Quel rapport entre Clinton et les démolitions dans le centre-ville de Port-au-Prince ?
PORT-AU-PRINCE, 19 Juin – Quel rapport entre Clinton et la démolition du centre-ville de la capitale haïtienne ?
Une rumeur veut que l’opération destruction-expropriation touchant tout un quartier du centre-ville de Port-au-Prince (le Morne-à-Tuf) l’aurait été pour protéger la réputation de l’ex-président Bill Clinton que certains secteurs à Washington accusent de n’avoir rien fait des milliards accordés à Haïti par différents pays (dont les Etats-Unis) pour réparer les dégâts provoqués par le tremblement de terre de janvier 2010.
Ces accusations viendraient du camp Républicain qui n’hésitent devant rien pour contrer la candidature attendue de l’ex-Première Dame et Secrétaire d’Etat Hillary Clinton aux présidentielles de 2016.
Les sondages créditent jusqu’ici Mme Clinton d’une avance confortable, pour commencer dans la course pour la nomination du parti Démocrate.
L’ex-président Bill Clinton a co-présidé avec le premier ministre haïtien (successivement Jean-Max Bellerive, Gary Conille et aujourd’hui Laurent Lamothe) l’organisme CIRH - Commission intérimaire pour la reconstruction d’Haïti.
Cette entité, parallèlement au FRH (Fonds pour la reconstruction d’Haïti), lui aussi alimenté par des capitaux internationaux, aujourd’hui n’existe plus.
Une commission d’enquête Républicaine …
La CIRH a été fermée quelques mois après l’arrivée au pouvoir de Michel Martelly. Le FRH vient également de l’être.
On n’en a jamais donné, explicitement, les raisons. Décisions en haut lieu.
Or selon des rumeurs circulant à Port-au-Prince, une commission engagée par les Républicains aurait conduit une investigation en Haïti sur les résultats des quelque 4 milliards qui auraient été mis à disposition après le grand marathon international qui eut lieu devant l’Assemblée générale des Nations-Unies, à New York, le 31 Mars 2010.
A ce jour, le centre-ville de Port-au-Prince, principal objectif de la Reconstruction, demeure un vaste champ de ruines.
Puis brusquement, il y a trois semaines, le gouvernement ordonna de tout démolir dans un périmètre comprenant au moins une vingtaine de blocs d’habitations reconsolidées par leurs propres propriétaires, petits commerçants, artisans, écoles privées, etc.
La ‘cité administrative’ …
Seule explication : un décret de 1979 reconnaissant l’expropriation pour cause d’utilité publique.
Cette zone est destinée (dans le jargon officiel) à la construction de la ‘cité administrative’ comme avant-garde de la nouvelle capitale à naître après le séisme de 2010.
Puis on apprend que seulement 16% des propriétaires concernés ont été dédommagés …
Les organisations des droits humains viennent à la rescousse, annonçant (vrai ou faux) que ce sont 17 personnes qui ont reçu leur chèque de dédommagement.
Intervention de l’ordre des avocats de la capitale qui demande au gouvernement de stopper les démolitions tandis qu’une commission (légaliste) investigue la conformité des opérations d’expropriation.
Or la loi régissant l’expropriation stipulerait que rien ne peut être accompli tant que toutes les contestations n’aient été épuisées légalement.
A la veille d’élections capitales …
Sur ce, le gouvernement annonce l’ouverture d’une nouvelle entité, le Comité Permanent d’Acquisition, qui invite tous ceux qui estiment avoir des droits à venir présenter leurs doléances.
Pendant qu’en sous-main courent toutes sortes de rumeurs, dont justement l’affaire Clinton. A la vérité la force de ces rumeurs vient de l’absence à ce jour d’aucune explication à ce qui a bien pu pousser le gouvernement à prendre une décision aussi précipitée, et dans laquelle on ne lui voit aucun bénéfice immédiat. Mais au contraire que des ennuis, dont il aurait préféré se passer en ce moment. En effet, se mettre à dos une bonne partie de la population à la veille d’élections capitales (renouvellement des deux tiers du Sénat et de toute la Chambre des députés, toutes les municipales et régionales), cela n’a aucun sens.
Revenons maintenant aux manœuvres washingtoniennes. Tout ce qui peut nuire à la réputation de Bill Clinton est bon pour ralentir la marche de son épouse Hillary vers la Maison Blanche.
De l’autre côté, réveiller le projet de reconstruction du centre-ville de Port-au-Prince est la preuve que ce dossier n’est pas mort comme ont pu le croire les investigateurs envoyés par les stratèges Républicains.
Un jeune avocat haïtien ( ?) …
Voici donc ce qui serait une explication (mais qui n’est pas la seule, d’autres veulent que la capitale haïtienne soit destinée à devenir une sorte de ‘Nations Unies’ de la mondialisation capitaliste avec un secteur destiné à chacun des pays du G7, etc) ou serait-ce une hypothèse entre mille pour tenter d’expliquer la décision aussi brusque qu’inexplicable (et jusqu’à présent inexpliquée) de l’administration Martelly-Lamothe pour raser le quartier du Morne-à-Tuf sans ménagement et sans avoir attendu l’achèvement du processus d’expropriation.
Pourquoi aussi la fermeture (avant que leur mission n’ait été accomplie) des entités CIRH et FRH qui avaient la gestion des fonds internationaux destinés à la reconstruction post-séisme ?
Mais cela nous rappelle aussi tiens, un jeune avocat haïtien très impliqué dans la conjoncture politique et qui, lui aussi sans crier gare, annonçait que l’ex-président Bill Clinton ayant eu à manipuler des fonds destinés à Haïti, doit être convoqué devant les institutions haïtiennes de contrôle (principalement la Cour supérieure des comptes et le Sénat de la République).
Et précisant qu’il avait acheminé sa requête à l’Ambassade des Etats-Unis en Haïti à charge de la faire parvenir à Washington à qui de droit ( ?).
Pour finir, faut-il rappeler que l’influence de l’ex-président Clinton sur le pouvoir en Haïti est grande.
C’était le cas sous le gouvernement précédent du président René Préval.
Tout comme sous le président Michel Martelly dont le premier chef du gouvernement, Gary Conille, avait d’abord été un fonctionnaire de la Fondation Clinton à New York.
Haïti en Marche, 19 Juin 2014