Haïti et la République dominicaine commencent des négociations le 7 janvier
PORT-AU-PRINCE, 19 Décembre – Les autorités dominicaines partent avec un avantage psychologique. Il n’y a rien qu’ils préfèrent que s’asseoir avec leurs homologues haïtiennes plutôt que défendre leur cause devant des instances internationales.
C’est historique. Depuis le dictateur Trujillo, assassiné en 1961 après trente ans de règne sans partage, les gouvernants haïtiens successifs leur ont toujours laissé prendre le dessus.
La corruption des milieux dirigeants haïtiens aidant !
Même après l’assassinat d’environ 20.000 paysans haïtiens à la frontière entre les deux pays en 1937.
Aujourd’hui encore, après le vote par la Cour constitutionnelle dominicaine (à dominante anti-haïtianiste) d’une sentence privant de la nationalité dominicaine tous les descendants d’étrangers établis dans le pays depuis 1929, principalement haïtiens, les autorités de Santo Domingo se voient pratiquement mises en demeure par la communauté internationale (OEA, ONU, Caricom etc) de renoncer à l’application de ce plan, qualifié de ‘discriminatoire’ et même ‘raciste’ …
‘J’embrasse mon rival …’
Rien de plus à propos que de se retourner à nouveau alors vers le voisin Haïtien soudain couvert de toutes les qualités.
Déclaration du président Danilo Medina, mardi (17 décembre), à Caracas (Venezuela), dont le président Nicolas Maduro a offert ses bons offices pour tenter de résoudre le problème : ‘J’ai toujours cru que la République dominicaine et Haïti sont unies jusqu’à ce que la mort nous sépare.’
Racine : ‘J’embrasse mon rival mais c’est pour mieux l’étouffer.’
En effet, seulement la semaine précédente, le gouvernement dominicain refusait de rencontrer celui de Port-au-Prince parce que ce dernier avait crû plus judicieux de porter la question devant la communauté des Etats de la Caraïbe (Caricom) et que celle-ci a condamné vertement la décision des grands juges dominicains.
A quel titre les autorités des deux républiques doivent-elles se rencontrer autour d’une question qui est de la seule compétence dominicaine, comme ces derniers l’avaient brandi hardiment au début ?
Dilemme …
Parce que la meilleure façon de ne pas perdre la face c’est d’inclure le différend actuel, le dilemme créé par la sentence de la Cour constitutionnelle dominicaine, dans un cadre plus vaste de négociations entre les deux Etats se partageant l’île que les Haïtiens appellent Quisqueya (nom indien) et nos voisins Hispaniola.
On ne comprend pas les parlementaires haïtiens qui s’excitent parce que la question de la dénationalisation des Dominicains d’origine haïtienne n’est pas inscrite directement dans l’agenda des entretiens qui commenceront en Haïti le 7 Janvier prochain.
Allons donc ! Elémentaire, mon cher Watson.
Une fois la question transférée dans le seul cadre de l’agenda dominico-haïtien, la charge de la preuve est presque renversée, comme on dit au tribunal, c’est le gouvernement haïtien qui a le plus à perdre. Tradition oblige !
Sauver la face ? …
Alors que ce n’est pas le cas. Les anti-haïtianistes de Santo Domingo se sont laissés pousser on ne sait par quel diable, mais comment le pouvoir exécutif (gouvernement Medina) peut-il renverser une décision de la plus haute instance judiciaire du pays sans faire une moquerie du système démocratique ?
Comment sauver la face ?
Pour l’ancien ambassadeur dominicain en Haïti, Jose Serulle Ramia (bulletin AHP, 15 décembre 2013) : ‘dans le cadre d’un plan de régularisation général de la situation des étrangers vivant dans le territoire dominicain.’
En majorité, des Haïtiens.
Il ne serait pas mauvais d’en profiter en effet pour régler une fois pour toutes le statut migratoire de ces compatriotes qui apportent à l’économie, si performante, de la république voisine, leur force de travail et leur talent.
Pratiques déloyales …
Cependant Haïti, de son côté, ne manque pas de griefs vis à vis de nos voisins qui ont profité de leur avancée économique pour ruiner notre industrie locale, y compris par des procédés de concurrence déloyale (non reconnaissance des marques haïtiennes), ainsi que notre économie en encourageant la contrebande et l’évasion fiscale via le commerce clandestin à la frontière.
Et avec l’encouragement de certaines grandes puissances économiques ! Regardez la pudeur de ces dernières en face de l’actuelle situation.
Outre les pratiques de corruption traditionnelle. Comment expliquer en effet que Haïti soit en pleine reconstruction alors que pas un emploi ne semble être créé ? Ce sont des firmes dominicaines qui ont en majorité les contrats. Dans tout autre pays, ces derniers comprendraient des clauses stipulant nombre d’emplois pour les locaux, la formation des cadres du pays hôte, etc.
Mélodie 103.3 FM, Port-au-Prince