Jovenel Moïse ou la diplomatie de la mendicité

PORT-AU-PRINCE, 19 Octobre – Il y a peu Haïti appartenait à une multitude d’organisations internationales.
Nous citerons au hasard la Caricom, l’Alba, les ACP (pays d’Afrique, Caraïbe et Pacifique), ACP-UE, outre les organisations affiliées de l’ONU (FAO, FIDA ou Fonds international de développement, l’OMS, l’UNESCO etc).
Où sont-elles toutes passées ?
Aujourd’hui nous sommes carrément bloqués entre l’ONU, l’OEA (Organisation des Etats américains) ... et bien sûr Washington, ce dernier étant devenu notre passage obligé en tout et pour tout.
Cela bien sûr grâce au président actuel, Jovenel Moïse et à sa diplomatie, qu’on dirait totalement ‘vendue’ à l’actuel président américain Donald Trump.
Voici que le chancelier haïtien, M. Bocchit Edmond, vient d’adresser une supplique (directement) au Secrétaire d’Etat américain, l’honorable Mike Pompeo (pardon ‘Michael Richard Pompeo’) pour lui demander une aide alimentaire d’urgence parce que ‘la situation en matière de sécurité alimentaire s’est gravement dégradée sous l’effet de la crise politique qui secoue le pays depuis plusieurs mois.’
Formule qui dégage bien entendu son patron de toute responsabilité.
Selon le quotidien local ‘Le Nouvelliste’, la lettre du ministre des affaires étrangères haïtien (en date du 11 octobre 2019) préciserait ‘une aide d’urgence et un support logistique de votre pays’ pour sa distribution à travers notre pays.
Les opposants n’ont pas manqué de souligner que c’est un prétexte que tente d’utiliser le pouvoir en place pour provoquer une intervention militaire américaine étant donné que le protégé du président américain Donal Trump a épuisé toutes ses armes pour tenter de mater la crise politique qui fait rage exigeant son départ après deux ans et quelques mois à la tête du pays sur un mandat de 5 ans mais où rien de ce qu’il avait promis n’a été accompli.
Cependant arrêtons nous au simple fait que c’est à Washington que le président haïtien adresse ce genre de requête, qui ordinairement concerne plutôt les institutions des Nations Unies destinées à cette fin, soit la FAO (organisation pour l’alimentation et l’agriculture) ou le PAM (programme alimentaire mondial) etc.
Est-ce par flatterie, ce qui est le plus probable ou parce que nous avons coupé les ponts avec toutes les entités internationales pour remettre aujourd’hui notre sort entre les seule mains du président Donald Trump qui, entre nous, a aujourd’hui d’autres chats à fouetter - suivez la chronique washingtonienne sur le dossier du procès en destitution que les Démocrates du Congrès s’apprêtent à lancer contre lui !


Evidemment plus question de l’ALBA ou Alliance bolivarienne pour les Amériques créée par feu le président vénézuélien Hugo Chavez, organisation politique, culturelle, sociale, et économique pour promouvoir l’intégration des pays de l’Amérique latine et des Caraïbes, et dont les ex-présidents René Préval puis Michel Martelly ne rataient jamais les rencontres.
Outre que l’on y discutait aussi bien sûr de l’accord Petrocaribe et des avantages innombrables apportés à nos pays.
Où sont passés les ACP (ensemble des pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique) qui avaient commencé les préparatifs pour la célébration en Haïti du Bicentenaire de notre Indépendance (1804-2004) qui sera raté à cause de la bataille pour ne pas dire guerre civile (encore une) qui aboutira au deuxième renversement du président Jean-Bertrand Aristide ?
C’est via les ACP que nous devions déboucher aussi sur des accords préférentiels avec les pays de l’Union européenne (ACP-UE).
Hier encore un premier ministre Laurent Lamothe, profitant de l’Assemblée générale des Nations Unies (2012), ouvrait les portes sur maintes autres organisations internationales devant permettre à Haïti de s’alimenter sur des marchés autres que ceux traditionnels en vue de faire baisser le coût de la vie pour le petit consommateur.
Lors de la dernière Assemblée générale de l’ONU, le mois dernier, notre ministre des affaires étrangères n’a reçu qu’une mission de son président : signer sur requête de Washington un traité (un soi-disant traité interaméricain d’assistance réciproque ou TIAR) mais ouvrant seulement la voie à une éventuelle intervention militaire au Venezuela
Ce qui provoqua un haut le coeur jusque chez nos voisins de la Caraïbe (CARICOM) qui dès lors n’ont plus le goût à aider à la recherche d’une solution à la crise politique et économique en Haïti.
Dès lors, le ministre Edmond Bocchit n’a nulle part où s’adresser, même pour une question d’aide alimentaire qui a été classée depuis longtemps comme une spécificité de l’Organisation des Nations unies et à l’heure où justement débarque dans nos murs une nouvelle mission, le BINUH.
Voilà une autre corvée pour l’Haïti qui succédera à celle de Jovenel Moïse : redonner ses lettres de noblesse à la diplomatie de la nation la plus vieille du continent après les Etats-Unis.
Pour le moment aux yeux du monde, nous ne sommes qu’une bande de petits négrillons relâchés dans la propriété de ‘Misyé’ Trump !

Haïti en Marche, 19 Octobre 2019