Que faire des 50 millions ?
MIAMI, 28 Mars – Le gouvernement annonce ‘une enveloppe de 50 millions de dollars américains pour combattre la propagation du Coronavirus dans le pays.’
On sait comment cela se passe.
Appel est fait aussitôt aux spécialistes des secteurs public et privé dans la préparation de fausses factures et de commissions rondelettes pour des personnalités n’ayant rien à voir avec les besoins en question et c’est après avoir fait le tour de tous ces ‘pakapala’ que l’on se rappelle la cause qui a fait l’objet du déblocage de ces fonds.
Dès lors brusquement l’eau chlorée et les sceaux à robinet sont facturés à prix d’or et les quelques ‘masques’ remis aux bons soins de l’Hôpital Général ont depuis longtemps abouti sur les rayons des pharmacies qui s’alignent à la rue Mgr Guilloux juste en face.
En Haïti la corruption est endémique, cela veut dire qu’elle baigne tout le système, l’échelle sociale entière, du haut en bas.
Les millions disparaissent à peine ont-ils été annoncés du bout des lèvres, tandis que les quelques bribes restantes sont abandonnées aux sous-fifres qui se battent comme des chiens.
Tenez les fonds d’aide et de reconstruction après le séisme du 12 janvier 2010 : plus de 10 milliards de dollars US, qu’en est-il resté ?
De grosses légumes locales en accord avec des firmes étrangères dans un jeu d’annonces mirobolantes (‘build back better’ ; ‘make Haiti great again’) mais dont il ne restera … totalement rien.
Pour le peuple, des distributions de produits alimentaires jetés du haut de camions surchargés en pleine rue, mais où le vrai peuple ne voit que du feu parce que les mêmes sacs de riz ou autre se retrouvent le même jour sur les marchés publics.
Il y a les trafiquants de millions en haut, qui les font disparaître comme par magie, un petit tour et puis s’en vont (tout droit vers les paradis fiscaux), et en bas les champions de la débrouille, du ‘degaje pa peche’.
En un mot le peuple est habitué et il n’attend rien des 50 millions de $ américains annoncés dans une circulaire portant la signature du Premier ministre Joseph Jouthe.
A moins que l’on décide de s’y prendre cette fois autrement. Oui à supposer que les champions de la dissection des millions, n’aient pas déjà pris la question en main.
Un conseil de personnalités crédibles et issues de différents secteurs …
Dans ce cas, Joseph Jouthe a une chance de ne pas être celui qui aura détruit non pas le Coronavirus, mais au contraire les petits efforts pour barrer la route à la terrible épidémie dans notre pays.
A moins qu’il arrive, comme on dit, à battre le système, celui qui se résume en deux points : en haut des millions transférés avant même d’être annoncés, en bas des gourdes qui ne valent même pas le papier sur lequel elles sont imprimées.
MIAMI, 4 Avril – A-t-on jamais vécu d’aussi près la mort, y compris la sienne ?
Tout le monde est en train de suivre l’odyssée de ce présentateur du journal du soir de la chaine CNN, Chris Cuomo.
Un jour la semaine écoulée, c’est son frère ainé, le Gouverneur de l’Etat de New York, le plus affecté aujourd’hui par l’épidémie du Coronavirus, Andrew Cuomo, qui au cours de sa conférence de presse quotidienne mentionne que son frère, le journaliste Chris Cuomo, a été atteint.
Mais le même soir, qui présente le journal de 9 h pm sur la chaine CNN ? Chris Cuomo en personne.
Il n’est pas en studio, ni à l’hôpital mais installé dans le sous-sol chez lui pour éviter de contaminer sa famille.
Confiné et séparé des siens. A l’heure où l’on a le plus besoin de leur support moral et tout.
Et ainsi de suite, en dehors des nouvelles du jour, nous suivons aussi en direct chaque soir l’évolution de la maladie chez le malade et par le malade lui-même.
Directement du malade au … téléspectateur.
Chris Cuomo nous raconte qu’il n’avait jamais autant souffert de sa vie.
C’est surtout la fièvre et la nuit, une fièvre qui ne saurait être plus brulante et brutale …
Et des douleurs par tout le corps.
