MIAMI, 11 Avril – Récemment on annonçait l’ouverture en Haïti, dans les locaux de l’Ambassade des Etats-Unis à Port-au-Prince, d’un bureau du Homeland Security Investigations (HSI) des Etats-Unis.

C’est quoi le Homeland Security Investigations ?

C’est l’équivalent chez nous du Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales. Donc le rôle du Homeland Security Investigations c’est, comme son nom l’indique, la protection de la sécurité intérieure des Etats-Unis et du peuple américain.

Par conséquent Haïti serait actuellement perçue comme une menace pour la sécurité des Etats-Unis et du peuple américain ?
Le bureau récemment ouvert, et, précise-t-on, sur un plan permanent, à l’Ambassade américaine en Haïti a pour mission « d’augmenter les relations entre les deux pays en combattant les crimes liés aux gangs, de trainer les criminels devant la justice et de protéger la sécurité publique’.

A cette inauguration le directeur exécutif associé du Homeland Security Investigation (HSI), M. Steve Francis était accompagné de l’actuel Chargé d’affaires américain en Haïti, M. Kenneth Merten et de l’Assistant Chef de Mission Nicole Theriot.

Donc les activités criminelles qui font rage aujourd’hui et sur un plan quotidien dans notre pays (meurtres et kidnappings à la pelle) sont maintenant perçus aussi comme une menace pour les Etats-Unis et le peuple américain. Du moins on le présume.

Feuille de route du HSI : « développer et multiplier les relations avec les institutions correspondantes dans le pays hôte par l’échange d’informations, la coordination, en appuyant et en facilitant les investigations et les poursuites pour détecter les voies utilisées par les organisations criminelles transnationales et les gangs dans le fonctionnement des réseaux de contrebande entre Haïti et les Etats-Unis. »
« HSI travaillera avec ses homologues en Haïti pour identifier les sources d’approvisionnement et détruire les réseaux de contrebande. »
« HSI commence par travailler vers l’établissement d’une Unité d’Investigation Criminelle Transnationale en Haïti. Celle-ci composée de spécialistes dans l’application des lois et des mesures douanières, travaille étroitement avec HSI pour investiguer et poursuivre les individus impliqués dans des activités criminelles transnationales. »
Est-ce que les gangs criminels qui nous empêchent de vivre appartiennent à ce type d’activités criminelles mentionnées dans les déclarations précédentes ?
Ne nous empressons pas de dire OUI.

La mission du Home Security Investigation étant (read my lips !) : « la protection de la sécurité intérieure des Etats-Unis et du peuple américain ».
Nous avons de plus la DEA en exemple, hélas.

La Drug Enforcement Administration (police américaine anti-drogue) qui pour protéger ‘les Etats-Unis et le peuple américain’, n’a pas hésité à semer dans notre pays des ‘indicateurs’ dont certains se retrouvent mêlés à toutes sortes d’activités criminelles, oui jusqu’à la participation à l’assassinat du président de la république Jovenel Moïse le 7 juillet 2021. Voilà.

Le seul fait d’être un agent au service du ‘grand voisin’ confère une véritable immunité dans le pays hôte pour l’agent local.

Une sorte de ‘licence to kill’ à la James Bond.

C’est donc pour la DEA un échec mais de plus, qui n’est pas reconnu officiellement par les services américains.
Et cela fait réfléchir bien sûr.

Cependant nous lisons aussi dans les lettres de créance du Home Security Investigation (HSI) par la voix de son directeur associé Steve Fancis à l’ouverture récemment de son bureau à Port-au-Prince : « Comme partenaires, et plus important encore comme alliés, nous sommes unis dans notre résolution pour supporter Haïti alors qu’elle cherche des moyens pour barrer la route aux gangs criminels et restaurer la sécurité pour tous les citoyens haïtiens. »

Cependant cela fait près d’un mois que le bureau spécial de ce service américain dans la lutte contre le crime organisé, est ouvert dans nos murs, a-t-on remarqué un quelconque changement à ce niveau ?

Nous ne saurions encore répondre. Cependant il y en a dont c’est la spécialité. En tête nos organisations de défense des droits humains. Il ne reste donc que d’attendre.

