Corruption et Pouvoir ou Corruption au Pouvoir !

MIAMI, 18 Janvier – On peut geler les salaires des membres du gouvernement, on peut diminuer les frais de fonctionnement que cela ne change rien.

Nous sommes certains que pour faire plaisir à la communauté internationale un premier ministre Ariel Henry est prêt à tout ça.
Or cela ne change rien à l’attrait qu’exercent les hauts postes de l’administration publique en Haïti vu que c’est principalement par la possibilité qu’ils offrent d’avoir accès à la multiplicité de contrats passés à droite et à gauche, tant dans le secteur local qu’à l’étranger.
Autant d’occasions de battre millions en tirant les ficelles à droite et à gauche.
Rappelez-vous ce premier ministre nommé par le défunt président Jovenel Moïse dont on découvrira que la fortune qu’il était prêt à débourser pour obtenir l’agrément du parlement à sa nomination, lui était venue en passant commande pour le gouvernement de cargaisons de … cabris, dont bien entendu personne n’avait jamais entendu le premier ‘bê-ê’ !
Tout cela sans avoir besoin de verser dans le trafic de la drogue comme n’hésiteront pas les plus voraces … mais rien que comme disait l’autre, ‘la petite corruption’, qui ne tue personne.
Ainsi le (ou la) ministre qui débarque traine avec lui (ou elle) toute une armée de petits contracteurs qui eux non plus n’ont rien à offrir que leurs propres contacts et ainsi de suite …
Car quelle plus grande bouffeuse que l’Etat haïtien en grosses cylindrées ; en achat de carburant, billets d’avion ; en organisation de fêtes champêtres et de commémorations culturelles ; y compris en commande, eh oui, de cabris et de cochons créoles comme au temps de la fameuse ‘caravane du changement’ n'est-ce pas !

Geler les salaires des ministres, bloquer les voyages aux frais de la reine comme on a entendu l’annoncer en décembre dernier par le gouvernement du Dr Ariel Henry, cela pour cultiver les faveurs de l’international … mais c’est de la petite bière tant que ne touchant pas à la pieuvre, le serpent à 7 têtes qui est la vraie raison de la chasse aux hauts postes de l’administration publique (gouvernement et parlement) et pourquoi si l’on peut dire on vendrait sa mère pour ne pas en être écarté !
Aucune crainte du côté de la communauté internationale tant qu’on ne touche pas au trafic de cocaïne, ni au trafic d’armes (laissons ça pour les vrais ‘malades’).
Voire qu’une bonne partie de ces magouilles mais bien sous tous rapports, se font aussi avec cette même communauté internationale en termes de facilités pour l’aboutissement de contrats en tout genre : aide financière ; aide humanitaire, oui ; achats de ceci et de cela jusqu’à des commandes d’armes dont des blindés bien sûr pour les forces de l’ordre, partout un petit coup de pouce venu d’en haut est toujours le bienvenu etc.
C’est l’autre corruption, celle qui ne tue personne, mais qui n’en contribue pas moins à la paupérisation générale et à l’état dans lequel nous sommes aujourd’hui tombés.
Et pour conclure, voilà pourquoi il est si difficile de trouver une solution à la crise actuelle.
Tout comme en des temps pas très anciens on parlait de deux ou trois candidats à la présidence ; or aux dernières présidentielles ils étaient plus d’une centaine si je ne me trompe ; autant aussi en nombre d’organisations et de partis politiques ; même les organisations de défense des droits humains, ou les organisations de médias qui ne se comptent plus sur les doigts des deux mains …
Et tout cela grouille, grenouille, scribouille pour répéter le général de Gaule.
Tout le monde veut sa part. Le nombre de ministères ne cesse de s’allonger, ainsi que les directions générales, et les conseils d’administration X et Y dans tous les domaines, mais plus ça change plus c’est la même chose …


Un proverbe haïtien dit ‘voler l’Etat ce n’est pas voler’ mais il y a des limites et qui ont été allégrement franchies depuis belle lurette jusqu’à plonger aujourd’hui tête baissée dans le néant.
Malgré cela c’est pas fini, parce qu’il y a aussi l’international.
Il fut un temps, peut-être jusque sous le premier mandat du président Préval (1996-2001) où la contribution internationale dépassait la part des recettes publiques dans le budget annuel.
Aujourd’hui le ‘blanc’ est entré dans le jeu. Puisque tout ce qui appartient au budget public est piraté, autant donné seulement la moitié, à peine 50 pour cent.
Et le reste distribué aux organisations de bienfaisance, droits de l’homme, protection de la femme ou/et de l’enfant, de l’environnement etc … mais dont c’est automatiquement aussi le nombre qui dépasse tous les plafonds !
Quoi faire ?


Un petit rappel. Sous Baby Doc c’est la USAID qui faisait elle-même le salaire des employés de l’Etat. Et il n’y avait pas de plainte. Cela c’est bien entendu quand les Etats-Unis décident de protéger pour de bon le pouvoir en place.
Est-ce le cas avec PM Ariel Henry ?
Alors que ce dernier a l’air si sûr de lui-même.
Il ne reste que d’attendre.
Car tant que les postes du gouvernement ainsi que du parlement resteront des vaches à lait de première classe, il n’y a aucun moyen, ni aucune raison de changer réellement les choses.
Ministres et parlementaires passent, mais les conditions restent les mêmes.
On continuera de se battre avec acharnement contre toute tentative de réel changement … à commencer contre tout nouveau compétiteur (‘ti mache a twò piti’), non ce sera toujours le j’y suis j’y reste.
Et pour finir le même blocage auquel Ariel Henry lui-même fait aujourd’hui face avec son nouveau conseil de transition mort-né (dit Consensus national pour une Transition inclusive et des Elections transparentes) mais jusqu’ici assez ni inclusif ni transparent pour son opposition et dont près d’un mois plus tard, il ne peut annoncer la composition dans le journal officiel.
Le blocage n’est donc pas un phénomène passager, c’est un état de fait.
Autrement dit l’actuel pouvoir en est aussi le produit.
Comment lui demander d’y mettre fin ? C’est une invitation à se suicider. Voilà pourquoi tout est bloqué, on ne bouge pas, on ne va nulle part.
Personne n’a l’intention de changer.
Sauf à ne pas faire partie du système. Personne qui vous y invite non plus !

Marcus Garcia, Haïti en Marche, 18 Janvier 2023