Derrière l’assassinat samedi de l’ex-sénateur Yvon Buissereth
PORT-AU-PRINCE, 9 Août – Tout le monde est encore sous le choc. Qui a assassiné l’ex-sénateur Yvon Buissereth ? Devenu principal responsable d’un organisme étatique de crédit immobilier (EPPLS – Entreprise publique de promotion des logements sociaux).
Le samedi 6 août écoulé, l’ex-élu du département du Sud au Sénat de la République a été assassiné, lui et son chauffeur (Ronald Joseph Monplaisir, un parent par alliance), à Laboule 12, dans les hauteurs dominant la capitale, et les corps brûlés dans le véhicule.
L’ex-sénateur avait emprunté le parcours par la montagne pour éviter les gangs armés qui tiennent depuis plusieurs mois sous leur feu la sortie sud de la capitale, à Martissant.
Il se rendait aux Cayes, sa ville natale, et chef-lieu du département du Sud.
La presse en ligne désigne immédiatement le responsable du double meurtre. C’est le chef de gang Ti Makak.
C’est si l’on peut dire dans sa juridiction que les meurtres ont été commis.
On veut même comme explication que la victime, Yvon Buissereth, est un proche du seigneur et maitre des lieux ; ici tout un pan de la montagne classée comme appartenant à un grand promoteur privé, et avec comme fleuron la communauté appelée Tara’s, une petite ville modèle mais pour grandes fortunes.
Ce nabab c’est ‘Toto’. Son vrai nom Jean Mosanto Petit, alias ‘Toto Borlette’, ayant commencé sa carrière dans cette loterie depuis longtemps très populaire en Haïti.
Cependant Tara’s cette propriété absolument royale, digne d’un prince des temps féodaux, mais aussi qui permet la protection d’une grande partie des hauteurs dominant la capitale contre l’exploitation sauvage des carrières de sable et surtout contre le déboisement sans limites qui a déjà transformé notre pays, vu d’avion, en un rocher brûlant perdu dans la mer caraïbe - n’est pas sans soulever des questions et même des problèmes.
Ti Makak dément être l’assassin de l’ex-sénateur et directeur de l’EPPLS …
Ainsi l’empire de ‘Toto’ fait face à un quasi-soulèvement dans la région mené, dit-on, par des fils de familles paysannes qui considèrent que leurs parents ont été lésés par le nouveau maître des lieux.
Et on rattache le gang de Ti Makak à ce mouvement cependant aux contours jusqu’à présent indécis, imprécis.
Lire la suite : HAITI : ORGANISATIONS CRIMINELLES HIER ET AUJOURD’HUI
Pourquoi et Quand Jovenel Moïse est-il Devenu un Autre ?
MIAMI, 6 Juillet – Il y a deux périodes dans le mandat présidentiel de Jovenel Moïse dont la seconde commencerait avec son voyage en Turquie, en juin 2021, hélas moins d’un mois avant son assassinat.
Commençons par le commencement. 7 Février 2017. Prestation de serment au parlement haïtien. Jovenel qui ? Ce jour-là c’est le triomphe d’un seul homme. Il s’appelle Joseph Michel Martelly, l’ex-président (2011-2016), qui les élections présidentielles ayant été rejouées, a laissé la place cependant sans rechigner à un président provisoire en la personne du sénateur Jocelerme Privert.
La victoire aux urnes de Jovenel Moïse ne trompe personne, c’est celle d’abord du poulain de Michel Martelly. Et celle aussi de toutes ces grandes capitales qui considèrent ce dernier comme leur champion local. Pendant que le nouveau président et la nouvelle première dame sont assis sagement, plutôt intimidés dans leurs habits de cérémonie presque folkloriques, les ambassadeurs et tout le corps diplomatique ne cachent pas leur admiration pour l’ex-président Martelly comme si celui-ci avait réussi là un coup extraordinaire : maintenir la présidence d’Haïti sous les mêmes auspices. Sous leurs auspices.
