PORT-AU-PRINCE, 14 Octobre – Tout part de l'école.
Haïti n'est pas perdue si le citoyen est suffisamment formé pour savoir interpréter les multiples menaces qui pèsent sur notre tête et agir en conséquence.
Sinon, c'est foutu.
En effet, le même Haïtien qui se jette à genoux au moment du séisme de janvier 2010 persuadé que c'est le jugement dernier annoncé le jour de la fin du monde, c'est encore lui qui va dérober les piles solaires alimentant les sismographes ou instruments installés pour suivre les mouvements sismiques.
Idem le trafiquant qui choisit un jour de forte tempête pour prendre la mer avec pour passagers des migrants illégaux sous prétexte que le temps est si mauvais que les gardes côtes américains ont dû regagner le port.
Etc.
Notre compte est bon dans ce pays car on peut essayer tout ce que la science a pu créer que nous restons condamnés à disparaître comme un seul homme ...
Si nous ne sommes pas capables d'instruire notre population de ce qui nous arrive.
Et de A à Z.
A plus forte raison que nous vivons une démocratie qui a été implantée d'un jour à l'autre et dont le gros de la population loin d'en respecter les principes, semble au contraire considérer comme un système sans principes, du tout est permis.


Qui pis est, encore plus chez les nouvelles générations où cela se renforce par une certaine attitude arrogante. Et en même temps : désespérée. Le désespoir sous la défroque de l'arrogance.

Des esprits non encore déformés ...
Conclusion : il faut tout recommencer. Et où mieux pouvoir le faire qu'à l'école. Avec des esprits non encore déformés.
Cette semaine on parle beaucoup d'une approche psycho-sociale pour les victimes de l'ouragan.
Penser aux hommes et femmes, et aux enfants, qui ont vécu douze heures pilonnés sans interruption par ce phénomène monstrueux !
La grande presse nous raconte comment ils n'ont pas attendu les secours pour se remettre aussitôt à rebâtir leur vie.
Résilience, dit-on. Comme au lendemain du séisme. Comme chacun de nous. Oui mais qu'est-ce qui le prouve ? Comme si on était un peuple de fourmis. Dont on défait le nid mais qui aussitôt reforment celui-ci.
Nous pensons qu'il y a d'autres victimes. Ce sont les écoliers jusqu'à la capitale et qui ont eux aussi besoin d'une approche psycho-sociale pour mieux appréhender le malheureux sort de leurs petits compatriotes des départements du Sud, de la Grande Anse, des Nippes et du Nord-Ouest.

IMPLOSION ! ...
Et c'est aussi la seule façon de mieux préparer notre peuple à lutter contre la menace de disparition qui nous pend au-dessus de la tête. Et qui de plus en plus se précise on ne peut plus.
Ou pour citer l'agronome haïtien André Victor dans une série d'articles datant de pas si longtemps : IMPLOSION ! C'est-à-dire on peut disparaître aussi sous le poids de ses propres insuffisances. Incapacité à faire face à une situation capitale. Définitive.
Selon les résultats d'une étude commanditée par la Banque mondiale, 'la vulnérabilité d'Haïti aux désastres a augmenté durant les 50 dernières années, passant de 0,6 désastre dans les années 1960 à 1,5 durant les années 1980 et à 3,3 durant les années 2000.
'Cette augmentation est due à la dégradation accélérée de notre environnement. Tandis que le nombre de tempêtes accuse une légère augmentation par rapport à la partie orientale de l'île : 35 en Haïti contre 29 en République dominicaine. Les impacts sont davantage catastrophiques où chaque inondation provoque en moyenne 81 morts contre 38 en République dominicaine.
'Cette plus grande ampleur des catastrophes en Haïti résulte en grande partie de la plus grande déforestation qui a appauvri les sols et diminué leur capacité de rétention.'
Or nous ne pouvons espérer convertir toute la population à ces nouvelles nécessités, aussi incontournables qu'elles puissent être. Ou alors on risquerait de verser dans le Polpotisme (Pol Pot, dictateur communiste qui vida les villes et renvoya tous les Cambodgiens à la campagne dans un immense camp de réhabilitation, voir le film 'Killing fields').
Par contre, en quelques années on peut éduquer nos enfants à ces nouvelles réalités.
En bâtissant un enseignement scolaire à cet effet.
Et en exigeant qu'il soit incontournable pour acquérir la première étape du fondamental.
Qui dit mieux !
Quelle autre façon d'agir sur l'avenir.

Haïti en Marche, 14 Octobre 2016