Marché commun US-UE versus Exception française !

PORT-AU-PRINCE, 19 Juin – Lors du G8, lundi et mardi 17 et 18 juin, en Irlande du Nord, il n’était pas seulement question de la guerre civile en Syrie. Les 8 grandes puissances économiques (une formule qui fait sourire quand on sait que même la Chine, seconde puissance économique de la planète, ne fait pas partie de ce club très fermé et pour cause) devaient également commencer à explorer l’initiative américaine de créer un immense marché commun avec les alliés européens. Une zone de libre-échange américano ou nord-américano-européenne puisque le Canada du Premier ministre Stephen Harper en fera probablement partie. Bref un club de pays tous membres de la même civilisation européenne ou euro-centriste. Dont l’américain Barak Obama, bien sûr !
Donc un front commun (occidental) face aux économies dites émergentes : Chine, Inde, Brésil, Afrique du Sud etc.
Mais ce n’est pas ce qui a ralenti les conversations au G8, qu’une dernière réticence ou condition française. La France est pour, mais à une exception près : elle veut garder sa totale autonomie en matière culturelle et audiovisuelle. Pas question de mondialiser Goncourt et Renaudot, voire l’Académie française.
Cela fait sourire certains, dont José Manuel Barroso, le président de la Commission européenne, qui accuse la France d’être trop ‘réactionnaire.’
Dans un monde dominé par des entités qui ont pour noms Google, Facebook, Twitter, MacIntosh, dont aucun n’est français, cela peut paraître farfelu. Mais qu’est-ce que la France en effet sans sa culture, sans sa langue. Sans ses châteaux et ses musées.


Hier encore les marques Citroën, Renault, Peugeot pouvaient rivaliser avec leurs concurrentes étrangères mais on ne les voit plus nulle part. Même en France.
La France de De Gaule était fière de son avion de combat Mirage.
On a envie de chanter avec Sardou pleurant la disparition du plus grand paquebot du monde en son temps, Le France : ‘La France m’a laissé tomber !’
Mais reste les grands prix littéraires, il n’en existe en effet aucun équivalent dans le monde. Même quand la France de la crise économique ne peut tenir ses promesses envers l’Haïti post-séisme du 12 janvier 2010, elle tient la cote auprès de la gent intellectuelle haïtienne avec ses promesses de prix littéraire, la Légion d’honneur etc.
Reste le festival de Cannes qui fait courir cinéastes et stars du monde entier tandis que les Oscars américains eux n’arrivent pas à se défaire de la malédiction de Oussama ben Laden !
Quoi qu’il en soit, des marques portant bien haut des noms bien français ne le sont pas pour autant depuis longtemps : Loréal, Dior, Chanel et tant d’autres dont la majorité des actionnaires sont probablement étrangers.
Par contre le Château de Versailles est plus visité que Disneyland, dans les environs de Paris.
Il est difficile sauf pour l’espagnol José Barroso (l’Espagne étant dans une situation économique désespérée) de ne pas comprendre la position française. Ou comment un pays d’un peu plus de 63 millions d’habitants fait plus de bruit que même 1,36 milliard de Chinois. Y a qu’à voir avec quel appétit ces derniers envahissent par dizaines de milliers le parvis de Notre Dame ou la Pyramide du Louvre.
La France est numéro 1 en nombre de touristes reçus l’an.
Cependant aujourd’hui elle ne bat économiquement pas tellement plus fort que ses voisins (surtout l’Italie et l’Espagne). La France aux dernières nouvelles est en récession.
D’où la question (on voit d’ici le sourire moqueur d’un José Barroso) : la France a-t-elle aujourd’hui les moyens de sa politique ?
L’exception française fait-elle toujours autant recette ?
Les critiques ne manquent pas. Pour commencer, du côté des supposés plus proches culturellement : la Francophonie.
A la dernière rencontre, juillet 2012, à Québec, il est clairement apparu que la France n’est plus le moteur voire même le berceau de la Francophonie, bien plus servie par la passion québécoise pour la langue française. Langue identitaire qui fait sa personnalité face au Canada anglophone. Et le Québec paraît bien plus avoir … les moyens de sa politique !
D’ailleurs actuellement un débat qui fait rage dans les médias à Paris c’est faut-il enseigner l’anglais comme un cours obligatoire à l’université ?
Shakespeare côte à côte avec Voltaire, quelle affiche !
Comme si la France elle-même s’apprête à suivre le même chemin que certaines de ses ex-colonies qui aujourd’hui ne parlent plus un mot de français pour lui préférer l’anglais.
Tel le Rwanda, le pays du génocide de 1994, dont le président, le général Paul Kagame, a décidé que l’anglais représente davantage l’avenir pour un peuple avide de développement.
Ce que le Vietnam a fait également. Oui, l’ex-Indochine de Marguerite Duras (‘L’Amant’). Eh bien, pas un seul des cadres vietnamiens de la Natcom (compagnie de téléphonie à Port-au-Prince) qui comprenne le français.
D’ailleurs c’est la France qui donne l’exemple. C’est après le passage des auteurs et artistes français à Santo Domingo qu’ils viennent se produire en Haïti.
On attend de voir les résultats des sondages d’opinion en France même sur ce carrefour peut–être moins délicat pour le Britannique, ni même pour l’Allemagne (on ne connaît aucun autre pays qui ait décidé de fixer un quota des films étrangers afin de protéger sa propre production cinématographique et audiovisuelle), mais il paraît évident à plus d’un que l’image de la France (même surfaite étant donné son poids véritable aujourd’hui dans les affaires du monde) ne sortirait pas indemne d’un traitement aussi brutal que placer Astérix directement en compétition avec Batman !
Mais il ne serait pas étonnant que les meilleurs défenseurs de l’exception française ne soient pas les Français eux-mêmes mais quelques petits groupes très sélects, du genre à voyager chaque année à Paris pour assister aux grands défilés de mode … Car la France, en voulant depuis toujours rester si différente, finit par ressembler aussi à une sorte de luxe.
Or en période de crise économique, on pense d’abord au primum.
Et lorsqu’il faudra choisir la langue principale pour le nouveau système de libre-échange Amérique du Nord – Union Européenne ce ne sera probablement pas … le latin !

Marcus - Mélodie 103.3 FM, Port-au-Prince