Charlotte Charles, la reine des masques en papier maché à Jacmel
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Son travail très caractéristique et reconnaissable entre mille est apprécié de beaucoup de consommateurs d’arts.
Le carnaval de Jacmel, c’est avant tout ces masques, mais aussi les artisans qui les confectionnent. L’une des plus connues est Charlotte Charles. Nous la retrouvons ce jour-là dans son petit atelier, à quelques mètres de la rue Barranquilla qui reçoit les activités, Charlotte Charles peint ce qui ressemble à une tête d’éléphant. La célèbre artisane est assise sur une chaise en paille. Les cheveux attachés au-dessus de sa tête dans un chignon, elle se remémore son parcours, depuis ses débuts.
Charlotte Charles est née le 15 novembre 1970, à Jacmel. Son grand-père, se souvient-elle, déchargeait les bateaux qui accostaient dans le port de Jacmel. « Ils transportaient du safran, des épices, de l’alcool, etc. Mon père aussi a travaillé dans les bateaux à une époque. Aujourd’hui tout cela ne se fait plus », confie-t-elle, un brin nostalgique.
Charlotte Charles n’est pas restée uniquement à Jacmel. Comme beaucoup d’autres jeunes de son âge, ses parents l’envoient à Port-au-Prince afin de poursuivre ses études secondaires. C’est là qu’elle rencontre celui qu’elle pensait être l’amour de sa vie : le père de sa seule et unique enfant.
« J’avais dix-neuf ans, je ne savais même pas que j’étais enceinte. Ce n’est pas comme aujourd’hui où on est plus au courant sur les règles, etc. C’est lui qui a compris que j’étais enceinte. Il est allé en informer ma sœur avec qui je vivais à la capitale ». Mais le père de l’enfant veut qu’elle avorte. Charles refuse. « Alors il est parti et j’ai pris soin de ma fille seule, confie avec émotion la créatrice, en peignant. Cette expérience m’a tellement traumatisée que je n’ai plus jamais voulu avoir d’autres enfants ».
Son travail très caractéristique et reconnaissable entre mille est apprécié de beaucoup de consommateurs d’arts. Plusieurs hôtels comptent parmi leurs décorations les têtes d’animaux qu’elle propose. Des particuliers achètent chez elle afin de décorer les murs de leurs maisons. L’artiste Kebert Bastien, dit Keb, a découvert par hasard le travail de Charlotte Charles, alors qu’il se promenait dans les rues de Jacmel.
Mais aujourd’hui, l’atelier de Charles, active depuis 2006, n’est plus ce qu’il était. La crise politique, exacerbée par les dernières années d’instabilité et l’insécurité ont affecté son commerce. Sans compter le Covid-19, qui a causé le départ d’une bonne partie de sa clientèle, tant locale qu’internationale.
Malgré les promesses de commandes de quelques particuliers, Charlotte Charles craint de devoir bientôt fermer son atelier si la situation ne s’améliore pas.