PORT-AU-PRINCE, 13 Mars - Une grève des douaniers bloque totalement le pays.
Ou du moins cela devrait être le cas, dans un pays qui a une activité économique normale, or on a l'impression que l'actuelle grève n'existe que par la grande place qu'elle occupe dans les bulletins de nouvelles.
Et d'un.
Ensuite, c'est le calme qui existe dans des secteurs qui auraient dû être totalement renversés devant un pareil événement.
Deux semaines que rien ne sort ni n'entre dans toutes les douanes d'un pays, portuaires et aéroportuaires.
Or la grève qui est à sa deuxième semaine. poursuit son petit bonhomme de chemin.
Le gouvernement déclare avoir fait tout ce qui est en son pouvoir pour convaincre les grévistes d'arrêter leur mouvement.
Les milieux d'affaires se contentent d'enregistrer les pertes que cela leur coûte mais sans mettre la pression ni sur les dirigeants ni sur les grévistes, comme si c'est une fatalité.
Les douaniers ont donc toute latitude pour faire monter la pression, sans aucune hésitation.
Drôle de grève.
Surtout dans un pays qui a connu il y a quelques mois la menace, oui seulement la menace d'un arrêt de travail dans l'industrie de la sous-traitance ; l'on vit toute la capitale prendre feu, les unités spéciales de la police mobilisées, le pouvoir en place, du président de la république au directeur du parc industriel monter à l'assaut pour mettre en déroute les syndicats ouvriers.
Que s'est-il passé en à peine quelques mois ? Le même pouvoir vient de célébrer sa première année en fonction mais dans une atmosphère économique plus morose que nous n'avons jamais connue depuis peut-être plus d'un demi-siècle.
Serait-elle donc de nature économique cette espèce de je-m'en-foutisme général qui se constate devant la grève des douaniers déjà à sa deuxième semaine ?
Alors que les caisses sont vides et que les douanes sont la principale source de recettes fiscales ...
Mais le ministre de l'économie se contente de hausser les épaules, estimant avoir fait tout ce qui est en son pouvoir pour débloquer la situation.
Ni il ne semble recevoir de pression de la part des patrons de la sous-traitance, ceux-ci se contentant d'énumérer platement les pertes subies : la presse rapportant que 'six entreprises dans ce secteur ont été fermées à cause de l'absence de matières premières' (AHP) et les employés bien entendu renvoyés chez eux. Comme si lesdits patrons ne cherchaient qu'une occasion pour ... prendre ainsi quelques jours de vacances.
L'économie haïtienne serait-elle aujourd'hui une sorte de barque à la dérive ?
Mais revenons à nos douaniers en deuxième semaine de grève.
Première revendication : la publication dans le journal officiel 'Le Moniteur' d'un statut particulier des agents de douane.
Chachayecha ?
Comme les médecins, quoi. Ou les enseignants, une sorte de code de référence pour les diplômés de haut niveau.
La presse, qui n'a probablement pas elle-même le droit à un tel 'statut particulier', en vient vite à des questions plus prosaïques.
Comme la réclamation par nos douaniers d'un ajustement salarial en faveur de l'ensemble du personnel de l'Agd (Administration générale des douanes), alors que le pouvoir y avait souscrit, relèvent-ils.
Ensuite l'application de cette augmentation salariale doit remonter au 1er octobre 2017.
Le douanier moyen percevrait aujourd'hui 17.000 gourdes.
Les grévistes demandent aussi sans tarder l'application du statut particulier mentionné plus haut, étant donné que le pouvoir avait déjà donné son accord et qu'il ne reste que la publication dans le journal officiel.
Or cette dernière disposition est un attribut exclusif du chef de l'Etat. Cependant on n'entend point citer le nom de celui-ci alors que nos grévistes accusent le ministre des finances, Jude Alix Patrick Salomon, de bloquer le dossier.
De son côté le ministre annonce que toutes les promesses qui avaient été faites seront respectées et fait même état d'un ajustement salarial de 40% dont les protestataires auraient même déjà commencé à bénéficier.
Sur ce, les grévistes de solliciter aussi la formation d'une commission mixte composée de représentants du Ministère des finances, de l'Agd et de l'Association des douaniers haïtiens. Et quoi encore ?
Sur ce, le ministre Salomon donne sa langue au chat.
Il considère que les douaniers n'ont pas l'intention de mettre fin de si tôt à leur mouvement.
Quoi qu'il en soit, personne, mais absolument personne, ni le pouvoir en place, ni les patrons du Parc industriel, contrairement aux réactions enregistrées lors du mouvement d'arrêt de travail de la part des ouvriers et ouvrières de la sous-traitance, personne n'a encore prononcé le mot POLITIQUE, à l'occasion de cette grève des douaniers.
Conclusion : ou c'est une grande victoire pour la démocratie en Haïti.
Ou c'est une ... bien drôle de grève.
" On apprend ce mercredi que la grève a été levée.
Mélodie 103.3 FM, Port-au-Prince