On sait que Michel Martelly a été plus que le favori de Washington lors des présidentielles de 2011, on dit que le président René Préval reçut même des menaces s’il n’acceptait la manipulation des résultats du premier tour du scrutin.
Par conséquent le nouveau président qui prête serment le 7 février 2017 ressemble qu’on le veuille ou non … à ce qu’on appelle un homme de paille.
Comment cela se passe-t-il dans la pratique ?
Jeux d’intérêt individuels et partisans au sein des mêmes …
Un vrai chaos sur le plan gouvernance locale. Une opposition fort agressive, qui bloque le pays pendant plusieurs semaines (‘pays locked’) en même temps que le président n’arrive pas à faire voter son programme de politique générale par un parlement pourtant de même appartenance (‘PHTK et alliés’) mais que des jeux d’intérêt individuels et partisans opposent de manière radicale.
Cependant le régime a une garantie, c’est le support indéniable des puissances amies. Voire un président républicain Donald Trump qui se fiche d’Haïti au point qu’on n’y tienne ou pas les élections législatives ou autres, ou remanie à sa guise la constitution en vigueur etc. que cela ne lui fait ni chaud ni froid.
On ne compte plus les tentatives dites de ‘réconciliation nationale’ mais toujours sous l’égide du Core group (puissances amies), amies d’abord du régime en place … Donc on ne finit pas de faire du surplace. Et le pourrissement de s’approfondir.
La chute de la monnaie nationale (plus de 116 gourdes pour 1 dollar américain) ne choque plus personne.
Mais surtout la corruption gagne toujours plus de secteurs dans l’administration publique (prioritairement le parlement devenu un rendez-vous de millionnaires en compétition, ainsi que les organismes dits déconcentrés ou boites de l’Etat mais qui n’appartiennent qu’à leurs occupants en chef du moment et à leurs obligés dans les hautes sphères – ONA, AGD etc), cela pendant que, ironiquement, le chef de l’Etat s’en prend aux oligarques, alors que des oligarchies se forment sous son nez.
Quand Jovenel était en quête de relations avec Poutine !
MIAMI, 27 Février – Comment se sentirait en ce moment le président Jovenel Moïse, lui qui venait, juste avant son assassinat le 7 juillet (2021), d’ouvrir des relations diplomatiques avec la Russie de Vladimir Poutine.
Alors que le président Jovenel Moïse était considéré comme un chouchou de l’administration américaine et de la communauté internationales dite Core Group qui lui ont permis toutes les libertés qu’il a prises dans tous les domaines de l’action politique (renvoi sine die des élections législatives afin de pouvoir diriger par décrets ; révocation de juges en cassation qui sont constitutionnellement inamovibles ; formation d’un conseil électoral provisoire sans respecter les règlements faisant appel à la société civile ; préparation d’une nouvelle constitution sans respecter les formalités constitutionnelles et tutti quanti …), sans compter de multiples autres écarts et toujours sans que Washington ni le Core Group n’eurent à lui adresser un quelconque rappel à l’ordre …
Voici que soudainement le même président se tournait vers le pôle adverse, le russe Vladimir Poutine.
Voici ce qu’écrivait à l’époque le président Jovenel Moïse sur son compte Twitter :
« J’ai reçu, ce mercredi 2 juin (2021), les Lettres de créance accréditant Sergei Melik-Bagdasarov, en tant qu’ambassadeur de la Fédération de Russie en Haïti. Au cours des échanges, nous avons évoqué les perspectives de renforcement des relations bilatérales entre les deux pays. »
Photos à l’appui montrant la réception solennelle pour l’Ambassadeur de Poutine au palais national de Port-au-Prince.
Vu l’actualité en ce moment avec l’entrée des troupes russes en Ukraine et une nouvelle division du monde en deux camps avec l’Haïti de Jovenel Moïse bénéficiant prioritairement de la tolérance de Washington et du monde capitaliste occidental, quelle serait aujourd’hui la position du président haïtien ?
Jovenel Moïse pensait-il pouvoir gagner, comme on dit, sur les deux tableaux ?
Aucun président haïtien qui l’ait osé, aussi loin que la mémoire remonte.