Bref, qu’il souffre le martyre.
Egalement en direct, son médecin (qui est aussi un présentateur de la chaine CNN) écoute soigneusement et conseille le malade …
Tout cela sous l’œil presque désemparé du téléspectateur.
Qui en profite pour lui-même, car qui sait ? le président du Task Force présidentiel sur le Coronavirus, Dr Antony Fauci, vient de déclarer lors du point de presse quotidien du président Donald Trump que l’épidémie atteindra son pic dans les deux prochaines semaines et qu’un bilan de 100 mille à 250 mille morts pour les seuls Etats Unis, ce n’est pas impossible.
Chaque jour, chaque heure, chaque minute les chaines américaines informent : 1 million 192.000 cas dans le monde, plus de 64 mille morts ; aux Etats-Unis : près de 306 mille contaminés à la date du 4 avril 2020, et 8.291 morts – la moitié dans l’Etat de New York.
Comme dit le créole : ‘sa rele wa p mache ak sèkèy ou anba bra ou.’
Jamais on n’avait senti la mort rôder autour de soi d’aussi près.
Lire la suite : Serait-ce le plus grand bouleversement dans l’Histoire de l’Humanité ?
Haïti : Jouthe veut rouvrir les factories mais dans quelles conditions ?
MIAMI, 18 Avril – Le Premier ministre Joseph Jouthe annonce qu’il a donné l’autorisation de fonctionnement aux ‘factories’ à partir du lundi 20 avril. On appelle en Haïti factories les usines d’assemblage d’articles habituellement de consommation courante, vestimentaire principalement, et destinés uniquement à l’exportation, principalement vers les Etats-Unis avec lesquels Haïti possède des accords spéciaux destinés officiellement à encourager la création d’emplois dans notre pays.
Ces emplois sont réunis dans des parcs industriels, dont le premier et le plus important est celui de la capitale, communément appelé Parc Industriel de Port-au-Prince.
Puis vient aussi le parc industriel CODEVI (zone franche à la frontière avec la République dominicaine mais employant une main d’œuvre principalement haïtienne) ainsi que celui de Caracol (Nord-est du pays).
‘Le Premier ministre Joseph Jouthe a annoncé qu’à partir du lundi 20 avril, le gouvernement va autoriser (ce qu’il appelle) les industries textiles à recommencer à fonctionner. Ces industries comptent beaucoup pour le gouvernement, a-t-il dit, avec les 56.000 emplois qu’elles fournissent. Nous devons les autoriser à travailler même à 60 pour cent de leur personnel en vue de respecter la distanciation’ (distance d’au moins 1m 50 à maintenir entre deux personnes pour empêcher la contamination éventuellement par l’épidémie du Coronavirus, qui a déjà affecté plus d’un million et demi de personnes dans le monde, et conduit plus de 162.000 dans la tombe.)
Argument invoqué par le Premier ministre haïtien : ‘alors qu’on pouvait craindre jusqu’à déjà 5.000 victimes, notre pays exceptionnellement ne connaît jusqu’à présent que quelque 40 contaminés (44 à la date du 18 avril) et 3 morts.’
C’est en effet un argument valable à l’heure où le gouvernement américain (bilan aux Etats-Unis à date plus de 39.000 morts) envisage malgré tout de reprendre les activités, principalement économiques, et pour commencer d’abord dans les Etats qui sont les moins affectés par la terrible épidémie.
Mr. Jouthe n’est donc pas le seul à penser ainsi.
Cependant à quelles conditions ? Quelles précautions compte-t-il prendre ?
Lors de son point de presse du mercredi 15 avril, ‘il a demandé de poursuivre les inspections dans les parcs industriels en vue de vérifier si les normes sont respectées.’
MIAMI, 9 Mai – Le coronavirus à nouveau nous trompe. Voici qu’un bébé de moins d’une année est décédé à Chicago (Illinois) de l’épidémie ainsi que trois enfants à New York d’une maladie dite mystérieuse. On parle aussi de cas semblables dans une école maternelle à Montréal, le Québec est devenu ces derniers jours un des points chauds de la pandémie.
