pouvais compter sur les doigts de la main. Je remercie les moins fidèles et les envieux qui m’ont appris une nouvelle dimension de l’ingratitude humaine. Je remercie également les traitres et les détracteurs qui m’ont permis de gagner en expérience et en maturité. Ils m’ont permis de développer un leadership situationnel, ce qui m’a aidé à faire face à des circonstances particulières. Ils sont utiles eux aussi à leurs manières.
Aujourd’hui, j’aimerais dire à mes détracteurs que jamais je n’ai appartenu à une chapelle politique. Je n’ai été et je ne suis aujourd’hui encore ni à droite, ni à gauche. Ma priorité a toujours été le devenir d’une institution endossant la lourde responsabilité d’assurer la sécurité des vies et des biens de toute une population.’
Il y en a qui vont faire la fête, il y en a pour qui l’instant présent est un moment de grande jubilation parce que je vais partir. Mais à ceux-là, je voudrais dire que cela ne prendra pas longtemps pour qu’on dise : « si Gédéon te la ». Dieu seul sait combien j’ai résisté pour qu’on ne fasse pas n’importe quoi à l’institution. Dieu seul sait à quel point j’ai souffert dans ma chair et dans mon esprit pour conserver un bon profil à la PNH.’
Et ce n’est pas tout. Nous vous laissons le plaisir de vous en régaler vous-mêmes.
Mais comme on dit, qui aime bien châtie bien, figurez-vous que la presse aussi n’est pas en reste dans ce chapitre.
C’est ainsi qu’on lit dans une dépêche de l’agence locale HPN: ‘Des patrons de medias ont aussi leurs gangs.’ Waw!
La déclaration est revendiquée, ce n’est pas du ‘kase fèy kouvri sa’, elle est du patron de RSF (Radio Sans Fin), notre consoeur dont un collaborateur (Rospide Pétion) a été récemment assassiné, et pratiquement en plein exercice de sa profession (il regagnait sa maison après avoir présenté son émission coutumière et cette fois avec pour sujet : la corruption).
Selon le directeur de RSF, Yvener Joseph, la presse promeut des bandits à volonté, ‘dénonçant certains et protégeant d’autres.’
Et il opine que ce sont de grandes boites de l’Etat qui, à travers leurs annonces publicitaires, serviraient à financer cette ‘Press connection’.
Voilà. Comme dit le créole : ‘Komisyon pa chay.’ Autrement dit, tous ceux qui sont cités dans cette chronique ont droit à la rectification !
Mais cela n’empêche que nous souhaiterons toujours la bienvenue à des détails aussi croustillants.
Au moins cette malheureuse et interminable crise n’aura pas laissé que de tristes souvenirs !
Mélodie 103.3 FM, Port-au-Prince