Hausse d’impôts indirects, augmentations des transferts et subventions, croissance des salaires et traitements, contraction des dépenses d’investissements, réduction du financement du trésor public : voilà la vision qui est clairement dégagée dans le texte de loi de finances 2017-2018 qui rentrera, probablement, en vigueur dès ce 1er octobre 2018.



Par rapport au projet de loi initial estimé à 144,2 milliards de gourdes, le rectificatif, qui n’a pas subi une trop grande modification suite aux examens entamés par les parlementaires et aux discussions houleuses tenus mercredi 5 septembre au sénat, a lui connu une croissance de 1 %. Son enveloppe totale est donc estimée à 145,6 milliards de gourdes.
Kesner Pharel, selon qui le budget est, avant tout, un instrument politique permettant au gouvernement d’appliquer ses programmes et de concrétiser ses objectifs, fait tomber les masques et tente de dégager la vision qui est cachée derrière ce texte, voté au niveau des deux chambres « sans trop de bruit », sans de réelles discussions sur les besoins urgents de la population à risque, alors que c’est ce budget qui entrera en vigueur à partir du 1er octobre 2018. 

« Pire, le texte ne reflète pas la réalité de l’émeute du 6-7 juillet derniers, va même à l’encontre des promesses du chef de l’État qui a promis de réduire les dépenses non-essentielles et d’augmenter les dépenses sociales », affirme l’économiste dans un long entretien accordé à Roberson Alphonse.
En effet, plusieurs lignes budgétaires ont subi une hausse importante, constate l’économiste. Les dépenses effectuées pour les Biens et services sont passées de 20,3 milliards de gourdes à 25, 5 milliards de gourdes. Les Salaires et traitements sont augmentés de 4,3 %, passant de 40, 2 à 41, 9 milliards de gourdes.

Les Transferts et subventions augmentent aussi de 33.4 %, passant de 9,9 à 13,2 milliards de gourdes.  Et ce sont les parlementaires qui sortent grands bénéficiaires de ces deux lignes, le budget du sénat étant augmenté de 200 millions de gourdes.

Les impôts indirects ont augmenté de 2 milliards, passant de 47, 352, 000 à 65, 319, 000 de gourdes.  Près de 70% de ce que représente le poids des ressources domestiques (ressources provenant des organes internes de l’État : DGI, Douane et autres institutions publiques) seront destinés aux dépenses courantes alors que le trésor public a besoin de ressources pour financer des projets sociaux, indique Kesner Pharel dans son analyse.  « Le Parlement décide, au niveau des sorties, d’augmenter les dépenses pour subventions et transferts et de réduire le financement du trésor public ».

C’est l’international qui réalisera plus de 80 % de ces projets sociaux. « Toutes nos taxes vont passer dans les dépenses de fonctionnement et non dans les investissements. Cela n’aide pas la population. C’est elle qui paiera les pots cassés », ajoute-t-il.

À regarder les fondamentaux du texte, ce sont quasiment les mêmes données chiffrées du document initial qui réapparaissent dans celui rectifié. Et ces chiffres illustrent, de manière visible, une augmentation du train de vie de l’appareil étatique. Kesner Pharel déclare que, durant cette dernière décennie, le budget de l’Etat en termes de ressources internes a considérable augmenté. En 2010, les recettes de l’Etat étaient de l’ordre de 36 milliards de gourdes contre 94 milliards en 2018 et 125 milliards prévues dans le projet de budget pour l’exercice fiscal 2018-2019, rentré par l'exécutif suite aux émeutes du 6-7-8 juillet. 

Malgré cette augmentation des ressources, la situation économique du pays a tendance à se détériorer davantage en raison du fait que les budgets ont toujours été marqués par de fortes allocations pour les dépenses de fonctionnement laissant à la traîne celles destinées aux investissements.