MONTANA HOTEL, 21 Décembre – A la clôture de la rencontre, le président Michel Joseph Martelly a annoncé 4 importantes décisions.
. La mise en oeuvre des démarches pour la publication dans les prochains jours de la Constitution amendée.
. Achever la composition de la Cour de cassation.
. Les dispositions pour la désignation d’un Conseil électoral permanent, qui réponde à toutes les conditions d’indépendance et de sérieux réclamées entre autres par les partis politiques.
. La tenue dans le meilleur délai des élections pour le renouvellement du tiers du Sénat et pour les collectivités territoriales.
La président de la république a su clôturer la rencontre sur une note optimiste, partageant la satisfaction des différents acteurs réunis ce mercredi 21 décembre pendant environ 7 heures d’horloge à la salle Horizon de l’Hôtel Montana à l’invitation de la Présidence d’Haïti et du Club de Madrid dont une délégation séjournait depuis lundi dans le pays.
Cette délégation comprend les ex-présidents du Chili, Ricardo Lagos, du Panama, Martin Torrijos, de la Bolivie Jorge Quiroga, et l’ex-premier ministre français Lionel Jospin.
Le thème de la rencontre : réaliser un consensus politique ENTRE HAITIENS, incluant les trois pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire) et tous les secteurs clés (économique et social).
En même temps ce consensus ne doit pas être un assemblage de formules mais reposer sur des idées fondamentales, des priorités partagées par tous les acteurs de manière à faire avancer le pays.
Le pacte doit se construire sur ‘l’espoir et les exigences de l’avenir et non sur les divergences du passé.’
‘Les accords doivent être très concrets au niveau de leur contenu (centrés sur les aspects jugés fondamentaux à court terme) mais ouverts à autant de souscripteurs que nécessaire pour pouvoir mettre en œuvre ce qui a été décidé.’
Le Club de Madrid propose la compétence et l’expérience vécue de ses membres (plus d’une trentaine d’ex-chef de l’Etat et de gouvernement) pour aider les acteurs haïtiens à réaliser ce consensus.
En choisissant justement de mettre l’accent sur les difficultés rencontrées dans leur propre pays pour arriver à une solution de problèmes identiques ou presque. Et, nous disent-ils, aucune solution n’est totalement définitive car, selon l’ex-président du Chili, Ricardo Lagos, le dialogue national, qui est l’essence même de la démocratie, est un processus permanent et de longue haleine. C’est une longue auto-éducation de la part de tous les acteurs, à commencer par les pouvoirs politiques. Ce n’est jamais noir et blanc. Tout le monde commet des fautes. On apprend par l’expérience. La Constitution (dont il sera beaucoup question au cours de la rencontre) définit le cadre de travail. Cependant on ne peut espérer atteindre tous les objectifs d’un seul coup. Il faut définir des priorités réalisables. Et avancer au fur et à mesure. Mais en gardant toujours à l’esprit que c’est une œuvre humaine, donc sujet à des hauts et des bas, et qu’il y a toujours un coût à payer.
Au départ il faut cependant la confiance. Mettre tout le monde en confiance.
L’ex-premier ministre français Lionel Jospin a rappelé le long calvaire que cela a été pour la France avant de se doter d’un système démocratique et fonctionnel.
Il a mis l’accent sur le régime de la cohabitation qui en France force le président de la république à diriger avec un gouvernement issu de l’opposition.
Lui-même avait été premier ministre dans un cadre de cohabitation sous la présidence de Jacques Chirac.
Et il croit que c’est l’une des périodes où la France s’est le mieux portée. A la fois sur le plan économique et institutionnel.
Car INSTITUTIONS tel est le maitre mot, selon tous les intervenants. Avant que d’être politique, la crise est institutionnelle. C’est toujours un défaut de fonctionnement des institutions.
L’ex-président de la Bolivie, Jorge Quiroga, a rappelé que son pays était classé, il n’y a pas encore vingt ans, presque au même niveau que Haïti.
Le thème de ce panel était : ‘Coopération avec la communauté internationale.’
Mr Quiroga a donné quelques recettes concernant cette dernière : l’aide est bonne, mais pas trop d’aide, et encore moins de trop de donateurs à la fois !
Dans un langage très jeune cadre, il a défini certains principes qu’il considère clef dans les rapports avec les bailleurs et qu’il a énuméré ainsi : Avoir un Programme, ou mieux une Vision, mais aussi du Leadership et continuer sans relâche le renforcement des Institutions, y compris le service public.
Travailler aussi dans le cadre d’un Budget approuvé par le Parlement.
