Trump veut en finir avec l’immigration haïtienne
JACMEL, 27 Janvier – Avec aucun peuple le président Donald Trump n’est aussi dur dans son projet d’immigration qu’avec les Haïtiens.
La Maison Blanche vient de proposer un plan qui a beaucoup de chance d’être ratifié par le Congrès, offrant une possibilité de devenir citoyen américain à quelque 1 million 800.000 personnes en majorité faisant partie du groupe surnommé les Dreamers (jeunes sud-américains entrés aux Etats-Unis avec leurs parents mais ceux-ci ayant été expulsés, ont laissé sur place leurs enfants mineurs. Ces derniers ont grandi aux Etats-Unis, y ont été scolarisés, ne connaissant que ce seul pays). Beaucoup de secteurs, sans considération politique aucune, considèrent qu’ils méritent d’être des citoyens américains.
En échange, Trump réclame que le Congrès lui accorde 25 milliards pour la construction d’un mur devant empêcher l’immigration illégale par le Mexique.
Mais le président américain a d’autres exigences, et celles-ci nous touchent directement.
D’abord mettre fin au procédé dit de la ‘loterie’ par lequel le Département d’Etat offre chaque année quelques visas spéciaux permettant à leurs bénéficiaires d’obtenir la résidence permanente.
Les Haïtiens en ont très peu bénéficié, si l’on ne se trompe.
Secundo, récemment Haïti a été enlevée de la liste des 80 pays dont les citoyens peuvent obtenir des visas H-2A et H-2B permettant de travailler de façon saisonnière aux Etats-Unis notamment dans l’agriculture.
Malgré les arguments avancés par les services d’immigration, savoir que les participants haïtiens n’ont pas respecté les règles du jeu et qu’un trop grand nombre a essayé de rester aux Etats-Unis contrairement aux accords, la presse américaine souligne que moins d’une centaine d’Haïtiens ont bénéficié de ce visa, et qu’une évaluation montre que chaque ouvrier haïtien ajoute ‘4.000 dollars à l’économie américaine par mois.’
D’autre part les Haïtiens n’ont été acceptés à y participer qu’au lendemain du séisme qui a détruit la capitale haïtienne et d’autres régions du pays en janvier 2010 et après le passage de l’ouragan Matthew en octobre 2016.
Les ‘papys et mamies’ …
Cependant plus dur sera la suppression du procédé de la réunification familiale.
Dans le plan proposé au Congrès par la Maison blanche, il est proposé que celle-ci soit réduite seulement au conjoint et aux enfants mineurs.
C’est une disposition que l’on a déjà vu réduite d’année en année.
A commencer que tout enfant né aux Etats-Unis accordait automatiquement la résidence permanente aux parents.
Aujourd’hui c’est à la majorité que l’enfant peut exercer ce privilège.
Dans le cadre de la réunification familiale, le résident permanent peut faire venir non seulement le conjoint et les enfants mais aussi ses propres parents, ‘papys et mamies’ qui aident à l’éducation des enfants et aux tâches ménagères.
D’autre part, une fois devenu citoyen américain (ce qui est possible jusqu’ici après 5 ans de résidence permanente), l’on peut ‘appliquer’ aussi pour les enfants majeurs mais non mariés. Etc.
L’anti-haïtianisme évident …
C’est tout ce qui constitue le fondement même, le socle de la communauté haïtienne aux Etats-Unis (plus d’1 million de personnes) que la politique migratoire de l’administration Trump va balayer d’un trait de plume.
Avec toutes les conséquences qui en découleront pour le pays d’origine. La communauté expatriée transfert pas moins de 2.5 milliards pour les proches vivant en Haïti.
Et bien entendu, les derniers partis sont les plus proches du pays qu’ils ont laissé, ayant des enfants et des proches parents à leur charge. Sans oublier la nostalgie.
Nous n’avons pas oublié bien entendu les 58.000 TPS ou bénéficiaires d’un statut de résidence temporaire après avoir fui le pays sous les décombres du tremblement de terre du 12 janvier 2010 et qui ont reçu sommairement de l’administration Trump l’ordre de retourner dans leur pays. Dernier délai : juillet 2019.
Or malgré qu’on pourrait dire qu’il s’agit de dispositions administratives générales concernant la quasi totalité de la population immigrante aux Etats-Unis, là où l’anti-haïtianisme de Mr Trump pointe le bout de son nez c’est dans ces récentes insultes à l’endroit des soi-disant ‘pays de merde’ que sont Haïti, citée nommément, ainsi que le Salvador et ‘certains’ pays d’Afrique.
Il s’agit là (venant d’un président du pays où ils vivent et progressent et où ils ont investi leur avenir) d’une véritable machine de déstabilisation de toute la communauté d’origine haïtienne.
Les enfants d’origine haïtienne vont subir le martyre …
Or le plus grave est qu’il ne s’agit pas seulement des adultes haïtiens expatriés mais aussi et surtout de leur progéniture née aux Etats-Unis.
Connaissant l’école américaine, les enfants américains d’origine haïtienne vont subir le martyre après les affreuses déclarations du président des Etats-Unis.
Ce fut pareil dans les premières années de l’apparition de la communauté de Little Haïti, à Miami, dans les années 1980.
A l’époque c’était avec nos congénères Afro-américains qu’il y avait problème. Le quartier haïtien a été implanté juste à côté du leur, Liberty City.
Automatiquement ces derniers ressentirent une concurrence. Or les petits fréquentent la même école.
Il a fallu un énorme travail de sensibilisation des deux côtés pour arriver à une harmonisation des relations.
Aujourd’hui c’est par chance la grande presse américaine qui semble jouer le même rôle pour amortir les conséquences inévitables après la gaffe gigantesque et impardonnable de Mr Trump.
Hommage à l’humoriste Conan O’Brien pour son émission réalisée en Haïti et diffusée samedi soir (27 janvier) sur la chaîne TBS).
Et c’est aussi aujourd’hui, juste retour des choses, la communauté Afro-américaine qui a été la première à ramasser la balle pour l’enfoncer dans la gorge du malotru.
Outre la référence de ce dernier au Sida en parlant des Haïtiens lors d’une précédente rencontre officielle toujours à la Maison blanche.
Trump est le seul être vivant à ignorer jusqu’à nos jours la véritable origine de cette maladie.
La Perle des Antilles …
Il n’empêche que les Haïtiens des deux côtés, aussi bien à l’extérieur qu’en Haïti, ont du pain sur la planche pour rectifier le tir et ne pas se contenter, sûrement pas, des ‘sentiments chaleureux’ du président Trump à l’adresse des chefs d’Etat d’Afrique depuis le forum économique de Davos (Suisse) auquel il participait le jeudi écoulé.
On doit travailler, aussi bien ici (mais d’abord ici en Haïti) qu’à l’extérieur à relever l’image de notre pays.
Les réactions, particulièrement aux Etats-Unis, renvoyant Donald Trump à la grotte de l’homme Australopithèque à laquelle il appartient, sont la preuve que Haïti reste la ‘perle des Antilles.’
A nous Haïtiens, d’ici et d’ailleurs, de le confirmer.
Marcus - Haïti en Marche, 27 Janvier 2018