JACMEL, 9 Novembre – Soudain le pays réel semble avoir pris ses distances à la fois du pouvoir ainsi que de l’opposition.
Un pouvoir nul et impuissant et une opposition trop divisée et dispersée dans ses composantes.
Depuis une semaine les activités normales tentent de reprendre aussi bien à la capitale que dans les autres grandes villes.
Les mieux nantis retrouvent le chemin de leurs activités quotidiennes au volant de leur voiture, traversant les restes de barricades enflammées qui jonchent encore les rues, tandis que le petit peuple tente de re-trouver à boire et à manger.
On a l’impression d’un pays normal, sauf que à certains points chauds à Port-au-Prince (Bel-Air, au bord de mer etc), des civils armés continuent de faire la loi.
En gros le pays s’efforce de fonctionner après deux mois de ‘pays lock-ed’, surnom de l’opération menée par l’opposition politique pour déraciner un président prêt à tout pour rester dans son fauteuil.
Concrètement parlant, Haïti n’a donc pas besoin d’un président pour fonctionner puisque l’actuel tenant du poste dessert bien davantage qu’il ne sert, en un mot ne sert proprement à rien,.
Cependant après deux mois sinon bien plus à infliger ce traitement à la population, l’opposition n’a abouti elle non plus à rien de concret.
Qui pis est, les vieilles luttes intestines menacent de ressurgir immanquablement dès qu’il s’agit de formuler une éventuelle succession au pouvoir en place.
Conclusion : le pays est obligé de fonctionner pour le moment sans un pouvoir effectif mais sans pouvoir suivre non plus l’opposition.
Mais ce serait trop beau parce qu’il y a un troisième acteur, ce sont les gangs qui tiennent le pays en otage, mettent les forces publiques en déroute et peuvent tout bloquer à nouveau à tout moment.
Donc il faut le désarmement de ces groupes toutes affaires cessantes.

 

Les gangs ne sont que la face émergée de l’iceberg …
Qui va s’en charger ? La nouvelle mission des Nations Unies (BINUH) dont la question des gangs armés entre aussi dans ses considérations.
Cependant les missions précédentes (Minustah, Minujusth …) s’en étaient également occupées.
Et le résultat c’est une aggravation du problème. Autrefois limités à quelques quartiers populaires comme Cité Soleil ou La Saline, aujourd’hui les groupes armés recouvrent tout le territoire de la République, sont mieux armés que les unités dites spécialisées de la Police nationale, régissent la population comme bon leur semble en dévalisant les transporteurs de marchandises, rançonnant les passagers, enfin tuant à tort et à travers.
Outre leurs règlements de compte donnant lieu à cet horrible spectacle sur les réseaux sociaux de têtes coupées exposées sous les caméras.
Pourquoi même les missions onusiennes de maintien de la paix n’ont pas su vaincre les gangs ?
Réponse : c’est parce que les gangs ne sont que la face émergée de l’iceberg. Le problème est plus profond.

Ce qu’on appelait dans le monde de la pègre : le MILIEU …
Nous sommes en face d’un ensemble complexe formé de groupes armés mais au service de puissances politiques et économiques pour exécuter leur sale besogne.
Ce qu’on appelait dans le monde de la pègre : le MILIEU.
Ce ne sont bien entendu pas les petits voyous qui importent les cargaisons d’armes qui tuent et tiennent tout le pays sous contrôle.
Par conséquent il ne suffit pas de faire taire les armes pour quelques mois, comme cela l’a été avec les précédentes missions des Nations Unies.
Il faut couper la tête de l’hydre à sept têtes.
Il faut s’attaquer au MILIEU.
Par exemple, vous aurez remarqué que Jovenel Moïse a lancé une campagne contre le SYSTEME, mais non contre le MILIEU ???
Le président a précisé qu’il veut mettre fin au SYSTEME, précisant qu’il s’agit-là des ‘héritiers et gardiens’ d’une classe qui s’est enrichie au détriment de la grande majorité dont le sort ne s’est jamais amélioré.
Il cite même à ce sujet le fondateur de la Patrie, Jean Jacques Dessalines, qui a été assassiné au Pont Rouge, à l’entrée nord de Port-au-Prince dans le cadre d’un complot ourdi par les élites en majorité à peau claire.
Par contre Jovenel Moïse est un adepte du MILIEU.
La campagne de Jovenel Moïse a été financée par le MILIEU. C’est-à-dire un conglomérat de puissances politiques et de majestés financières avec pour bras armé : les GANGS.
Comme dans le film Godfather, les sénateurs qui doivent leur poste à Don Corleone.
C’est aussi là une conséquence de la disparition des Forces armées d’Haïti … mais sans une formule de substitution.
Probablement que la bataille que le président dit actuellement mener contre le SYSTEME vient que ce dernier ne soit pas entièrement inféodé au MILIEU.
Nous voici donc devant une cosmogonie très complexe et qu’il s’agit d’abattre si nous voulons retrouver un jour en Haïti une vie normale comme partout ailleurs.
Et MILIEU qui tire aussi sa puissance … en nous dressant les uns contre les autres.
Comme essaye actuellement de le faire Jovenel Moïse.

Marcus-Haïti en Marche, 9 Novembre 2019