Haïti n’a aucune position sur l’échiquier USA vs China ?
« Ou pa Wè se ak Blan an Mwen vini
MIAMI, 31 Mars – Chassé-croisé dans le continent sud-américain entre ceux qui sont pour établir des relations diplomatiques avec Pékin et renoncer à Taiwan, petit état national planté au cœur de l’immensité chinoise mais bénéficiant de l’appui solide des Etats-Unis … et les autres parmi nos voisins du sud du continent mais ceux-là en constante diminution.
La situation ne cesse de rebondir avec l’importance de plus en plus marquée prise par l’économie chinoise et la percée sans précédent que cela entraine dans l’équilibre stratégique international jusqu’ici dominé par les Etats-Unis et le monde capitaliste occidental.
Récemment se tenait le 28e sommet ibéro-américain à Santo Domingo, capitale du pays voisin, la République dominicaine.
Cependant dans les rapports de presse pas un mot concernant cette actualité. Réponse : parce que ce n’est plus un événement. D’ailleurs la République dominicaine elle aussi a rompu avec Taiwan.
Aujourd’hui c’est le tour du Honduras comme le rapporte l’agence Juno7 : « Coup dur pour Taiwan … qui vient à nouveau de perdre un allié ».
Dans un communiqué, Pékin et son nouvel allié Tegucigalpa font savoir : « La République populaire de Chine et la République du Honduras, conformément aux intérêts et au désir des deux peuples, ont décidé de se reconnaitre et d’établir des relations diplomatiques au niveau des Ambassadeurs à compter de la date de la signature du présent communiqué. »
« Les deux gouvernements (Chine et Honduras) conviennent de développer des relations amicales entre les deux pays sur la base des principes de respect mutuel, de souveraineté et d’intégrité territoriale, de non-agressivité, de non-ingérence dans les affaires intérieures de l’un et de l’autre, d’égalité, d’avantages mutuels et de coexistence pacifique » poursuit le communiqué.
Juno7 souligne dans sa dépêche que désormais Taiwan n’est reconnu que par 13 Etats dans le monde tandis que la Chine du président Xi Jinping, passe de 181 alliés diplomatiques à 182.
Cependant il y a une condition : « Pékin n’accepte pas de relations diplomatiques à la fois avec lui et Taipei. Toute reconnaissance de la Chine par un pays, entraine automatiquement la rupture des liens entre celui-ci et Taiwan. »
D’ailleurs Taiwan avait déjà rappelé son ambassadeur à Tegucigalpa après la visite en Chine du ministre hondurien des affaires étrangères, Enrique Reina, sur instruction de la présidente Xiomara Castro, poursuit cette dépêche très complète de l’agence Juno7.
Or c’est chaque jour que rebondit cet état de guerre larvée entre Washington et Pékin, ce dernier semblant un bien plus redoutable adversaire que la Russie de Poutine - malgré le confit armé en Ukraine … cela parce que la Chine par son développement spectaculaire est un défi évident pour l’avenir de ce qu’on considère jusqu’ici comme la première puissance économique de la planète.
D’autre part, les nouveaux alliés de Pékin ne semblent pas s’en plaindre, dans quelque coin de la Terre, en Afrique ou autres etc.
Pas plus que jusqu’ici nos voisins dominicains !
Tandis que les nations restées fidèles à Taiwan ne le sont pas pour des raisons particulièrement économiques, comme le Vatican, Bélize, les îles Marshall, Nauru, Saint Christophe et Nieves, les Palaos, Sainte Lucie, Saint Vincent et les Grenadines, Tuvalu, le Swaziland … à l’exception bien sûr d’Haïti.
Mais surtout Taiwan peut compter sur le soutien des pays occidentaux opposés à la Chine, en tête bien sûr les Etats-Unis.
En août dernier la présidente (démocrate) de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, avait accompli une visite remarquée dans la capitale taiwanaise, tandis que le président Joe Biden a déclaré que les Etats-Unis défendraient l’île en cas d’une invasion chinoise.
Voici une question plus que jamais d’actualité … mais partout sauf en Haïti.
Pour quelle raison tant Washington que Pékin serait intéressé à notre sort plus que nous le sommes nous-mêmes ? …
Nous ne sommes pas en train de dicter à nos leaders aussi bien politiques que économiques ou sociaux, quelle position adopter mais plutôt comment peuvent-ils rester aussi totalement indifférents à une question de cette importance quand c’est eux qui ont le pouvoir de décision …
Et quand personne ne peut vous empêcher de défendre les intérêts de votre peuple. Comme le font en dernier lieu les dirigeants honduriens … et encore plus près de nous ceux de la République dominicaine voisine, cette dernière n’en restant pas moins un allié économique (et politique) des Etats-Unis, et bien longtemps avant nous autres !
En d’autres mots, si nous devons rester totalement du côté des Etats-Unis cela ne devrait-il pas entrainer une amélioration de notre sort ?
Pourquoi alors non seulement les dirigeants mais personne qui semble s’en émouvoir ? Tant nos élites politiques que économiques et autres ?
Alors que Haïti est en train de disparaitre corps et âmes. Sous les yeux de tous … y compris de la communauté internationale.
La planète changerait-elle entièrement de pôle de domination stratégique, que Haïti ne s’en apercevrait et resterait toujours dans son même état actuel et chaque jour pire encore …
Le problème haïtien n’avait jamais été exposé avec autant d’acuité ?
Haïti serait-elle l’éternel souillon de la planète ?
Et d’abord pour ses propres décideurs : politiques, économiques en tête, dont ceux qui une fois après avoir ramassé un gros paquet s’en vont le dilapider en terre étrangère.
Donc pour quelle raison tant Washington que Pékin serait intéressé à notre sort plus que nous le sommes nous-mêmes ?
Cependant aujourd’hui dans la prétendue lutte pour rétablir la paix et la démocratie en Haïti, nos puissances tutélaires (Washington et Ottawa) ont établi une politique de sanctions contre les oligarques (aussi bien politiques que économiques) et frappant en premier lieu leurs possessions en terre étrangère.
Or en agissant ainsi le ‘blanc’ ne serait-il pas en train de couper la branche sur laquelle repose sa propre mainmise sur notre Haïti …
Car quel meilleur prétexte pour laisser Haïti dans son état de poubelle de la planète donc sans aucune influence que ce soit, qu’un comportement aussi irresponsable de la part de ses élites ?
Mais, attention aussi, c’est tant que les richesses détournées en Haïti aboutissent au même endroit.
‘Ayiti se ti poul kay.’
Or justement et si les fameuses sanctions n’avaient pas réellement à voir avec Haïti mais avec ce que deviennent ces richesses une fois sorties de notre pays ?
Pékin est juste la porte à côté aujourd’hui. Et avec lui on fait, dit-on, de bonnes affaires. Et là aussi pour leurs seuls intérêts à nos oligarques.
Mais c’est déjà là un autre dossier !
Marcus Garcia, Haïti en Marche, 31 Mars 2023