On connait les difficultés (et grâce surtout aux indiscrétions par Wikileaks !) rencontrées par le président René Préval serait-ce pour faire admettre par Washington l’entrée d’Haïti dans l’Accord Petrocaribe avec le Venezuela de feu le président Hugo Chavez !
Alors cette semaine aurait-on vu Jovenel Moïse brusquement déclarer persona non grata le même ambassadeur russe Sergei Melik-Bagdasarov qu’il venait de recevoir avec tant de fierté et d’espoir … ou au contraire prendre position comme l’actuel président vénézuélien Nicolas Maduro aux côtés de Poutine ?
Qu’en pensent les ministres et collaborateurs qui ont accompagné le défunt président haïtien dans toutes ces nouvelles initiatives ?
Mais ce n’est pas fini.
Il y a aussi ce voyage de Jovenel Moïse en Turquie, peu avant son assassinat, qui participe des mêmes initiatives qu’on doit considérer aujourd’hui comme audacieuses, et même sans précédent historique de la part d’un responsable haïtien, et par un homme dont on ne savait finalement que très peu de ces véritables objectifs et ambitions.
Car s’il y a meilleure façon en effet d’approcher Poutine c’est par le président turc Recep Tayip Erdogan.
Projet ‘One voice’ qui doit servir d’espace de réflexion où les Etats bénéficiant de l’aide internationale pourront soumettre aux bailleurs de fonds des propositions, selon leurs besoins ...
Nous lisons : L’alliance entre la Russie et la Turquie s’est immortalisée lors du conflit syrien. A eux deux, et sans les Etats-Unis de Barak Obama puis de Trump (autre admirateur avoué du président russe !), ils ont imposé le cessez-le-feu en Syrie consolidant le régime du président menacé Bachar al Asad après plus d’une dizaine d’années de guerre civile ayant fait des centaines de milliers de morts.
La presse occidentale écrit : « L’annonce d’un accord de cessez-le-feu global en Syrie entre régime et rebelles, sous l’égide de la Russie et de la Turquie, est une victoire de Vladimir Poutine.
« Poutine et Erdogan s’offrent une paix retentissante. C’est un immense succès diplomatique » etc.
Mais plus loin on lit aussi : « Cet accord témoigne aussi de l’accélération des bouleversements affectant les équilibres régionaux et internationaux » etc.
Aussi notre question aujourd’hui : est-ce que tout cela avait été pris en compte par feu le président d’Haïti ? Savait-il vraiment, en un mot, où il mettait les pieds ?
Voici ce qu’il écrivait d’ailleurs sur son compte Twitter faisant un compte-rendu de son voyage en Turquie : « J’ai eu le plaisir de participer au Forum sur la diplomatie à Antalya, en Turquie. Ce forum dont le thème était axé sur la ‘Diplomatie innovante, nouvelle ère, nouvelle approche’ a été une occasion pour Haïti de développer de nouvelles coopérations avec certains pays dans le monde’ ».
Jovenel Moïse écrit qu’il a aussi rencontré le président du Kenya. « Les discussions portaient sur un possible rapprochement entre les deux pays ainsi que l’implémentation du projet ‘One voice’ qui doit servir d’espace de réflexion où les Etats bénéficiant de l’aide internationale pourront soumettre aux bailleurs de fonds des propositions, selon leurs besoins. »
Tout cela semble aujourd’hui, comme on dit, trop beau pour être vrai !
Cependant Jovenel Moïse a été assassiné peu après son retour au pays. Et personne n’a plus parlé du voyage en Turquie. Ni son chef de la diplomatie, l’ex-ministre Claude Joseph, ni ceux qui l’accompagnaient. Nous citons : son épouse Martine Moïse ; le ministre de la défense Jean Walnard Dorneval ; ni le grand conseiller à la présidence Ardouin Zéphirin ; ni le président de la Chambre de commerce du Nord-est Joseph Albert Pierre Paul, ni le président de la Chambre de commerce du Nord Steve Astrel Mathieu ... Etc.
