RHINE NEWS
‘‘Les bandits qui occupent le palais de justice, symbole de l’équilibre social et de la correction depuis près d’un mois, ont emporté des dossiers judiciaires, des corps du délit et tout le matériel mobilier de l’institution’’, a souligné le magistrat.


Interrogé par Echo Magazine Actualité et RHINEWS, Me Morin s’est déclaré indigné par le silence des plus hautes autorités sur la prise d’otage suivi du pillage du tribunal de première instance de Port-au-Prince (TPI), soulignant que toutes les archives du tribunal ont été emportés par ces mêmes bandits.
« Ni les autorités politiques ni les autorités judiciaires n’ont pipé mot au sujet du TPI alors la mémoire de la plus grande juridiction du pays vient de disparaitre », a encore déploré le magistrat qui a déclaré ne pas comprendre le comportement des dirigeants.
Il a noté que depuis 2011, de nombreuses plaintes relatives à un ensemble de dossiers ayant défrayé l’actualité, dont l’affaire Petro Caribe en particulier et d’autres concernant certaines anciennes et ou actuelles autorités, ont été déposées et sont encore en souffrance au tribunal.
Le magistrat instructeur a souligné que tous ces dossiers ont été volatilisés. A date, aucun inventaire n’a été fait et personne d’autre que les bandits, n’a accès au tribunal et à ces dossiers judiciaires, a-t-il fait remarquer.
Estimant que cet acte ne semble pas être isolé et aurait été minutieusement planifié, Jean Wilner Morin s’est demandé à qui profite cette forfaiture qui avilit la nation haïtienne, particulièrement la justice.
Il a déclaré que ce qui s’est passé est d’autant plus grave qu’il aura des impacts considérables sur le traitement d’un ensemble de dossiers judiciaires, arguant que sans la présentation des preuves, il sera difficile à juge de condamner un prévenu même si on pourrait penser qu’il est coupable.
Selon le magistrat, les bandits ont pris le contrôle du tribunal afin de disparaitre, entre autres, des dossiers et des preuves sans lesquels, il sera impossible de conduire un procès sérieux contre certains individus.
‘‘Seule les dossiers traités par la direction centrale de la police judiciaire et transférés au cabinet d’instruction pourront être reconstitués’’, a déclaré Morin, soulignant qu’il y a très peu de chance que les dossiers des citations directes soient reconstitués en vue d’un procès.
Il a affirmé que les malfrats semblent avoir fait preuve d’une meilleure organisation et d’une intelligence supérieure par rapport à ceux qui ont la charge de la protection de la société.
« Ce qui est arrivé était prévisible et évitable d’autant que les brandissaient la menace depuis près de quatre ans. Cela pourrait être évité, si seulement ceux qui dirigent se souciaient de la bonne marche de la justice en Haïti », a déclaré le magistrat, déplorant que rien de concret n’ait été fait pour préserver l’image de l’appareil judiciaire de cette souillure.
Morin a souligné que jusqu’à date, a part les associations de magistrats qui s’inquiètent et prennent des initiatives pour tenter de relocaliser le TPI, rien n’a été fait tant par le chef du gouvernement, son ministre de la justice que par le conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ).
Il a dit craindre qu’un tel acte soit commis avec la complicité des autorités, arguant que, si la justice était debout, elle aurait dû questionner les dirigeants sur ce qui s’est passé le 10 juin dernier.
Il a annoncé qu’une correspondance sera adressée incessamment au premier ministre en vue de l’informer qu’a l’issue d’une rencontre avec les associations de magistrats et le protecteur du citoyen, au moins deux bâtiments publics vaquant, ont été identifiés au centre-ville de Port-au-Prince, pour solliciter que le palais le TPI soit logé dans l’un d’entre eux.
Déplorant que la justice soit tributaire du pouvoir exécutif, Morin a plaidé en faveur d’une vraie reforme judiciaire qui consacrerait l’indépendance effective de la justice tant dans son fonctionnement que dans l’exécution de son budget.