Cette grande batisse en bois délabrée se dressant en plein milieux de la cour , Ruelle Roy, a en soi quelque chose de pathétique. Cependant des efforts sont faits en vue de la remise en circulation de ce véritable cénacle de l'art haïtien.

Le Centre d’Art (CA) n’est pas mort et doit continuer à vivre, a déclare Axelle Liautaud, membre du conseil d’administration du CA, en marge de la présentation du projet de sauvetage de ce centre.
« Si nous voulons que l’art haïtien reste à un niveau qui a existé jusqu’à présent grâce au Centre d’Art, cette institution doit revivre. Elle n’est pas morte. Elle est convalescente », explique Axelle Liautaud.
Le projet de sauvetage lancé en septembre 2010, est mené sous l’égide du Centre de Sauvetage des Biens Culturels (CSBC). Cinq mille toiles, un millier de sculptures et d’œuvres sur papier de la collection du Centre d’Art ont été restaurées dans le cadre de ce projet, indique Olsen Jean Julien, directeur du CSBC.
Sauvegarder…

Au départ, ces œuvres avaient été conservées dans deux containers, transférés au CSBC au mois d’aout de 2010, rappelle-t-on lors de la présentation du projet.
« On n’avait pas les moyens. On a fait une échelle avec les moyens du bord. On est passé par l’arrière, on a traversé tout ce qu’il y avait comme débris sur la cour du Centre d’Art…On a placé l’échelle sur le mur branlant et mis les hommes en file indienne pour récupérer les tableaux un à un », rapporte Maryse Desrosiers qui, en compagnie de 8 hommes, a pris part aux premières opérations de sauvetage au CA.
« Il y avait des répliques parfois à chaque heure, chaque trente minutes. On laissait la maison, on courait », raconte Desrosiers avec humour.
Créé en 1944 sous l’impulsion de l’aquarelliste américain Dewitt Peters, le Centre d’Art a été gravement touché par le tremblement de terre l’an dernier. Pour l’heure, 80% des œuvres ont été récupérées sous les décombres du bâtiment effondré, soit près de 6 000 objets d’art, estime Axelle Liautaud, tandis que d’autres sont encore sous les gravats.
« Le Centre d’Art est à l’origine des démarches les plus importantes qui ont abouti à l’existence de l’art haïtien sur le marché local et international. C’est la première galerie en Haïti. Mais c’est plus qu’une galerie d’art. Ҫa a été pendant toute son existence un centre de formation d’artistes et d’encadrement des artistes », explique Liautaud.
Selon elle cette dimension a favorisé des rapports particuliers entre le centre et les artistes qui lui sont restés « fidèles ».
…Pour reconstruire

Plus d’un an après le terrible séisme du 12 janvier, les responsables du centre ont déjà le regard tourné vers la reconstruction, d’après ce qu’a indiqué Liautaud.
« Nous avons déjà une idée claire sur ce qu’il faut que nous fassions pour qu’on puisse recommencer à fonctionner », révèle-t-elle, signalant que le CSBC entend leur fournir un appui pour la construction d’un dépôt et d’un bureau.
Le déblaiement du site devra également se poursuivre en même temps que la récupération des œuvres encore sous les décombres. Des études sont prévues par la suite pour évaluer le terrain et savoir si un nouveau bâtiment pourra y être construit.
La formation sera en outre l’une des premières activités dès la reprise du fonctionnement du CA, ajoute Axelle Liautaud. La photographie et la vidéographie seront d’ailleurs intégrées au cursus.
« Ces deux disciplines sont indispensables maintenant dans un curriculum d’art contemporain. On ne peut pas rester dans les vieilles techniques qui étaient enseignées avant, on doit aller vers les techniques de pointe », souligne-t-elle.
Au lendemain du séisme, le Centre de Sauvetage des Biens Culturels (CSBC), a estimé que 50 mille objets étaient endommagés ou en péril.
Mis en place en juin 2010, le CSBC travaille simultanément sur 8 projets à l’heure actuelle, selon Olsen Jean Julien. 8 mille documents historiques de la collection de l’historien Georges Corvington, 3 mille objets vaudou et 4 mille liasses d’archives (1804 à 1934) de la Bibliothèque Nationale sont concernées par les interventions en cours, signale l’ancien ministre de la culture. (Alter Presse)