Santo-Domingo reconnaît Pékin et abandonne Taiwan : Conséquences pour Haïti ?
MIAMI, 2 Mai – Nouvelle déception pour Taïwan. L’année dernière c’était déjà le Panama, cette fois c’est la République dominicaine, notre voisine, qui passe dans le camp diplomatique de Pékin, provoquant l’indignation de sa rivale et petite sœur ennemie, la République de Taïwan, dont la grande Chine continue de réclamer le droit de possession.
La nouvelle a éclaté mardi (1er mai) : ‘La République dominicaine a établi des relations diplomatiques avec la Chine populaire, Pékin arrachant ainsi un autre allié à Taïwan, qui ne peut compter désormais que sur la reconnaissance de moins d’une vingtaine de pays à la surface du globe,’ dont la République d’Haïti.
‘L’accord apportera d’énormes opportunités au développement de la République dominicaine’, s’est félicité le ministre chinois Wang Yi, évoquant un nouvel élan des relations entre la Chine et l’Amérique latine.
Comme on sait, les deux rivaux ne se tolèrent pas dans le même pays (comme dit un proverbe haïtien : ‘Deux bourriques ne braient pas dans les mêmes pâturages’), la reconnaissance de la Chine signifie automatiquement que Santo-Domingo rompt officiellement avec Taïwan. Et qui pis est, nie l’existence même de la République de Taïwan.
‘La République dominicaine reconnaît qu’il n’y a qu’une seule Chine et que Taïwan est une partie inaliénable du territoire chinois’, a précisé à Santo Domingo le gouvernement du président Danilo Medina (bulletin AFP). Un préalable imposé par Pékin à tout Etat établissant des relations avec lui.
En échange, le pays financièrement le plus riche aujourd’hui de la terre est prêt à vous ouvrir largement son escarcelle.
Des offres de prêts de plus de 3.000 milliards …
Taipeh (la capitale de Taïwan) dit regretter ‘profondément’ la décision de Santo Domingo, rompant aussitôt ses relations avec lui et mettant fin à tous ses programmes d’aide et de coopération, a annoncé le ministre taïwanais des Affaires étrangères, Joseph Wu.
Selon des sources contactées par l’Agence haïtienne de presse (AHP), la Chine a agité des offres de prêts de plus de 3.000 milliards de dollars, dont 220 millions pour la construction de logements sociaux, 400 millions pour des autoroutes, 1 milliard 600 millions consacrés aux chemins de fer, 300 millions pour un système de gaz naturel, 350 millions dans une centrale électrique etc.
La main d’œuvre haïtienne …
Evidemment ces chiffres ne laissent pas indifférente l’autre partie de l’île, la République d’Haïti.
Si Port-au-Prince reste fidèle à ses relations avec Taipeh, par contre on peut d’ores et déjà prévoir que si les promesses de Pékin à la République dominicaine voient le jour, ce sont plusieurs milliers supplémentaires de compatriotes qui vont partir travailler de l’autre côté de la frontière où leur force de travail sera nécessaire pour la réalisation des projets de développement annoncés.
Comme cela a toujours été le cas à chaque important tournant dans le développement économique chez nos voisins qui, de par leur habileté à saisir les bonnes opportunités, bénéficient aujourd’hui du meilleur taux de croissance économique dans la région.
Malgré que ces dernières années, un mouvement ultranationaliste eut poussé jusqu’à supprimer la nationalité dominicaine qui était automatiquement attribuée aux enfants nés de parents haïtiens.
Cependant que ce soit dans l’industrie sucrière, ou plus récemment le développement du tourisme ainsi que dans la construction des nouvelles infrastructures, comme la ligne de métro de Santo Domingo, la main d’œuvre haïtienne a toujours été incontournable.
A seulement 1 heure 40 minutes de Miami …
Mais ce n’est pas tout. Le principal objectif de la Chine, nouvelle superpuissance industrielle et commerciale, c’est de s’approcher des rives de l’Amérique du Nord qui reste le meilleur marché pour ses produits.
Aussi la République dominicaine est appelée à devenir une sorte de port de transit pour la production chinoise - à seulement 1 heure 40 minutes de la Floride.
Déjà le port de Puerto Plata - qui accommode aussi les productions du parc industriel de Caracol (NE d’Haïti), joue ce rôle.
On peut donc prévoir aussi un grand développement de l’autre côté de notre frontière dans le domaine des industries d’assemblage.
Un autre domaine où nos ouvriers (et surtout nos ouvrières) se sont révélés efficaces.
Mais il est aussi presque certain qu’une majorité des patrons haïtiens (qui n’ont jamais brillé par un très grand attachement à la cause nationale !) n’attendront pas bien longtemps eux aussi pour plier bagages comme on dit vers des cieux plus cléments.
Voilà donc quelques prévisions qui peuvent se dégager d’ores et déjà de cet important tournant de l’actualité économique régionale que constitue le débarquement avec armes et bagages de la Grande Chine chez nos voisins Dominicains.
Bien entendu, cela sera ainsi tant qu’il existera une différence abyssale entre la situation économique des deux côtés de l’île.
Mélodie 103.3 FM, Port-au-Prince