MIAMI, 29 Janvier – La question de l'investiture du président élu Jovenel Moïse commence à devenir cruciale.
Pas seulement à cause de l'épée de Damoclès de l'investigation pour cause de blanchiment des avoirs par devant le juge d'instruction Brédy Fabien mais serait-ce à cause du temps nécessaire, on est à une semaine (8 jours) du 7 février 2017 et rien n'est encore en place.
Le comité d'investiture du candidat déclaré vainqueur des présidentielles réclame (porte-parole Lucien Jurat) un minimum de US$1 million pour l'organisation de l'événement mais encore faut-il s'assurer que celui-ci aura lieu.
Un groupe de 4 sénateurs recommande que la question de blanchiment soit tranchée légalement avant l'investiture, pour être certain que la nation ne va pas en payer les conséquences avec un quelconque boycott de la part des institutions internationales de financement hésitant à négocier avec un président qui aurait de pareils soupçons à son encontre.
Le juge Fabien a donc une responsabilité des plus lourdes.
Le facteur quorum ...
Le président élu a l'assurance que la majorité parlementaire et lui-même appartiennent au même secteur politique, le PHTK ou Pati Ayisyen Tèt Kale fondé par l'ex-président Michel Martelly.
C'est le parlement réuni en Assemblée nationale qui donne l'investiture au nouveau chef de l'Etat.
Mais faut-il que le quorum soit réuni. Il faut un quorum de 60 députés et 16 sénateurs.
Mais actuellement, avec un tiers du sénat de 30 membres dont le mandat est remis en jeu aux élections de ce dimanche 29 janvier 2017, et le sénateur élu (mais non encore assermenté) de la Grande Anse, Guy Philippe, extradé aux Etats-Unis sous une accusation de trafic de stupéfiants, il reste actuellement en fonction en principe 19 sénateurs sinon moins (huit sièges étaient mis en jeu aux législatives de ce dimanche 29 janvier pour lesquels les résultats définitifs ne seront pas connus avant le 7 février) ...
Il suffit donc de l'absence de 3 sénateurs pour infirmer le quorum et provoquer l'annulation de la séance d'investiture. Du moins devant le parlement.
Ou une révolution, ou un coup d'état ! ...
Le cas a déjà été évoqué par des parlementaires du PHTK et alliés eux-mêmes.
Pour les uns, c'est le peuple qui a élu Jovenel Moïse le 20 novembre dernier (hélas, à peine 21% de participation électorale), la légitimité populaire lui suffit pour exercer le pouvoir.
Pour le député Gary Bodeau, trêve de bavardages, en cas de vacance présidentielle (étant entendu que le président provisoire Jocelerme Privert a fixé le 7 février pour se retirer), il reviendra au premier ministre et au chef de la police nationale, en tant que responsables de la sécurité nationale et de l'ordre public, de prendre leurs responsabilités en installant Jovenel Moïse au palais national.
Conclusion : dans le premier cas, celui basé sur la légitimité populaire, il faudrait une révolution ; et dans celui évoqué par Gary Bodeau, un coup d'état. Tout simplement.
Parce que seuls des élus ou des fonctionnaires assermentés et détenteurs de la souveraineté constitutionnelle qui peuvent faire prêter le serment constitutionnel à d'autres.
Dans le cas où le parlement est empêché, il faudrait donc se tourner plutôt vers la Cour de cassation.
Le quorum y est moins restrictif mais des anti-PHTK peuvent soulever la question de la légitimité de la totalité des membres de la Cour de cassation eux-mêmes, certaines désignations faites sous la présidence Martelly (2011-2016) auraient pu ne pas avoir respecté toutes les obligations constitutionnelles.
Dès lors une nouvelle menace de blocage à l'horizon.
Un consensus ? ...
La seule voie de sortie possible : négocier une solution au niveau des différents partis représentés au parlement pour éviter l'absence de quorum.
Quand les PHTK clament que c'est ce que recherchent justement leurs adversaires (un partage des postes ministériels dans le prochain gouvernement) quand ces derniers menacent de faire la politique de la chaise vide le 7 février 2017, connaît-on une manière plus pacifique de faire la politique ?
Jovenel Moïse semble avoir épousé le parti de ses alliés pour exercer un pouvoir total (si ce n'est totalitaire dans les faits !), comme pendant le premier quinquennat exercé par ces derniers (2011-2016), mais la réalité du pays peut ne pas le voir aujourd'hui tout à fait ainsi.
Encore faut-il franchir l'étape du cabinet du juge d'instruction Brédy Fabien !
Haïti en Marche, 29 Janvier 2017