Mais qu’est-ce qui a bien pu déclencher cette colère du Premier ministre, de la Ministre lutant contre la pauvreté extrême et du Ministre du Commerce au 23ème Conseil de Cabinet ministériel, tenu à la Primature le mercredi 4 Décembre ? Le thème en était la lutte contre la pauvreté extrême par l’augmentation de la production agricole … Alors que tout semblait se dérouler selon les normes, tout à coup arrive sur le tapis cette réflexion faite dans l’après midi par l’Envoyée spéciale de la Banque mondiale en Haïti qui recevait la presse à déjeuner quelques heures auparavant au local de la Banque Mondiale. Le sujet de la rencontre était : La Banque mondiale en Haïti : Programme, résultats et perspective tels que présenté par Mary Barton-Dock six mois après sa prise de fonction. Il ne s’agissait pas d’une conférence de presse mais d’un déjeuner de réflexion-échange pour donner la possibilité aux journalistes de poser des questions. Il nous avait été demandé de ne pas enregistrer et de ne pas filmer . Pourquoi ? Sans doute pour donner un caractère plus intime à la rencontre. Mais il y a eu des retardataires à la rencontre et ils se sont mis à filmer et à enregistrer et aussitôt, tout le monde a suivi, car après tout, quand on invite des journalistes, c’est pour leur permettre de rendre compte à leur public de ce qui va se dire. Et tout avait commencé sur un ton que nous pourrions même qualifier de très flatteur pour l’équipe au pouvoir. Mary Barton-Dock en effet a fait remarquer les progrès réalisés pendant cette période de 3 ans, ayant suivi le tremblement de terre. 90 % des déplacés ont pu quitter les camps. Ce gouvernement a une politique de logement qui n’a jamais existé dans le pays. Côté éducation, beaucoup d’écoles ont été reconstruites et l’accès à l’école primaire est devenu gratuit pour une grande partie des enfants. Le pays connaît une croissance de 4 % Le Taux d’inflation a atteint un niveau de 4.5 %... Il est aussi question du choléra et des efforts de la Banque mondiale en vue de son élimination. Mais le grand défi est que nous n’aurons pas un portefeuille pareil pour la prochaine année fiscale. A dit l’Envoyée spéciale Pourtant les efforts vont continuer : Développer la répartition du courant électrique à travers le pays. Fournir une assistance technique au gouvernement pour l’établissement d’un compte unique pour le trésor public, Actuellement il y a plus de 500 comptes et cela ne marche pas quand on veut davantage de transparence. Et là elle souligne pour les journalistes présents que la presse a un rôle à jouer pour la gestion des finances publiques. J’espère que vous allez utiliser ce rôle, dit elle, car les organismes de financement sont dans une position délicate, ce qui les empêche de le faire comme ils le voudraient. La presse invitée à prendre la parole commence avec ses questions : Vous avez dit que la politique du logement a été innovatrice En quoi a t-elle consisté ? Le cap est mis sur le choléra et la lutte pour dédommager les victimes de cette épidémie. Est-ce que la Banque mondiale compte soutenir la démarche haïtienne réclamant un dédommagement des victimes : ? Et les réponses suivent : Sous les gouvernements précédents il n’y avait pas de standards pour la construction des logements . L’on fait maintenant très attention. Concernant la lutte contre le choléra, La Banque Mondiale compte travailler à améliorer l’accès à l’eau potable de la population. Le SFI a continuer à supporter les projets créateurs d’emploi et continuer à encourager l’investissement rentable dans le pays . ( type CODEVI, E=Power) « Nous travaillons avec le secteur bancaire en Haïti pour fournir les crédits à la population. Il est aussi question de projets touristiques : la Banque va apporter un appui important pour les travaux de la Citadelle et ceux de la ville du cap. Nous avons aussi un projet dans le Plateau Central. Celui d’améliorer l’accessibilité des petits producteurs à des marchés. Puis arrive la question concernant l ‘EdH Il est question d’amélioration de la performance de l’EdH, de la mise en place de la transparence dans l’utilisation de l’électricité par les grandes entreprises. Il faut une facturation plus efficace et une sensible amélioration du système de paiement. La Banque Mondiale a financé l’établissement de lampes solaires dans les zones où elle finance des projets mais ne peut rien dire quand ces lampes solaires tombent en panne et ne sont pas remplacés dans d’autres zones où elle n’a pas eu à intervenir. « Nous invitons le gouvernement à faire l’entretien des investissements. Nous ne ratons pas une occasion de le leur dire. On arrive alors au critère de la transparence. Chaque fois qu’il y a un nouveau projet , on ouvre un compte. Nouveau projet, nouveau compte. On en arrive à plus de 500 comptes et vous conviendrez qu’il est difficile de suivre 500 comptes. Voici pourquoi nous avons demandé au gouvernement l’établissement d’un compte Unique pour l’état. . Et là se situe l’intervention du journaliste de Magic FM le très bouillant Robertson Alphonse et concernant les 500 millions de dollars consentis par la Banque Mondiale après le tremblement de terre. Une subvention a été entre autre accordée à E-Power . E-Power a une situation bordelique reconnaît-il et la situation électrique dans le pays est ce qu’elle est aujourd’hui La réponse de Mary Barton-Dock : Nous sommes plus ou moins d’accord avec ce que vous dites mais nous pensons qu’avec un changement de stratégie, une facturation nouvelle, cela va changer les choses Un échec de l’investissement e E-Power serait un échec du pays. On en arrive à la phrase de l’Envoyée spéciale qui a provoqué une telle colère chez le premier ministre et chez d’autres membres du gouvernement : Il faut utiliser de façon plus sage les fonds de Petro Caribe. Est-ce que vous pensez qu’il y a des dépenses qui ne sont pas sages veut savoir un journalistes ? Il faut davantage de transparence dit l’Envoyée spéciale qui ajoute : Le gouvernement a amené ce financement de Petro caribe au sein du budget mais sans fournir de détails. Quand les investissements ne sont pas faits avec des appels d’offres, leur contrôle s’avère difficile. Ce sont donc ces dernières réflexions qui ont provoqué quelques heures plus tard à la 24 ème réunion du cabinet ministériel un véritable tollé. La Banque Mondiale a dit le Premier Ministre n’a jamais demandé des explications sur l’utilisation des fonds Petro Caribe. Si elle l’avait fait, nous les aurons fourni. Et le Premier Ministre annonce même qu’il va demander une rencontre avec le président de la Banque Mondiale, tandis que le ministre des finances décide de donner dès le lendemain ( ce serait-donc aujourd’hui jeudi) une conférence de presse pour faire le jour sur ces réflexions désobligeantes de l’Envoyée spéciale d’’une institution telle que la Banque Mondiale. Voilà en vrac ce qui a été dit lors de ce déjeuner de presse du mercredi 4 décembre qui fera certainement date dans l’histoire de la Banque Mondiale. Il paraît que c’était pour la première fois que la Banque Mondiale avait invité la presse, en soulignant qu’il ne s’agissait pas d’une conférence de presse mais plutôt d’une rencontre réflexions avec la presse. Rencontre riche, très riche en retombées et cela peut être ne fait que commencer.