Information n’est pas propagande ni propagande information !
JACMEL, 7 Septembre – L’une des stratégies les plus intelligentes du gouvernement du premier ministre Laurent Lamothe est la tenue régulière du Conseil de Gouvernement.
Le mercredi 3 septembre écoulé avait lieu le 38e du genre, qui a été consacré principalement à la rentrée des classes ce 8 septembre.
La tenue sur une base constante du conseil de gouvernement ne permet pas seulement au gouvernement de dire au pays ce qu’il entend lui faire entendre, et de la seule manière dont il veut le lui faire entendre, mais (et c’est le plus important) cela lui permet d’éviter de rendre compte à la nation par le jeu démocratique c’est-à-dire où le gouvernement n’a pas lui-même la direction des opérations. Et il y a deux façons de le faire c’est lors des convocations devant le Parlement d’une part et d’autre part, par les conférences de presse.
Quelle est la dernière fois que le premier ministre Lamothe a répondu à une convocation au Parlement ?
Devant le Sénat pratiquement jamais, tandis que la dernière fois devant la chambre des Députés c’était à circuit fermé ! Le gouvernement dispose d’une majorité à la chambre basse.
Un contrôle total …
Quant aux conférences de presse, ni le président Michel Martelly ni le premier ministre Lamothe n’en sont friands …
Quant à ce dernier, plus frileusement encore, il a installé un dispositif à la Primature même, d’où ministres et hauts cadres de l’administration tiennent leur rendez vous avec la presse. Ce qui permet un contrôle total du processus.
Tandis que l’on a droit à au moins deux conseils de gouvernement par mois.
Ceci ajouté à l’émission ‘Gouvènman an lakay ou’, plateforme inventée et dirigée par le premier ministre en personne, finalement le chef du gouvernement d’Haïti maintient le monopole de l’information officielle sous son étroit contrôle.
Ainsi bien entendu que toute la machine de propagande.
Information = opposition …
Dès lors plus de différence entre les deux. Pour le gouvernement, information et propagande ne font plus qu’un.
L’information négative – celle qui dérange (comme la hausse actuelle de la criminalité ou la chute encore plus vertigineuse du pouvoir d’achat en cette veille de la rentrée) est passée presque sous silence.
Qui plus est, toute information véritable, celle diffusée par les médias qui ne sont pas sous la coupe du pouvoir, est considérée comme de l’opposition.
Finalement tout média indépendant est considéré par l’actuel pouvoir comme un organe d’opposition.
Aussi les chocs sont-ils fréquents entre le pouvoir et la presse. Suivez mon regard !
On se retrouve comme sous le régime de dictature de Jean Claude Duvalier.
Mais avec un avantage pour le pouvoir Martelly-Lamothe qu’on est supposé être en démocratie.
Nous nous expliquons. Sous la dictature l’information a beaucoup plus de valeur étant donné qu’elle est interdite.
Tandis que toute la stratégie du pouvoir actuel consiste à banaliser l’information, à casser son influence.
Soit par l’ironie mordante déployée à l’occasion par le chef de l’Etat - quand ses barbouzes ne prennent pas eux-mêmes la question en mains, dressant une barrière inexpugnable entre le président et les journalistes, entre le chef de l’Etat et l’opinion publique nationale !
Soit par les multiples artifices utilisés par le chef du gouvernement et ses nombreux ‘experts’ en communications.
Auto-satisfaction ! …
Le dernier conseil de gouvernement a été lumineux à cet égard. Consacré principalement à la rentrée scolaire, le ministre de l’Education a eu licence totale pour exposer ses plans et projets sans être dérangé. Comme si une seule personne pouvait avoir le monopole sur l’éducation pour toute une nation, comme le ministre lui-même devrait s’en rendre compte en intellectuel patenté et nationaliste par tradition familiale. Un long monologue ininterrompu, sinon par les gloussements de satisfaction du chef du gouvernement. Satisfaction. Auto-satisfaction ! C’est le signe particulier de ce gouvernement. Dehors les gens font face à une pauvreté abominable et généralisée, aucune catégorie sociale n’est épargnée, or à l’écoute des conseils de gouvernement et du ‘Gouvènman an lakay ou’, tout va bien madame la marquise !
Attention, messieurs-dames, que vous ne commenciez à prendre vos désirs pour la réalité !
Haïti en Marche, 7 Septembre 2014