D’ailleurs avant cette reconnaissance officielle, le Home Security Investigation était déjà dans nos murs. En effet nous lisons encore : ‘L’année dernière, HSI a déployé plusieurs agents en Haïti en support à l’opération CITADEL. »

‘Chacha ye cha ?’
Jamais entendu parler ?

« L’opération Citadel est destinée à renforcer l’application de la loi dans les domaines des douanes, de l’immigration dans les pays hôtes, mais toujours là où ces derniers contreviennent aux lois des Etats-Unis, cela en ciblant les mécanismes utilisés pour la migration illégale, les fonds illicites et la contrebande à travers la Caraïbe, et l’Amérique du Sud et centrale. »

Nous lisons : ‘En 2019, HSI a établi CFI (Initiative Caribéenne contre le Trafic des Armes à Feu) dans la région, travaillant avec les nations hôtes pour identifier les réseaux clandestins et ceux (et celles) impliqués dans la contrebande d’armes à feu ainsi que leurs associés qui les utilisent pour commettre des crimes. »
Nos gangs, quoi.

Bref, HSI a pour rôle, en dehors de son action aux Etats-Unis mêmes, et en partenariat avec les services locaux correspondants à l’étranger, de « détecter et démanteler les organisations criminelles transnationales qui menacent la sécurité des Etats-Unis’ ainsi que, nous citons « la sécurité nationale du pays hôte. » Bon à retenir.

Aux Etats-Unis, le Homeland Security, équivalent du Ministère de l’Intérieur dans d’autres pays, a une mission plutôt vaste. Dont celle d’une part de répondre aux cas de désastres naturels ou commis par l’homme, d’autre part et surtout pour le contrôle de l’application des lois de l’immigration (ça nous savons que trop bien) … ainsi que dans la lutte anti-terroriste et la cybersécurité.

Actuellement ce ministère a à sa tête un cubain-américain, Mr. Alejandro Mayorkas.

Peut-on parler d’espionnage ?

Nous lisons : « Au moins une composante du DHS (Department of Homeland Security), le Federal Protective Service, a espionné sur des manifestations pacifiques et produits des rapports, malgré le fait que ce n’est pas son rôle » (fin de citation).

Cependant il faut retenir aussi les conditions particulières qui ont marqué le Homeland Security comme son nom l’indique.

Il a commencé ses nouvelles opérations qu’on lui connait aujourd’hui comme une conséquence des terribles Attentats du 11 septembre 2001 qui ont montré que les Etats-Unis sont exposés à des menaces terroristes venant de l’extérieur.

Créé par le président George W. Bush, en 2003, et une branche du pouvoir exécutif, sa mission est de détecter, de prévenir et de se préparer pour répondre à toute attaque venant de l’extérieur, y compris terroriste.

Est-ce que donc Haïti représente aujourd’hui un danger (terroriste) pour les Etats-Unis, spécialement à l’heure actuelle avec ses gangs armés qui tuent et kidnappent à longueur de journée et surtout largement alimentés en armements et munitions (et que l’on croit venir des Etats-Unis), Haïti à ce compte-là représente-t-elle oui un danger terroriste pour les Etats-Unis ?

Ou est-ce seulement une affaire totalement haïtienne ? Ou comme on disait autrefois des quartiers noirs aux Etats-Unis ‘only blacks killing blacks’ (oh ! seulement des noirs tuant d’autres noirs) …

En tout cas on ne tardera pas longtemps pour le savoir.

En tout cas en voici un ministère qui a les moyens de sa politique. Par exemple, pour l’année fiscale 2018, DHS s’était vu allouer un budget discrétionnaire de 47.716 milliards de dollars.

En tout c’est lui que le président Joe Biden a décidé de nous envoyer et non cette fois les Marines comme beaucoup semblaient espérer.
On attend voir les résultats de cette Unité d’Investigation Criminelle Transnationale en train d’être mise sur pied en Haïti.
On ne peut plus d’attendre. Bien entendu.

Marcus Garcia, Haïti en Marche, 11 Avril 2022