PORT-AU-PRINCE, 23 Février – Journée de suspense ce jeudi 23 février. Mais sous le boisseau. Très discrètement.
D’abord ce sont les ministres du gouvernement qui répondent à la convocation qui leur avait été adressée la semaine dernière par le Sénat.
Les ministres avaient sollicité un report en huitaine. Accordé. Revenant donc sur une sorte de résolution qui avait été prise en conseil de ministres pour ne pas répondre à la demande de remettre leurs documents de voyage à une commission sénatoriale enquêtant sur la nationalité étrangère présumée de certains de nos dirigeants, sans excepter le président Michel Martelly, les ministres ont fait volte face sous la pression parlementaire et remis ce jeudi leurs pièces.
Néanmoins selon certains observateurs, il ne s’agit pas tant de satisfaire aux demandes de la commission sénatoriale que d’un piège tendu au premier ministre Gary Conille.
On sait que Conille a quant à lui présenté ses pièces aux sénateurs enquêteurs et a aussi demandé aux ministres de ‘son’ gouvernement de faire de même.
Dans un premier temps ceux-ci ont refusé d’obtempérer pour se ranger aux côtés du président Martelly qui, on le sait, refuse mordicus de céder aux exigences de la commission d’enquête sénatoriale.
Selon les mêmes observateurs, c’est le président Martelly lui-même qui leur aurait demandé de remettre leurs pièces.
Cette manœuvre viserait à montrer que le premier ministre Gary Conille n’exerce aucun pouvoir, que les ministres ne lui obéissent en rien. Que Conille n’est qu’un portrait.
Et que tout ce qu’il lui reste à faire c’est rendre son tablier.
Jusqu’à hier (jeudi) soir, c’était le suspense. Le président Martelly adressera-t-il sa lettre de révocation au premier ministre …
Ou celui-ci qui remettrait plutôt sa démission ?
Du côté du Sénat qui a le pouvoir de renvoyer le premier ministre en lui collant un vote de non confiance, la situation n’est pas plus claire non plus.
Un proche du chef de l’Etat comme le sénateur Joseph Lambert (Sud-est), ex-coordonnateur de la plateforme INITE (opposition officielle) et passé avec armes et bagages dans le camp présidentiel, affirme que les 16 votes pour renvoyer le premier ministre sont réalisables.
Cependant d’autres sénateurs pensent que c’est du bluff et que aussi bien les 16 votes (le Sénat compte 30 sièges) pour le renvoi de l’actuel premier ministre que pour la ratification de son éventuel successeur (ou successeur-e) ne seront pas aussi faciles à réunir car la crise actuelle a des dimensions multiples. De multiples facettes.
Jusqu’à l’international qui craint un éclatement à nouveau de tout le système et aurait préféré une entente, pour commencer entre les deux branches de l’exécutif : le président et le premier ministre qui est le chef du gouvernement.
Cependant les démarches diplomatiques entreprises se sont jusqu’à présent heurtées à une fin de non recevoir. Et spécialement du côté de la Présidence.
Donc le carnaval terminé, le problème demeure entier.
C’est le moins qu’on puisse dire. Sans tomber dans les rumeurs et la machine à cancans mais qui, qu’on le veuille ou non, joue en Haïti un rôle presque aussi grand que les protagonistes eux-mêmes.

Marcus, Mélodie 23 Février 2012