Ne jamais fournir aucune sorte de prétextes aux bailleurs.
Bref pour s’imposer, il faut bien faire d’abord son devoir de maison.
C’est le premier ministre Garry Conille qui était le vis à vis haïtien à l’ex-président bolivien.
Il a parlé des initiatives du gouvernement Martelly-Conille pour introduire un nouveau modèle de relations avec la Communauté internationale.
Entre autres, il a été remis aux différents bailleurs un programme portant sur 5 ans. Dans 5 ans, l’intervenant doit transmettre toutes ses fonctions à une autorité nationale.
A propos des Ongs, celles-ci restent bienvenues mais elles doivent respecter les besoins réels du pays. Respect du contexte national.
Le premier ministre Conille annonce une conférence des bailleurs en Haïti en 2012.
Le 4e intervenant du Club de Madrid, l’ex-président du Panama, Martin Torrijos, a rappelé que la crise économique est en train de provoquer beaucoup de changements dans le monde sur tous les plans. Et que les Haïtiens doivent savoir avec précision ce qu’ils veulent aujourd’hui.
Pour y arriver, il faut développer une culture de dialogue. Sortir du paternalisme. Il faut également une vision. Savoir ce qu’on veut atteindre dans au moins 20 ans.
Les intervenants du côté haïtien étaient le président de la Chambre des députés, Sorel Jacinthe, qui a fait le procès du présidentialisme considéré comme étant à la base de la plupart des travers qui rongent le système : non respect du principe des trois pouvoirs, mainmise sur la justice, improvisation dans le choix des dirigeants politiques, la corruption etc.
Quant au président du Sénat, Rodolphe Joazile, il est remonté dans l’Histoire du pays pour dénoncer un système traditionnel bâti sur la logique du plus fort, l’exclusion, les lignes de clivage à la fois politiques, économiques, linguistiques et socio-culturels, en un mot une guerre interne de basse intensité.
Espérant au passage que l’International ne nous refera pas à nouveau le coup du clientélisme.
Car il sera aussi question des rapports de la Communauté internationale avec Haïti. La république des ONGs. Avec pour évoquer le sujet un premier ministre Garry Conille et 4 anciens premiers ministres autour de la table, Jean Max Bellerive, Jean Marie Chérestal et Rosny Smart.
Le troisième pouvoir, en la personne du président de la Cour de cassation, Me Anel Joseph, accompagnée de la Doyenne du tribunal de première instance, Marie Josseline Casimir, animait la table ronde sur le thème ‘Justice et sécurité.’
Les questions ont tourné principalement autour d’un point : comment lutter contre la corruption dans la justice ?
Le secteur politique était largement représenté avec des leaders de la plateforme Alternative (Serge Gilles, Evans Paul), Mario Dupuis (Ansam nou Fò), et ceux d’autres partis, Lavni, etc.
Forte représentation aussi de la Société civile (Rosny Desroche, Odette Roy Fombrun).
Ainsi que du secteur privé (Gregory Mevs, Bernard Fils Aimé de la firme de téléphonie Voilà). Au niveau institutions du secteur privé : Bernard Craan, Pierre Marie Boisson, Me Sybille Mevs.
Les secteurs sociaux ont participé au débat, des représentants de syndicats d’enseignants.
Et aussi des ONGs.
Les conclusions finales ont été dégagées par un conseiller spécial auprès du Club de Madrid, l’ex-représentant du Secrétaire général de l’ONU en Haïti pendant la période difficile des élections de 2006, le diplomate chilien Juan Gabriel Valdès.
Chaque panel avait un journaliste comme modérateur. Ce sont Robenson Alphonse du Nouvelliste, Clarens Renois (AFP), Herold Jean François (Radio Ibo) et votre serviteur Marcus.
La rencontre avait été ouverte par le président Michel Martelly qui a donné le coup d’envoi sur une note reçue comme une bonne introduction : ‘s’écouter et apprendre l’un de l’autre’.
Tout comme le président fermera la journée avec ce que l’assistance a reçu comme des nouvelles positives.
Savoir activer les dispositions pour la publication prochaine de la Constitution amendée ;
Et désigner enfin un Conseil électoral permanent. Une disposition constitutionnelle maintenue au purgatoire depuis 1987.
Les partis politiques semblent avoir reçu cette dernière information avec un grand soulagement.
Des élections doivent être tenues dans les prochains mois pour le renouvellement du tiers du Sénat et pour les collectivités territoriales.
A la sortie, tous répétaient la même chose : à quand la prochaine rencontre ?

Marcus, 21 Décembre 2011