L’enquête se poursuit …

MIAMI, 13 Juillet – Qui a tué Jovenel Moïse ? Différentes thèses se répercutent autour de l’assassinat du président haïtien dans la nuit du mardi 6 au mercredi 7 juillet 2021 à l’intérieur de sa résidence et de sa chambre à coucher, à Pèlerin 5, dans les hauteurs dominant Port-au-Prince, la capitale haïtienne.
L’enquête se poursuit. Exceptionnellement conduite en Haïti, par la police judiciaire et le parquet de Port-au-Prince, mais également par des institutions d’investigation américaines (FBI) ainsi que par la justice et la police d’un troisième pays, la Colombie.
En effet ce sont principalement des ressortissants colombiens qui forment le gros du commando qui s’est introduit chez le président et qui est accusé du meurtre.
Cela avec la complicité de quelques citoyens américains, plus exactement haïtiens-américains.
D’abord deux, les nommés James Solages, 35 ans, et Joseph Vincent, 55 ans.
Mais le cercle s’élargit. Ainsi dimanche la police nationale d’Haïti (PNH) a procédé aussi à l’arrestation de Christian Emmanuel Sanon, 63 ans. Celui-ci est un médecin haïtien qui vit en Floride (USA) depuis quelque 20 ans.
Sans ambages le directeur général a.i. de la PNH, Léon Charles, a accusé ce dernier d’être le cerveau du complot. Selon Léon Charles, Christian Emmanuel Sanon a parlé, immédiatement après l’assassinat du chef de l’Etat, à plusieurs des Colombiens arrêtés dans le cadre de ce dossier.
‘C’est un individu qui est entré en Haïti à bord d’un avion privé et avec des intentions politiques’ a indiqué Léon Charles.
C’est le médecin, toujours selon les enquêteurs haïtiens, qui a également introduit en Haïti les quelque 28 Colombiens, d’anciens militaires à la retraite, en les embauchant via une agence de sécurité floridienne (CTU) dirigée par un vénézuélien.
Les Colombiens sont entrés en Haïti en passant par la République Dominicaine voisine.
Ils devaient servir de sécurité personnelle au Dr. Christian Emmanuel Sanon.
Une fouille chez ce dernier aurait permis de découvrir ‘une cache de munitions, plusieurs plaques d’immatriculation dominicaines ainsi qu’une casquette à l’effigie de la DEA’ (police américaine anti-drogue), a dit Léon Charles.
Justement au moment de l’assaut contre la résidence du chef de l’Etat, des voisins auraient entendu crier ‘DEA Operation’, comme pour tromper la vigilance des responsables de la sécurité du président.
Mais ce n’est pas fini. Voici que lundi on apprend, via la chaine de télévision américaine CNN, que certains des comploteurs auraient été utilisés dans le temps comme ‘informants’ (informateurs) par la DEA … ainsi que le FBI.
La DEA confirme mais précisant que bien sûr son ‘informant’ agissait de sa seule initiative dans l’affaire en question, tandis que le FBI répond qu’il ne commente pas ce genre d’informations.
En tout cas, les fils commencent à se recouper, direz-vous.
En effet, tout de suite après l’assassinat du président, dont la nouvelle a été annoncée à l’aube, le mercredi 7 juillet, on apprenait que le coup a été fait par des mercenaires colombiens.
Ceux-ci sont arrêtés la même matinée sans difficulté et pas loin du lieu du crime. Lors des confrontations avec les forces de l’ordre, au moins 3 d’entre eux perdent la vie.
Environ 7 (…) sont conduits en prison. Ainsi que les deux Haïtiens naturalisés Américains, James Solages et Joseph Vincent.
Cependant voilà que 1) lesdits mercenaires déclarent que lorsqu’ils sont arrivés sur les lieux, le président Jovenel Moïse était déjà mort.
Mais surtout 2) pourquoi, se demande-t-on étonné, les Colombiens n’ont-ils pas quitté immédiatement les lieux une fois leur forfait accompli, pourquoi sont-ils restés à trainer jusqu’à être arrêtés sans opposer une véritable résistance ?
Jusqu’à ce que tombe la nouvelle de l’arrestation aussi du Docteur Christian Emmanuel Sanon, celui qui les aurait engagés, et qui a organisé leur transport en Haïti.
Ainsi donc la boucle est bouclée ?
Pas du tout.


