P-au-P, 15 juin 2012 [AlterPresse] --- Médecins sans frontière (Msf) déplore la défaillance du système de surveillance de l’épidémie du choléra qui ne favorise pas la mise en œuvre d’une action précoce en réponse à la maladie, lors d’une rencontre le 14 juin avec la presse.
Selon la directrice des opérations de Médecins sans frontières (Msf) France, Marie-Noëlle Rodrigue, « les chiffres [concernant la maladie] sont incomplets et peu fiables ».
Le nombre de cas rapportés par semaine ou par jour au niveau de l’Organisation mondiale de la santé (Oms) et de toutes les structures de Msf concernant la prise en charge des patients sont un peu différents, constate-t-elle, faisant remarquer la difficulté de pouvoir adapter la réponse au choléra aux endroits les plus stratégiques.
L’importance de la coordination entre les acteurs concernés par rapport à la réponse au choléra dépend de la qualité et de la fiabilité des chiffres, ajoute-t-elle. Elle signale un problème au niveau de la centralisation de l’information, de la collecte des données et de leur analyse.
« Si on veut que les acteurs se mobilisent plus précocement dans la réponse [au choléra] et prévoient les plans d’action, il faut un suivi assez clair de la situation épidémiologique », souligne Marie-Noëlle Rodrigue.
La directrice des opérations de Msf préconise la mise en place, à l’échelle du pays, d’un système de surveillance du choléra qui soit fiable et de qualité afin d’avoir une image beaucoup plus claire de la situation actuelle.
« Nous allons continuer à engager le dialogue avec les différents acteurs pour l’amélioration du système de collecte des données et de l’enregistrement des cas en période de haut et de bas dans l’intensité de l’épidémie en vue d’une réaction plus immédiate », annonce-t-elle.
La saison pluvieuse, la diminution des mesures d’hygiène et de sensibilisation notamment dans les camps de déplacés de la capitale, le départ de plusieurs acteurs impliqués dans la lutte contre le choléra, sont les principales causes évoquées par Médecins sans frontières (Msf) pour expliquer l’augmentation des cas de choléra dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince.
« C’est quand même encore difficile de connaitre complètement le comportement face au choléra en Haïti parce que l’introduction de la maladie est récente. Donc, il va falloir encore quelques saisons pour savoir comment les pics vont pouvoir se succéder », affirme Marie-Noëlle Rodrigue.
Pour sa part, le chef de mission de Msf en Haïti, Thierry Goffeau, indique, dans un bref bilan, que depuis le début de l’année 2012, neuf (9) mille 800 patients ont été soignés à Port-au-Prince et à Léogane dans les centres de traitements de choléra (Ctc) de Msf.
Entre le 17 et le 22 mai, période qui correspond au pic du choléra de cette année à Port-au-Prince, Msf a soigné 72 % des cas.
Le dernier rapport du ministère de la santé publique et de la population (Mspp) fait état de plus de 7 mille morts (7, 260 décédées du choléra) dans le pays entre le 18 octobre 2010 et le 10 juin 2012.
« Au mois de mai 2012, nous avons tiré la sonnette d’alarme à propos du manque de soutien de la communauté internationale et de préparation des activités des autorités sanitaires haïtiennes », rappelle Goffeau qui dit avoir noté les lourdeurs administratives de l’Etat notamment dans le département de l’Artibonite ayant occasionné une situation explosive
« Plusieurs centres de traitements de choléra en détresse [à l’Artibonite] sont sous menace de fermeture ou de grève suite au non paiement de salaires aux employés », indique t-il.
« L’argent est là mais n’est pas décaissé », précise Goffeau. Selon lui, cette situation a eu un impact direct sur la population en provoquant la mort de plusieurs malades à cause d’une absence de prise en charge.
Médecins sans frontières espère la mise en application par l’administration politique actuelle d’une nouvelle dynamique pour l’avancement des choses de manière positive. [emb kft gp apr 15062012 09:00]