Alors que l'opposition depuis la nomination par le Président a.i. Jocelerme Privert, du Premier Ministre Fritz-Alphonse Jean, ne cesse de clamer dans les médias l'illégalité de cette nomination en raison notamment de l'absence d'un Président au Sénat, se basant sur l'article Article 137 de la Constitution (amendée) qui stipule « [...] le Président de la République choisit son Premier Ministre en consultation avec le Président du Sénat et celui de la Chambre des députés » le Président a.i. Privert tient a rétablir les faits suivants :

« Le Président Jocelerme Privert a consulté les présidents du Sénat et de la Chambre des Députés. Les rencontres ont eu lieu au Palais National et ont abouti à la nomination du Premier ministre Fritz-Alphonse JEAN.

Le Président du Sénat, l'a été par le truchement du vice-Président Ronald Lâreche exerçant toutes les attributions du Président, conformément au règlement intérieur du Sénat ; la suppléance étant une exception universellement admise à l'exercice 'ratione personae' des compétences.

En effet, l'Article 147 du Règlement intérieur du Sénat (Moniteur spécial du mercredi 12 août 2009 stipule 'Le vice-Président est la seconde autorité hiérarchique du Bureau. À ce titre, il accomplit toutes fonctions déléguées par le Président du Bureau, conformément à l'article 141 et, en son absence, il exerce toutes les attributions de ce dernier'.

C'est d'ailleurs en ce sens, qu'à la fin du mandat du Président du Sénat en janvier 2015, Simon Dieuseul Desras, le Sénateur Andris Riche, alors vice-président, a exercé toutes les attributions du président pendant une période d'un an. Il a procédé, en cette qualité, à l'admission des nouveaux sénateurs en janvier 2016.

Les compétences du Président du Sénat peuvent donc s'exercer pour le moment et l'article 137 de la Constitution peut s'appliquer avant l'élection au Sénat d'un nouveau Président, » conclu le Chef de l'État a

ACCORD DU 5 FEVRIER 2016 POUR LA CONTINUITE INSTITUTIONNELLE: BILAN ET PERSPECTIVES

L'accord du 5 février 2016 pour la continuité institutionnelle a occasionné l'accession de Jocelerme PRIVERT à la présidence de la République aux fins d'assurer la continuité institutionnelle, conformément à l'article 136 de la constitution de 1987 amendée, sur laquelle il a d'ailleurs prêté serment, et de compléter le processus électoral entamé au cours de l'année 2015. Le Parlement, partie de l'accord, a également des obligations qui doivent être assurées dans le délai imparti. Signé par les présidents des deux chambres, le Parlement a confirmé, si besoin était, son adhésion à l'accord en procédant de façon quasi unanime à l'élection du 13 février 2016.

En plus de ses obligations d'appliquer des actions spécifiques dans les délais mentionnés, le Président Privert ne peut se départir d'exercer les attributions qui lui sont confiées par le Constitution, surtout quand une des parties de l'accord se révélerait défaillant quant au respect des délais prévus. Des mesures peuvent donc lui être imposées à titre unilatéral quant au calendrier aménagé par l'accord dans le respect de la Constitution.

I. BILAN DE LA MISE EN ŒUVRE DE L'ACCORD DU 5 FEVRIER 2016

Plusieurs étapes relatives à la mise en œuvre de l'Accord pour la continuité institutionnelle ont déjà été franchies :

  1. Le Président Martelly a laissé le pouvoir le 7 février 2016 et le Gouvernement devrait rester en place pour expédier les affaires courantes jusqu'à la prise de fonction du nouveau Gouvernement (le Premier ministre Evans PAUL a toutefois, de manière solennelle, annoncé son départ de la Primature et de ses fonctions);
  2. Le vide au niveau de l'exécutif a été constaté et les élections du Président provisoire ont été organisées par l'Assemblée nationale conformément à l'accord ;
  3. Le Président provisoire élu, Joceleerme PRIVERT, a prêté serment sur la Constitution de 1987amendée et exerce ses fonctions depuis le 14 février 2016 ;
  4. Les consultations avec les partis politiques représentés au Parlement et la société civile pour recueillir des propositions de noms de personnalités ayant les compétences pour exercer la fonction de Premier Ministre ont été entreprises par le Président provisoire;
  5. Les lettres du Président Provisoire aux différents secteurs ayant délégué des représentants au précédent Conseil électoral provisoire aux fins de confirmer ou de désigner de nouveaux membres ont été adressés. Les réponses ont été obtenues de la part de tous les secteurs et les neuf membres du Conseil électoral provisoire sont en attente de nomination. Il est à noter que cette nomination doit avoir lieu en Conseil des ministres et sera effectuée à la prise en fonction du Gouvernement;
  6. La consultation avec les Présidents des deux chambres autour du choix du Premier Ministre a été complétée le 25 Février 2016. Le Premier ministre Fritz-Alphonse JEAN a été nommé, investi et est en attente d'installation à la Primature;
  7. Le Premier ministre a soumis ses pièces au Parlement aux fins d'obtenir la confirmation de son éligibilité et d'être formellement invité à se présenter en séance plénière pour recevoir le vote de confiance sur sa déclaration de politique générale;
  8. Le gouvernement du Premier ministre est constitué.

