Pourquoi Furcy est-il absent de la nouvelle carte touristique ?

FURCY, 10 Novembre – Bizarrement l’un des endroits les plus beaux et seulement à 1 heure de voiture de la capitale, Port-au-Prince, n’est pas mentionné dans les plans de relance du tourisme.
C’est Furcy. 1.400 mètres au-dessus de la capitale. Un paysage de carte postale.
C’est probablement le même oubli qui fait que la route de Furcy soit laissée en un état aussi affreux.
Malgré tout plusieurs établissements hôteliers y ont ouvert leurs portes. Le Lodge depuis plusieurs années. Atmosphère élégante et tranquille. Mais plus récemment Rustik qui, comme son nom l’indique, combine le confort avec une ambiance plus ‘in’, plus branchée.
Et d’autres.
Jogging, promenade à cheval, exploration de grottes et même alpinisme, rien n’y manque. Et pas âme qui vive. Il ne peut pas y avoir de ‘sdf’ à Furcy. A cause du froid, pardi.

Verdure et calme plus volupté …
Et pourtant notre nouvelle carte touristique n’a pas de place pour le seul endroit de notre pays qui puisse égaler la Suisse en verdure et calme plus volupté.
Bizarre.

Ailleurs il faut tout inventer. Ici y a qu’à se baisser, comme dit la chanson.
Et cela ne dérange personne. Même si Furcy figure dans le département de l’Ouest, ce n’est pas une raison pour l’écarter de la nouvelle stratégie parce que celle-ci ne jure que par le Grand Sud. En dehors du Grand Nord (la Citadelle Christophe, Milot, Labadie) …
Oyez plutôt. Votre touriste revient du Sud (les plages de Port-Salut, Port Morgan, hauteurs fraiches de Camp-Perrin …) tout comme du Sud-Est, chef-lieu Jacmel, eh bien si vous voulez qu’il soit tout à fait comblé, voici ce qu’on vous propose. Nous comprenons votre problème. Notre capitale n’est pas assez présentable. Sauf à confondre ONG et tourisme. Minustah-tourista ! Voilà. A hauteur de Mariani (banlieue sud de la capitale), ouvrir une route dans la montagne (il en existe déjà un tracé) qui conduise jusqu’à Boutiliers. Et de là à Furcy. Vous évitez les turbulences de Port-au-Prince.
Comme à la Jamaïque on passe par les Blue Mountains pour aller visiter Kingston. Et presque pour les mêmes raisons.

Régionalisme à rebours ! …
Pourquoi devrait-on négliger les beautés et secrets du Morne L’Hôpital pour la seule raison qu’il ne fait pas partie du Grand Sud ?

 

Régionalisme à rebours !
Ce ne fut pas toujours le cas. Nous sommes dans les années 1960. Papa Doc fait (et défait) la loi. Un livre dénonçant la terreur des ‘tontons macoutes’ (Les Comédiens, du romancier anglais Graham Green, Prix Nobel de Littérature 1974) met fin à la grande épopée touristique d’Haïti remontant à l’inauguration du Bicentenaire de la fondation de la ville de Port-au-Prince (1950).
Mais Washington est persuadé que Duvalier est un allié incontournable face à la montée du Castrisme dans le sous-continent.
La vanne du tourisme s’ouvre à nouveau. Et pour marquer le coup, c’est le plus grand paquebot de l’époque, Le France, qui jette l’ancre dans la baie de Port-au-Prince.
Les touristes, en majorité québécois, sont conduits immédiatement dans la montagne. Jeanne Barbancourt à Boutilliers. Ibo Lele (Montagne Noire).
Aujourd’hui la spéculation immobilière force à aller encore plus haut.
Ça y est : Furcy.

 

On n’y voit que du bleu ! …
La petite histoire rapporte que les agents touristiques de New York et Montréal avaient soumis une dernière requête à Duvalier : que les touristes ne risquent pas de tomber sur les terribles ‘tontons macoutes’ dénoncés dans le roman de Green.
A cela Papa Doc décida que le jour de l’arrivée du France, la couleur bleue (celle de l’uniforme de ses fameux tontons macoutes), mais mieux que ça, la couleur bleue tout court sera interdite ce jour-là sur tout le territoire d’Haïti.
Ce qui fut fait.
Mais est-ce une raison aujourd’hui pour dire du seul endroit qui soit encore vert d’un pays détruit totalement par l’érosion : on n’y voit que du bleu !

Marcus - Mélodie 103.3 FM, Port-au-Prince