Alors qu’on se persuadait jusqu’ici que le Covid-19 emportait surtout les plus âgés.
Au point qu’un observateur quelque peu philosophe a pu relever que si c’était le contraire, si c’était les plus jeunes les plus frappés, eh bien ce serait en perspective la disparition de l’espèce humaine.
En effet.
Toujours est-il qu’on peut être frappé par plutôt une absence jusqu’ici de véritable réflexion autour du nouveau mal.
Où sont les dignes successeurs de Descartes … ou de Foucault ?
Notre humanité si bavarde, et à l’heure de tous les Facebook, Google et consorts, en reste néanmoins bouche bée.
La seule représentation du Coronavirus, après bientôt six mois depuis l’apparition de l’épidémie à Wuhan, ville industrielle chinoise, 11 millions d’habitants, c’est le masque.
Justement comme si l’humanité se masque, soudain se voile la face pour ne pas reconnaitre la vérité. Sa vérité. Que c’est le temps de se rappeler avec Einstein : tout ce que je sais c’est que je ne sais rien !
Les acteurs politiques dépassés c’est normal c’est leur nature.
Par contre les plus grands chercheurs, nos sommités en sciences et en philosophie qui en sont réduites à se bousculer pour avoir un petit bout de temps d’antenne (ex. émission Don Lennon sur CNN, 10 heures pm) et finissent par mettre inexorablement les pieds dans les plats, comme dit la petite dame du coin : c’est du jamais vu !
En effet, la première leçon du Coronavirus c’est que tout est à réinventer.
A commencer par comment représenter une épidémie qui n’a ni couleur, ni odeur. Aucun support physique.
Comment combattre ce qu’on n’arrive pas à distinguer. Sous aucune forme. Ni physique, ni mentale. Ni autre. Rien.
Même Chernobyl, la centrale atomique qui avait pris feu en Russie, pardon Union Soviétique, dont on a pu mesurer les particules du nuage atomique, alors que c’est la seule image qui vous viendrait à l’esprit en ce moment, exact.
Lire la suite : HAITI-Coronavirus ou histoire d’une épidémie
MIAMI, 16 Mai – Jamais un gouvernement haïtien n’avait détenu autant de pouvoir depuis Jean Claude ‘Baby Doc’ Duvalier renversé le 7 février 1986.
Jovenel Moïse a aujourd’hui tous les pouvoirs que confère la dictature. Pas de contre-pouvoir législatif, celui-ci étant arrivé à terme depuis janvier dernier. L’élection d’une nouvelle législature n’est pas dans les plans actuels. Ni officiellement ni autre. Et un judiciaire qui n’a jamais exercé de réelle indépendance de toute l’histoire nationale.
L’actuel locataire du palais national fait et défait en principe sans aucun contrôle sinon au gré des intérêts de son propre clan. Qu’il s’agisse de la caisse publique ou de la répartition des postes dans la fonction publique.
C’est la valse des premiers ministres. Obligatoirement ‘de facto’ puisqu’aucun effort n’est fait pour rétablir la légitimité constitutionnelle.
Pour être légitime, un premier ministre doit recevoir la bénédiction des deux chambres du parlement.
A la place aujourd’hui, qui décide de cette sanction ? Eh bien, les propres partis, pardon ‘particulets’ membres de la coalition au pouvoir.
Même Papa Doc qui se souciait un peu plus du décorum, même au plus fort de son système de ‘chambre unique’ avec les votes fixés à l’avance : ‘pour assis, contre debout !’ Et nul ne bouge ! Avec un ‘tonton macoute’ derrière chaque fauteuil.
Le Président et le PM ne dirigent rien, aurait dit ce dernier. Ni dans le réel, ni sur le papier …
Mais comme une machine enrayée, voici la ronde qui se poursuit, recommence avec le renvoi, après trois mois à peine en fonction de l’actuel premier ministre Joseph Jouthe, comme pour ses deux prédécesseurs Jean Henry Céant puis Jean Michel Lapin, déjà réclamé par deux membres de la confrérie, les ‘so-called’ ou soi-disant partis politiques : Bouclier et Parasol …