Puisque le président Jovenel Moïse étant mort, où est la suite du programme – car cela ressemble de plus en plus à un film à suspense, tiré d’un roman de Agatha Christie ?
Lui aussi le Docteur est resté chez lui jusqu’à ce que la police vienne le cueillir.
Tout ce qu’on sait c’est qu’il avait l’intention d’éliminer le président et … de prendre le pouvoir.
Comme si le pouvoir était une pomme que l’on cueille et rien d’autre.
Le DG a.i. de la Police nationale dit qu’il y a d’autres personnes recherchées. Lundi on citait des noms mais toujours dans le landernau, c’est-à-dire sans précision. Des personnalités politiques haïtiennes sont invitées aussi par le juge. Mais jusqu’ici simple formalité. Certains comme ayant commenté les faits de manière trop ‘chèlbè’, c’est-à-dire comme s’ils en savaient plus mais bòf.
Aussi les questions essentielles demeurent : pourquoi a-t-on tué le président de la République ? Et de manière aussi horrible, selon le juge qui a dressé le constat.
Mais par-dessus tout, où était la sécurité dans la résidence présidentielle. Pas un mot à ce sujet. Comme si le président était tout seul, avec la première dame Martine Moïse, qui a été blessée de trois balles mais qui n’ont pas mis sa vie en danger (elle a été transportée à Miami pour être soignée) ainsi que la fille du couple qui dit s’être cachée dans une chambre à côté.
Pourquoi la sécurité présidentielle n’est-elle pas intervenue ? N’a même pas essayé d’intervenir ?
Là il faudrait revenir à la déclaration desdits mercenaires colombiens, savoir que quand ils sont arrivés sur les lieux, le président était déjà mort.
N’oublions pas que l’investigation n’est pas conduite uniquement par la police et la justice haïtiennes mais que les autorités américaines et surtout colombiennes, y sont impliquées également et que ces dernières surtout feront tout leur possible pour révéler la vérité et rien que la vérité car il y va de la réputation de leur pays, la Colombie.
Et si le président était en effet déjà mort à l’arrivée du commando, quelles qu’aient été les intentions de ce dernier ?
Et dans ce cas, qui aurait tué le président si ce ne sont pas les Colombiens ?
Seule la Première dame comme témoin oculaire de l’événement, qui pourrait dire.
Or si le président était déjà mort cela expliquerait bien des choses.
Supposez que le président aurait été tué par des proches …
Entendez des gens entrés chez lui sans éveiller le moindre soupçon, des habitués quoi. Cela expliquerait 1) que la sécurité présidentielle n’ait point réagi.
2) Cela expliquerait aussi que le plan des comploteurs, c’est-à-dire du fameux docteur Christian Emmanuel Sanon, soit immédiatement tombé à l’eau. D’où les Colombiens errant dans les rues sans objectif, d’où le ‘doc’ qui aurait eu tout le temps de laisser s’il le voulait le pays avant son arrestation 4 jours plus tard.
Mais qui aurait pu tuer le président dans sa propre chambre, en y entrant malgré la porte blindée donc auquel Jovenel Moïse aurait lui-même ouvert la porte sans le moins soupçon, et surtout sans éveiller l’attention du corps de sécurité présidentielle ?
Seule la Première dame qui pourrait éclaircir ce mystère.
Martine Moïse est donc un témoin clé. Sinon le seul témoin. Véritable.
On comprend donc tant d’attention autour de sa personne, en sécurité qu’elle est dans un hôpital à Miami, Floride.

Marcus Garcia, Haïti en Marche, 13 Juillet 2021