La poursuite de la mise en œuvre de l'Accord pour la continuité institutionnelle revient actuellement au Parlement qui doit :

  1. Confirmer l'éligibilité du Premier ministre Fritz-Alphonse JEAN;
  2. Inviter le Premier ministre en séance plénière afin de lui accorder le vote de confiance sur sa déclaration de politique générale.

La situation au Parlement présente néanmoins quelques signes d'inquiétudes susceptibles d'être néfastes pour la poursuite de la mise en œuvre de l'Accord.

- Au Sénat, les pairs conscrits se sont révélés incapables d'organiser depuis plusieurs semaines une séance pour élire le Président du Senat. Les sénateurs estiment cette étape fondamentale et préalable à toute activité se rapportant à la confirmation de l'éligibilité du Premier ministre et le vote de confiance sur sa déclaration de politique générale.

- A la Chambre des députés, les invitations formelles ne sont pas encore lancées en vue de la réception du Premier ministre.

La mise en œuvre l'Accord est alors dans l'impasse compte tenu du fait surtout que tout doit être fait de manière célère ; tout retard accumulé étant préjudiciable pour les délais prévus.

II. PERSPECTIVES POUR LA MISE EN ŒUVRE DE L'ACCORD

La poursuite du processus électoral entamé au cours de l'année 2015 est fondamentale pour le retour à l'ordre constitutionnel normal dans le pays. Elle ne peut pas correctement s'opérer si d'autres fondamentales dans la mise en œuvre de l'Accord pour la continuité institutionnelle ne sont pas franchies rapidement. Il s'agit notamment de :

  1. L'installation du Premier ministre et des membres de son Gouvernement ;
  2. La nomination et l'entrée en fonction des membres du Conseil électoral provisoire ;
  3. L'évaluation des étapes déjà franchies dans le processus électoral et la mise en application des recommandations de la Commission d'évaluation électorale;
  4. La finalisation et la proclamation des résultats des élections municipales;
  5. L'organisation du deuxième tour de l'élection présidentielle et du deuxième tour des législatives partielles;
  6. La proclamation des résultats définitifs;
  7. La prestation de serment et l'entrée en fonction du Président élu de la République.

A tout cela, il faut ajouter la nécessité d'assurer la gouvernance normale de la République. La gestion des problèmes divers auxquels le pays est confronté doivent être assurée par un Gouvernement en charge réelle. Le calme apparent retrouvé dans les rues avec l'accession du Président Privert à la présidence risque de s'effriter rapidement si l'incertitude persiste. Des signes inquiétants se font déjà sentir.

En vertu du principe de l'"exceptio non adimpleti contractus", la défaillance d'une des parties devant exécuter des taches dans la mise en œuvre de l'Accord ne peut départir le Président Privert des obligations qui lui incombent. En se basant sur les prérogatives qui lui sont reconnues par la Constitution de 1987 amendée, sur laquelle il a d'ailleurs prêté serment, il peut procéder à l'installation du Premier ministre et des membres de son Gouvernement pour continuer la mise en œuvre de l'Accord et conséquemment doter le pays de dirigeants légitimement élus ; il demeure que le Premier ministre et les membres du Gouvernement resteront à la disposition du Parlement pour le vote de confiance de la déclaration de politique générale du Premier ministre au moment où les parlementaires le jugeront nécessaires.

CONCLUSION

Plusieurs étapes fondamentales dans la mise en œuvre de l'Accord pour la continuité institutionnelle ont déjà été franchies. Une relative sérénité a été retrouvée dans la vie politique nationale.

L'attente du Président provisoire de l'invitation du Parlement pour la confirmation de l'éligibilité du Premier ministre et le vote de confiance de sa déclaration de politique générale ne doit pas être indéfinie. Une trop longe attente risque d'ailleurs d'engouffrer le pays dans une crise encore plus profonde que celle qu'elle a connue d'aout 2015 à février 2016. Le président Privert devrait donc, conformément à la Constitution de 1987 amendée, dans un délai raisonnable, au plus tard le 14 mars 2016, procéder à l'installation du Premier ministre et des membres de son Gouvernement aux fins de relancer le processus électoral et d'assurer la gouvernance normale du pays en attendant que le Parlement approuve la déclaration de politique générale du Premier ministre.