Des dénonciations justes mais beaucoup de bruit pour rien
MIAMI, 6 Octobre – A quoi veut aboutir cette campagne de presse intitulée Pandora Papers puisque lorsque des pays comme le Venezuela, Cuba ou autres prennent des mesures pour empêcher la même situation dénoncée, ils sont combattus entre autres par cette même presse ?
Il y a donc là ou contradictions ou hypocrisie … ou les deux.
Prenons le cas de Mr. Gilbert Bigio qui figure aussi dans ce défilé des milliardaires de la planète.
Nous lisons : ‘L’une des personnes les plus riches en Haïti, sinon la plus riche, Gilbert Bigio, 86 ans, fait partie de la minuscule élite qui a bâti sa fortune dans le pays le plus pauvre de l’hémisphère.’
S’ensuit une vue aérienne de ce que le journal appelle le palais (‘estate’ ou village entier) de Mr. Bigio à Miami.
Puis, ‘comment cette petite élite a pendant des décennies camouflé sa fortune et mis ses capitaux sous la protection de compagnies offshore (traduisez paradis fiscaux) comme autrefois les comptes en banque en Suisse’.
Ou encore ‘Bigio a pris sa retraite comme président du GB Group en 2018. On parle souvent de lui comme un milliardaire mais qui s’est enrichi dans le pays le plus pauvre de l’hémisphère. C’est aussi un pays aujourd’hui détruit par des tremblements de terre, la corruption, la violence des gangs ainsi que l’horrible assassinat, en juillet dernier, du président de la république’, etc.
Plus loin ‘c’est un monsieur qui s’est toujours tenu à l’écart de la politique. Citant l’ex-ambassadeur des Etats-Unis en Haïti, Pamela White qui dit : quand j’étais en Haïti (2012-2015), ce n’était pas un ‘big shot’ ou quelqu’un dont on parle.
Erreur. Gilbert Bigio était déjà connu dans les années 1960, à l’arrivée au pouvoir de François ‘Papa Doc’ Duvalier, en 1957, dans le centre commercial de Port-au-Prince comme le principal vendeur en bijoux de qualité sous l’enseigne de ‘Versailles Bigio Frères.’
Haïti Quel Meilleur Paradis Fiscal !!!
MIAMI, 5 Octobre – Commençons par dire que ce n’est pas comme Petrocaribe, scandale dans lequel certains dirigeants haïtiens sont accusés d’avoir détourné des fonds publics pour des projets qui n’ont soit jamais vu le jour, soit qui ont coûté cent fois moins que les montants chargés.
Il s’agit aussi de détournement mais des taxes que les individus en question ont choisi de ne pas payer ou à leur infime valeur.
Et qui trouveraient un bien meilleur usage dans leur utilisation dans les pays où ces millions ont été gagnés.
Nous nous expliquons. On n’a jamais entendu dire que l’ex-premier ministre britannique Tony Blair (véritable star dans son pays) a détourné des fonds publics …
Ni DSK (Dominique Strauss Khan), ex-directeur général du Fonds monétaire international (FMI) et ex-ministre des finances de France dans un gouvernement socialiste …
Cependant l’un et l’autre sont épinglés dans les Pandora Papers …
C’est quoi les Pandora Papers dont tout le monde parle cette semaine ?
Le nom vient bien sûr de la légende grecque dite la Boite de Pandore. Boite magique que celui qui l’ouvre ne sait pas ce qu’il doit en attendre. En bien ou en mal.
C’est une vaste enquête conduite de par le monde sur l’opacité des sociétés off-shore (appelées vulgairement paradis fiscaux), et par des associations de journalistes qui se sont mises ensemble pour aller faire les poubelles des plus grandes célébrités, aussi bien de la musique comme Shakira ou de la mode comme Claudia Schiffer que des chefs d’Etat ‘à vie’ comme le roi Abdalha (XX) de Jordanie, ou presqu’à vie comme un président russe Vladimir Poutine mais via une maitresse, ou maints chefs d’état africains qui n’investissent pas seulement dans les appartements chics à Neuilly-sur-Seine (Paris) ou autres …