JACMEL, 20 Février – Cette semaine on a beaucoup parlé d’Haïti. Cependant ce n’est ni spécialement par des Haïtiens ni en Haïti.
L’acteur oscarisé Sean Penn a été reçu jeudi par le président français François Hollande.
La vedette hollywoodienne est le président d’une organisation créée au lendemain du séisme qui a frappé Haïti en 2010, la JP/Haitian Relief Organization (J/P HRO), et il passe une bonne partie de son temps en Haïti ou à plaider la cause d’Haïti de par le monde.
En un mot, l’un des meilleurs ambassadeurs de notre pays.
La même semaine, le (ou la) superbe mannequin Naomi Campbell organise son Fashion For Relief (la mode au service de l’humanitaire) à New York.
Peu auparavant, le même spectacle avait lieu à Dubai, dans le Golfe arabique.
L’une des causes humanitaires défendues par Naomi Campbell ces dernières années a été également le secours aux victimes du séisme en Haïti.
Aux Etats-Unis, une pièce de théâtre fait la une dans la section Arts et Loisirs du New York Times. ‘Little Children Dream of God’ (Les petits enfants rêvent de Dieu), une œuvre théâtrale qui tire son inspiration dans la communauté des réfugiés haïtiens luttant pour se forger une nouvelle vie dans un quartier rude de Miami nommé Overtown. Une mère de onze enfants sans papa … sinon Dieu. Mais celui-ci change de signification selon les circonstances, comme tout Haïtien le sait. L’auteur s’appelle Jeff Augustin. Le premier dramaturge haïtien de sa génération joué dans un théâtre de Broadway.
A Miami aussi, la romancière Edwidge Danticat rédige la préface d’un rapport qui recommande de suspendre la déportation d’immigrants haïtiens, même pour cause de condamnation pour crimes ou délits, à cause de la brutalité des conditions qui les attendent en Haïti.
Une cause défendue depuis plusieurs années par l’organisation Fanm Ayisyen nan Miyami sous la houlette de la militante Marleine Bastien.
Long article à ce sujet de Jacqueline Charles dans le Miami Herald.
N’oublions pas l’exposition d’art haïtien au Grand Palais, à Paris : ‘Deux siècles de création artistique’ qui vient de s’achever. Hélas, sans tambour ni trompettes. Peut-être avait-on vu trop grand !
Mais Yanick Lahens rétablit la balance en remportant le Prix Femina 2014 pour son roman ‘Bain de lune.’
Et notre Dany Laferrière prendra officiellement place parmi les Immortels (Académie Française) au printemps prochain.
Haïti soudain est partout sur les planches et au haut des cimaises … sauf en Haïti.
Comme si c’est tout ce qui restait de nous !
Pardon, notre actuel Premier ministre ne vient-il pas aussi du monde du théâtre. On le voit bien au lendemain de l’accident survenu au carnaval de Port-au-Prince qui a fait 18 morts et plus de 70 blessés. Evans Paul (ou en l’occurrence ‘K-plume’) retournait la situation en un clin d’œil, dans la fébrilité mise à rendre hommage aux disparus et la promesse de toutes sortes d’aides aux victimes.
Le grand perdant est peut-être Michel Martelly qui rate une dernière occasion de revêtir la jupette de ‘Ti Simone’, son personnage carnavalesque incarné pendant de longues années et l’une de ses images de marque qu’il le veuille ou non aujourd’hui (le Président est à la dernière année de son mandat).
Qui frappe par le carnaval périra par le carnaval !
Mais l’opposition aurait intérêt à en prendre de la graine. Le monde du show-biz a donc envahi aussi le champ politique.
Prenez l’ex-Premier ministre Laurent Lamothe, dont on dit qu’il ambitionne la Présidence.
Après avoir aux côtés de son ‘ami et frère’ le Président (dixit celui-ci), distribué des titres d’ambassadeur de bonne volonté en veux-tu en voilà, aujourd’hui il est en train d’en récolter le bénéfice.
A voir sur sa page Facebook, Laurent Lamothe est engagé dans une tournée de tous ses amis du Jet Set et non des moindres (les Clinton, l’ex-Premier britannique Tony Blair, la star du foot David Beckham et autres …), préparant peut-être une opération-retour.
Haïti soudain partout sur les planches et les tapis rouges du monde entier qu’il vaut mieux avoir parcouru pour peu qu’on croit y posséder un grand destin.
Tandis que pour les autres, ceux qui n’y vivent pas que dans les rêves et la folie des grandeurs, c’est un pays qui, justement, échappe de plus en plus au monde réel !
Marcus - Haïti en Marche, 20 Février 2015